À L’AFFICHE et les passe-temps d’Eric Neuhoff
Dans son docu-film « Les Manants du roi », Patrick Buisson ravive la mémoire des insurrections contre-révolutionnaires.
Si les guerres de Vendée (1793-1796) ont alimenté nombre d’épopées, il est moins aisé de les transposer à l’écran avec originalité et authenticité. Bravant ces difficultés, Patrick Buisson en livre une approche singulière, entre récits historiques et témoignages fictifs. Au rythme de chants vendéens, d’extraits de films ( Chouans !, Les Vendéens, Le Dialogue des carmélites, etc.) et de références picturales, divers regards se croisent pour éclairer cette époque troublée. Derrière un prêtre réfractaire hostile à la Constitution civile du clergé, un paysan dévoué à son clocher fustige les « patauds », ces patriotes républicains assimilant religion et aliénation. Face à eux, un Montagnard exalté affiche son mépris pour ces « fanatiques en sabots aveuglés par leurs superstitions » , rapidement transformés en ennemis de la nation.
Des prémices de l’insurrection à son éradication en passant par sa difficile organisation, les personnages rappellent que si le clergé a soutenu le mouvement, il ne l’a pas engendré. Que les armées des chouans n’avaient d’autre qualification que le maniement de leurs bâtons, ni d’autre motivation que celle de remettre Dieu au centre de leurs institutions. Que la riposte républicaine, enfin, « parce que la pitié n’est pas révolutionnaire » , fut d’une cruauté et d’une violence sans pareilles, faite d’exécutions, de destructions et de déportations. A travers des dialogues incisifs et percutants, ils révèlent avec talent les paradoxes d’une époque qui « n’accordait pas de liberté aux ennemis de la liberté » . A ce titre, elle en annonçait d’autres, un siècle et demi plus tard.