LA CHRONIQUE de François d’Orcival
En Allemagne, en Espagne ou en France, le discours des leaders de l’extrême gauche se focalise contre l’Europe et l’immigration.
L’extrême droite allemande ne peut pas être la seule à occuper la rue… La réplique est venue cette semaine de Berlin : « Nous voulons reconquérir la rue, internet, et secouer la politique », proclame un nouveau mouvement, Aufstehen (Debout).
Signe particulier, celui-ci se lève dans les rangs les plus à gauche de la politique allemande, au coeur de Die Linke et des Grünen. Il vient de l’Est. Sa porte-parole, Sahra Wagenknecht, est née à Iéna (Thuringe, ex-RDA) ; ce n’est pas une tendre : elle a adhéré au parti unique qui gouvernait la RDA l’année même (1989) de l’effondrement du régime. Avec Oskar Lafontaine, qu’elle a épousé, le fondateur de Die Linke (après sa rupture avec les sociaux-démocrates du SPD), ils s’en prennent à la gauche « petitebourgeoise, bien-pensante, libérale et pro-européenne », qui a abandonné aux populistes de l’AfD (Alternative pour l’Allemagne) les voix populaires qu’il faut retrouver (Au Bundestag, l’AfD a 94 députés,
Die Linke, 69, les Grünen, 67). Mais comment ? En dénonçant le racisme et l’extrémisme ? Ça n’a pas marché, alors ils attaquent la droite identitaire sur son terrain : immigration, islamisme, souverainisme. A l’origine de ce virage, un auteur dramatique, Bernd Stegemann, qui a étudié la « dramaturgie du populisme » et a été le premier à dénoncer cette « classe bourgeoise bien intentionnée »,
aveugle devant une immigration qui retire aux travailleurs allemands leur pain de la bouche, un intégrisme islamiste qui barre la voie à l’intégration, des traités européens qui nous offrent à l’hégémonie américaine… Cette ligne-là est celle de Tsipras en Grèce, de Podemos en Espagne
– et, clairement, de Jean-Luc Mélenchon en France… Son discours du 25 août à Marseille portait tous les accents du souverainisme anti-Merkel, accusant sa politique immigrationniste de « faire baisser les salaires », condamnant ceux qui « veulent faire l’Europe en défaisant la France », s’affirmant
« inter-nationaliste »
(en soulignant le trait d’union), « partisan d’une politique entre nations ».
Et rappelant que, s’il respectait toutes les religions, c’était
« à condition que la religion ne s’occupe pas de politique – quelle que soit la religion »,
quand on sait que la seule à ne pas faire la différence, c’est l’islam… L’irruption de ce populisme de gauche illustre bien le volcan sur lequel danse l’Europe.