CES DICTATEURS QUI NE FONT PAS LA UNE
OMAR EL-BÉCHIR Le plus sanguinaire
Officier parachutiste de formation, il dirige le Soudan depuis vingt-neuf ans, après un coup d’Etat militaire en 1989. Dès son arrivée au pouvoir, il a pris soin de suspendre l’ensemble des partis politiques et de placer son pays sous un code légal islamique. Son refus de négocier avec les mouvements sécessionnistes provoque la guerre du Darfour et le déplacement de 2,7 millions de personnes. Cumulant les postes de chef de l’Etat, Premier ministre et ministre de la Défense, il fait l’objet d’un mandat d’arrêt international lancé par la Cour pénale internationale pour crimes de guerre, crimes contre l’humanité et génocide. Un cas unique pour un dirigeant en exercice.
HUN SEN Le plus discret
Nommé Premier ministre du Cambodge en 1985, cet ancien commandant khmer rouge repenti n’a pas quitté le pouvoir depuis, instaurant un régime autoritaire corrompu. Avec une patience tout asiatique, il a su éliminer ses rivaux les uns après les autres et n’est pas prêt à prendre sa retraite car, dit-il, « je ne peux pas, le pays a besoin de moi ». Depuis septembre, son principal opposant, Kem Sokha, est emprisonné, et son parti (le PSNC) dissous, accusés tous deux de fomenter une révolution soutenue par l’étranger. La voie est libre avant les prochaines législatives prévues pour le mois juillet. Et quiconque tenterait de lui barrer la route est prévenu : Hun Sen a annoncé qu’il était prêt à « éliminer 100 à 200 personnes » pour garantir la stabilité du pays.
NOURSOULTAN NAZARBAÏEV Le plus riche
Il est arrivé à la présidence du Kazakhstan en 1990 et a été réélu quatre fois et sans difficulté, aucun parti, sinon le sien – communiste – n’ayant le droit d’expression. Nazarbaïev, 77 ans, aime l’argent et le montre en gravant son effigie sur les billets de banque. L’Observatoire géopolitique des criminalités (OGC) l’a désigné « dictateur le plus riche de la planète ». Pillant les ressources de son pays (pétrole, fer, uranium, potassium) à son profit, sa fortune personnelle, difficile à évaluer précisément, est estimée à plusieurs milliards de dollars et lui permet de s’offrir toutes les excentricités : en 2013, pour célébrer le mariage de son petit-fils, il invite le rappeur Kanye West à se produire dans un concert privé. Montant du cachet : 3 millions de dollars.
ISSAYAS AFEWERKI Le plus paranoïaque
A son arrivée au pouvoir en mai 1993, la communauté internationale – Bill Clinton en tête – couvre de louanges le héros de la guerre d’indépendance de l’Erythrée contre son voisin éthiopien. Mais l’ancien chef rebelle voit des ennemis partout, verrouille ses frontières et plonge le pays dans un climat de terreur. L’ONG Human Rights Watch a fait état de 10 000 personnes emprisonnées sans jugement. Quant aux plus jeunes, ils sont enrôlés de force dans l’armée dès l’âge de 17 ans, sans démobilisation avant 40 ans au moins. Résultat de cette politique : plus de 400 000 Erythréens ont fui le régime du « Négus rouge » et rejoignent la cohorte des migrants vers l’Europe.
ALEXANDRE LOUKACHENKO Le plus présentable
Au pouvoir depuis vingt-trois ans, il maintient la Biélorussie dans un état léthargique depuis la chute de l’Union soviétique : 80 % des entreprises sont toujours détenues par l’Etat, les dissidents disparaissent subitement lors de très rares manifestations de protestation, et la police politique locale porte toujours le nom de KGB. Reste qu’à 63 ans, le dernier dictateur d’Europe joue sur la fibre nationale, décline sans fin l’idée d’un complot occidental et jouit de ce fait d’une certaine popularité auprès de ses concitoyens qui apprécient une relative protection sociale et une vraie indépendance vis-à-vis de Moscou.