Le Figaro Magazine

ALEXIS JENNI POÈTE DE LA VIE SAUVAGE

L’auteur du prix Goncourt 2011 brosse un beau portrait de John Muir, vagabond inspiré qui se fit, bien avant les écologiste­s, le chantre et le défenseur de la nature.

- LES RENDEZ-VOUS DE J-R VAN DER PLAETSEN

Il fait partie des très rares personnes en France à pouvoir vivre de leur plume – on parle ici des écrivains, non des fabricants de best-sellers. À 56 ans, Alexis Jenni, ancien prof de sciences naturelles, peut mener depuis quelques années l’existence dont il rêvait. Il a quitté Lyon, où il enseignait, pour s’installer dans la région parisienne, où il écrit comme bon lui semble. Une liberté acquise par la grâce d’un prix Goncourt, obtenu pour son premier roman, L’Art français de la guerre, qui avait fait sensation en 2011.

Le choix très éclectique de ses sujets (il est l’auteur de romans, d’essais, de livres pour enfants, d’ouvrages de spirituali­té, et même d’un guide de cuisine) donne un aperçu de l’indépendan­ce d’esprit d’Alexis Jenni. De fait, c’est sans doute le désir de liberté qui caractéris­e son oeuvre, comme l’atteste J’aurais pu devenir millionnai­re, j’ai choisi d’être vagabond. Sous ce titre, qui évoque autant un programme de La France

J’AURAIS PU DEVENIR MILLIONNAI­RE, J’AI CHOISI D’ÊTRE VAGABOND, d’Alexis Jenni, Paulsen, 225 p., 21 €.

La phrase du livre à retenir (p. 212)

“En ce presbytéri­en nourri

d’emphase biblique, il y a un animiste jubilant qui perçoit l’esprit en tout”

insoumise que les romans de Knut Hamsun, se dissimule une biographie de John Muir, l’une des figures de la légende de l’Ouest américain, souvent considéré comme un précurseur de l’écologie. D’origine écossaise, Muir vécut en Californie, dans la sierra Nevada, à l’époque où celle-ci était encore une terre vierge. À l’origine de la création du Parc national de Yosemite, il est aussi l’auteur d’une flopée de livres exaltant les grands espaces sauvages. La nature qu’il décrit est un paradis perdu, qui aurait enchanté Walt Whitman ou Jim Harrison. « La vision que Muir porte sur le monde est issue de sa lecture de la Bible, dit l’auteur. À ses yeux, la nature est la création de Dieu et il convient de la respecter. » Jenni écrit une langue admirable, avec un souffle épique dans lequel on discerne une recherche spirituell­e. Son portrait de Muir figurera désormais dans la galaxie des vagabonds célestes, aux côtés des héros de Mark Twain, Fenimore Cooper ou Knut Hamsun.

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