LA CHRONIQUE de François d’Orcival
Sous les IIIe et IVe Républiques, les réfugiés en grand nombre étaient « mis à l’abri » dans des « centres fermés ».
Des « centres fermés »… L’idée n’est pas nouvelle, elle nous vient de la République (IIIe du nom), radicale, socialiste, humaniste et « fraternelle », qui n’avait guère d’états d’âme à l’égard de ses réfugiés.
Elle avait pourtant tous les motifs d’être accueillante, entourée qu’elle était par les dictatures hitlérienne et mussolinienne, alors que se déroulait en Espagne une atroce guerre civile entre communistes et anarchistes d’un côté, franquistes nationalistes de l’autre.
La France avait vu arriver 150 000 réfugiés espagnols durant les premières années de cette guerre.
A la fin de 1938 et au début de 1939, quelque 500 000 autres traversèrent les Pyrénées. Près des deux tiers furent dirigés vers des camps où ils furent
« mis à l’abri ».
Par souci de protection du territoire.
Un premier décret, du 2 mai 1938, indiquait :
« Le nombre sans cesse croissant d’étrangers résidant en France impose au gouvernement d’édicter certaines mesures que commande impérieusement le souci de la sécurité nationale, de l’économie générale du pays et de la protection de l’ordre public. »
Les mesures annoncées firent l’objet d’un décret-loi du 12 novembre 1938. Les étrangers jugés « indésirables », disait-il,
« seront astreints à résider dans des centres dont la désignation sera faite par décret… »
Les centres fermés en question furent rapidement construits, surtout dans le Midi : Argelès, Agde, Collioure, Canjuers, Rivesaltes, etc., tandis que d’autres réfugiés étaient embarqués pour l’Algérie.
Toutes choses décidées par un président du Conseil radical, Edouard Daladier (qui venait de signer les accords de Munich), et un ministre de l’Intérieur, Albert Sarraut, « vieux routier » tout aussi radical. Ces camps demeureront sous l’Occupation.
A la Libération, la IVe République prévoira dans le préambule de sa Constitution que « tout homme persécuté en raison de son action en faveur de la liberté a droit d’asile sur le territoire de la République ».
C’est l’origine du droit actuel. La convention de Genève de 1951, inspirée par les persécutions de la Shoah et les déplacements de populations d’après-guerre, prolongera le droit des
« réfugiés et apatrides ».
Hors l’accueil des persécutés et des combattants de la liberté, le droit d’asile ne s’impose pas ; il est de la seule souveraineté de l’Etat. En France, ce principe remonte aux Capétiens.