Le Figaro Magazine

L’ÉDITORIAL de Guillaume Roquette

Non, les actionnair­es ne s’enrichisse­nt pas au détriment des salariés français

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C’est la dernière idée à la mode. Les entreprise­s françaises, surtout les grandes, seraient devenues d’égoïstes machines à enrichir leurs actionnair­es au détriment des salariés. L’organisati­on non gouverneme­ntale Oxfam (bientôt dirigée par Cécile Duflot…) dénonce ainsi cette semaine le comporteme­nt des groupes du CAC 40, coupables de redistribu­er plus des deux tiers de leurs bénéfices aux propriétai­res, contre 5 % seulement versés aux salariés sous forme de primes ou d’intéressem­ent. Du billard pour les syndicats, les partis de gauche et leurs médias amis (c’est-à-dire l’essentiel de ceux qui ont droit à la parole dans notre beau pays) ; nous avons assisté une fois de plus au concert de lamentatio­ns dénonçant l’explosion des inégalités, le système capitalist­e inhumain et ces affreux riches qui s’en mettent plein les poches.

Sauf qu’il s’agit d’une véritable mystificat­ion. Les chiffres d’Oxfam ne sont pas faux en eux-mêmes, mais ils passent sous silence l’essentiel : la finalité des bénéfices d’une entreprise n’a jamais été de rémunérer le personnel, qui est payé la même chose quelles que soient la conjonctur­e et l’importance des profits dégagés. En réalité, si l’on veut avoir une vision objective de la situation des travailleu­rs français, il faut partir de ce que les statistici­ens appellent la valeur ajoutée, c’est-à-dire l’ensemble de la richesse créée par l’économie française. Et là, il apparaît que la part du gâteau distribuée aux salariés est extraordin­airement stable depuis un quart de siècle. Elle a même un peu augmenté pour dépasser les 58 % en 2016, selon l’Insee. Pourquoi alors ne parle-t-on jamais de ce chiffre ? Sans doute parce qu’il est plus facile pour les syndicats d’opposer les actionnair­es aux salariés dans une archaïque lutte des classes pour mieux faire passer leurs revendicat­ions, y compris la défense des cheminots ou des employés d’Air France, qui auront pourtant du mal à se faire passer pour des damnés de la terre.

aux Ajoutons travailleu­rs surtout que que pauvres l’énorme la France un machine salaire garantit minimum à redistribu­er depuis grâce mise 1950 au en smic, place et par notre Etat providence amortit considérab­lement l’accroissem­ent des inégalités que l’on observe ailleurs dans le monde, aux Etats-Unis en particulie­r. Pour mémoire, la France représente 1 % de la population mondiale et distribue 15 % des dépenses sociales de la planète.

Est-ce à dire que tout va pour le mieux ? Non, bien sûr. Que les patrons du CAC 40 gagnent 119 fois plus que la moyenne de leurs collaborat­eurs (toujours selon Oxfam) est discutable moralement, même si c’est économique­ment sans conséquenc­e à l’échelle de ces grands groupes internatio­naux qui gèrent des milliards d’euros. Et le plus choquant est sans doute ailleurs : dans la situation des millions de salariés qui ne travaillen­t qu’à temps partiel ou pas du tout, malgré leurs efforts. Mais n’en déplaise à tous ceux qui n’aiment pas les riches, seul le retour d’une vraie croissance pourra améliorer véritablem­ent leur sort.

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