DON ANTONIO
Le culte de l’huile vierge
Quand il s’exprime en italien, sa légère touche d’accent d’Amérique latine trahit don Antonio. Le moine bénédictin gérant des activités agricoles de l’abbaye de Monte Oliveto Maggiore vient du Honduras. « J’ai appris l’agriculture en arrivant ici, confesse-t-il. Je n’en avais que quelques notions venues de mon
enfance quand j’allais aux champs avec mes parents. » Et comme la règle de son ordre l’exige, il a travaillé et appris. Aujourd’hui, à 46 ans, rien de ce qui touche aux 950 hectares du domaine de l’abbaye n’a de secret pour lui. Viticulture, céréales, assolement, soin des oliviers, lutte contre les parasites, élevage porcin, poulailler : le religieux pourrait en parler des heures. Il ignore seulement la composition de la liqueur qui macère dans de grandes cuves au sous-sol du monastère. Seuls les frères liquoristes ont été initiés aux 23 plantes et herbes qui entrent dans la composition de la Flora, un breuvage digestif légèrement amer.
« C’est bon, lance-t-il, en trinquant avec le visiteur. Mais ne me demandez pas ce qu’il y a dedans ! » La production qui l’accapare le plus reste l’huile d’olive. Vierge extra, de première pression à froid, elle porte le label de l’agriculture intégrée. Les oliveraies du monastère couvrent 30 hectares plantés de 4 500 arbres. « Nous
éprouvons un peu de mal à écouler notre vin, explique don Antonio, mais notre production d’huile, elle, est intégralement vendue chaque année. » Autour de 7 000 litres sortent des pressoirs et finissent dans des bouteilles dont l’élégante étiquette est ornée d’un vieux moulin à huile. Trois sortes d’olives entrent dans sa composition. Le bénédictin en vante l’arôme frais et l’acidité très basse (pH 0,01) : « Nos oliviers poussent sur une terre argileuse qui leur convient bien. Tout comme l’altitude idéale à laquelle ils sont plantés : 300 mètres. » Malheureusemnent la récolte
de 2018 s’annonce médiocre : « Le printemps a été exceptionnellement pluvieux, ce que l’olivier n’aime pas. » Don Antonio est renfrogné car il sait que la vie de la communauté, composée de 35 moines, dépend beaucoup de ses talents. L’huile d’olive est la première ressource du monastère. Or, il craint que la récolte de l’année atteigne à peine
la moitié d’une cueillette moyenne. « Notre huile est chère à produire. Et nous la vendons moins de 20 € le litre. Cette année, on va perdre de l’argent. »