LA COURSE AUX ÉTOILES
Toujours plus séduisants, toujours plus élégants, toujours plus high-tech et toujours plus vertueux en matière environnementale… Les grandes compagnies maritimes rivalisent d’ingéniosité dans la conception de leurs futurs navires et l’offre de prestations d’exception. Tour d’horizon des nouveautés annoncées en 2020-2021.
Si la forte croissance du marché de la croisière ne se dément pas, loin de se reposer sur leurs lauriers, les armateurs et les compagnies maritimes déploient des trésors d’imagination pour répondre aux exigences d’une clientèle en quête d’expériences inédites, de nouveaux horizons et de confort toujours plus ajusté. Un message reçu cinq sur cinq par la compagnie norvégienne Hurtigruten, célèbre, entre autres, pour ses croisières le long des magnifiques fjords de Norvège à bord de l’Express Côtier. Avec le lancement des deux sister-ships (navires de conception identique) MS Roald Amundsen en 2019 et MS Fridtjof Nansen en mars 2020, la compagnie mise sur les croisières d’exploration dans les zones polaires, un segment en plein essor, dans lequel son savoir-faire est reconnu.
« Ces deux bateaux ont spécifiquement été conçus pour l’Arctique et l’Antarctique », souligne Christine Bois, la directrice générale de Hurtigruten en France. Leurs points forts : une capacité intermédiaire (500 passagers), de grandes cabines, toutes extérieures (dont la moitié sont équipées d’un balcon privatif), un centre ludo-éducatif immersif incluant des équipements de pointe et, cerise sur le gâteau, un (très) grand écran, qui s’étend sur sept ponts et 17,5 mètres de haut. L’autre innovation majeure touche à l’écologie. « Le respect de la nature a toujours été au coeur de nos préoccupations, et nous intégrons au fur et à mesure les nouvelles technologies. Ainsi, le MS Roald Amundsen et le MS Fridtjof Nansen sont nos deux premiers navires hybrides. Grâce à un nouveau système de propulsion électrique, leur consommation de carburant est réduite d’environ 20 %. Et à l’horizon 2021, l’intégralité de notre flotte sera rénovée », ajoute Christine Bois. Le MS Fridtjof Nansen sillonnera l’Antarctique, le Groenland, l’Islande et la Norvège, des destinations très en vogue, avec une particularité : « À compter de cette année, nous proposons des croisières plus courtes sur l’Antarctique, à partir de douze jours, pour nous adapter à la demande d’une partie de notre clientèle, encore en activité, qui n’a pas la possibilité de prendre trois à quatre semaines de congés d’affilée », conclut la directrice de Hurtigruten en France. Chez Ponant, leader mondial de l’expédition polaire et incarnation de l’art de vivre à la française, on s’inscrit dans la continuité. La compagnie développe sa flotte Ponant Explorers, composée de yachts d’expédition avec, en 2020, la réception de deux nouvelles unités, Le Bellot et Le Jacques Cartier, qui proposeront des itinéraires pointus, essentiellement en Australie/Nouvelle-Zélande et, grande nouveauté, dans le secteur des Seychelles, de la Tanzanie et des Maldives. De taille restreinte pour faciliter l’approche de zones très reculées, ils comprennent 92 suites extérieures, avec balcon privatif. On retrouve les fondamentaux qui ont fait le succès de
Ponant : décoration épurée, confort intimiste, équipements de pointe, présence à bord de naturalistes et valorisation de la gastronomie. « Côté innovation, ces navires disposent d’une marina qui se déploie à hauteur d’eau. Les passagers débarquent ainsi pieds au sec. Elle sert aussi de scène pour des représentations culturelles ouvertes sur la mer, par exemple un opéra », déclare Hervé Bellaïche, directeur général adjoint. Autre prouesse technologique unique au monde, le Blue Eye, un salon multisensoriel situé sous la ligne de flottaison, conçu par l’architecte Jacques Rougerie, pour s’imprégner au plus près de l’univers sousmarin. Ponant renforce également la dimension art de vivre en nouant des partenariats avec Relais & Châteaux (des chefs étoilés seront présents sur certaines croisières) et le Musée du Louvre. 2020 signe aussi le passage sous l’enseigne Ponant du célèbre paquebot Paul Gauguin en Polynésie avec, en prévision, le réaménagement de certaines cabines et une décoration revue et corrigée. Sur le plan écologique, la flotte Ponant est en pointe, autant pour la motorisation (élimination de la quasi-totalité des particules émises) que pour le traitement des déchets et le recyclage de l’eau. Et en 2021 ? Levons le voile : Le Commandant Charcot entrera en service. Imaginez un navire de haute exploration polaire, propulsé au GNL (gaz naturel liquéfié), destiné à des expéditions dans des zones encore vierges, comme la mer de Ross ou le pôle Nord géographique. 2021 s’annonce manifestement comme un grand millésime, puisqu’une compagnie concurrente, la canadienne Quark, spécialiste reconnue des destinations polaires depuis vingthuit ans, entend se développer sur le marché francophone en lançant l’Ultramarine à l’été. Un bateau conçu exclusivement
DE LA MOTORISATION
AU TRAITEMENT DES DÉCHETS : PRIORITÉ
À L’ENVIRONNEMENT
pour les safaris polaires dans des zones jusque-là très peu accessibles. Agrémenté de la certification Polar Class 1, la plus complète en la matière, le navire embarquera 200 passagers et des scientifiques et disposera de 20 zodiacs et de deux hélicoptères. Un riche programme d’activités hors normes (kayak, montgolfière, bivouac, etc.) sera proposé. Le petit plus : le navire, conçu par des experts de terrain, est doté d’une salle de préparation attenante au hangar à zodiacs, dans laquelle les passagers pourront s’équiper avant chaque excursion et laisser leur matériel au retour, comme dans une « ski room ». Toujours dans le domaine des croisières d’expédition, la compagnie Silversea recevra le très luxueux Silver Origin à l’été 2020. Dédié uniquement aux Galápagos, ce navire hybride, intimiste (50 suites, toutes avec majordome attitré), aura pour thématique l’approche naturaliste, grâce à des experts animaliers qui accompagneront les passagers dans leurs découvertes. Priorité au respect de l’environnement grâce à la technologie du positionnement dynamique (pour éviter l’utilisation des ancres) et à un système de purification d’eau douce et de traitement des eaux usées très performant.
Face à un tel assaut de nouveautés, la compagnie Regent Seven Seas Cruises, appréciée pour ses prestations ultraluxueuses, ne pouvait rester immobile. Elle mise sur le Seven Seas Splendor, qui sera lancé ce mois-ci, pour fidéliser sa clientèle et conquérir de nouveaux marchés. Ni trop grand ni trop petit (375 suites, 750 passagers), le bateau occupe un créneau original, intermédiaire entre la croisière d’expédition et le style paquebot. Ses qualités ? « On retrouve l’esprit Regent : pas d’effet de masse, la formule tout inclus, y compris les excursions,
une cuisine de haute volée, une immersion dans les destinations desservies et la mise en avant de la thématique du bien-être », souligne Fabienne Baudrier chez Un Océan de Croisières. En prime, une dimension arty, avec 2 500 oeuvres d’art qui rehaussent la décoration intérieure. Et un commandemant féminin – une première chez Regent.
Les approches plus classiques de la croisière, à bord de très grands navires, sont elles aussi en plein essor. Familles, couples, amis, jeunes et moins jeunes, nombreux sont les adeptes des paquebots à grande échelle, sur lesquels un vaste éventail d’activités et de divertissements est disponible. Un autre vécu, une autre expérience en mer. C’est l’ADN de l’armateur Royal Caribbean, spécialisé dans les bateaux de très grande capacité, conçus comme des destinations à part entière. Les premiers voyages en mer de l’Odyssey of the Seas (près de 5 000 passagers) se dérouleront en novembre. Il s’agit du deuxième navire de la classe Quantum Ultra, synonyme d’aménagements inédits et d’attractions révolutionnaires, high-tech et interactives. Quelques pépites : le SeaPlex (vaste espace récréatif, avec patinoire et piste pour autos tamponneuses), le Sky Pad (trampoline avec casques de réalité virtuelle) et le Royal Theater, doté d’écrans pour vivre un spectacle immersif. Sans compter une piscine sur deux étages et un simulateur de surf ! Ce géant des mers effectuera des croisières au départ de Fort Lauderdale (Floride) avant d’être positionné en Méditerranée orientale. Clientèle visée : les familles et les jeunes adultes.
Elle aussi dans le giron du groupe Royal Caribbean, la compagnie Celebrity Cruises, orientée vers le haut de gamme, lance le Celebrity Apex en mars. Ce navire long de 306 mètres pourra accueillir jusqu’à 3 000 passagers. C’est le deuxième de la série Edge, qui se démarque des autres par son design futuriste et des propositions culinaires d’exception dans les 29 restaurants (avec menus étoilés). Comme son jumeau le Celebrity Edge,
qui a pris la mer en 2019, il possède le Magic Carpet, un espace mobile se déplaçant sur toute la hauteur du navire pour former une extension de la piscine, d’un restaurant, d’un bar ou d’une plate-forme de débarquement. À noter : l’actrice Gwyneth Paltrow, égérie du bien-être, sera à bord de l’Apex, du26aoûtau2septembre,pourune croisière au départ de Barcelone. Quant à la compagnie MSC Croisières, elle ne cache pas ses ambitions. En témoigne, l’annonce le mois dernier de la signature d’un contrat de commande d’au moins 2 milliards d’euros auprès des Chantiers de l’Atlantique. Après avoir réceptionné en grande pompe le MSC Grandiosa en octobre 2019, elle accueillera un nouveau fleuron de la classe Meraviglia (des navires de nouvelle génération) en octobre 2020. Son nom ? MSC Virtuosa,
un mastodonte de près de 2 500 cabines, lui aussi issu des chantiers navals de Saint-Nazaire, source de fierté pour la compagnie, attachée au made in France. Une véritable ville flottante, avec un sens assumé du « big is beautiful ». Les atouts ? Selon Patrick Pourbaix, directeur général France, Belgique et Luxembourg, « le MSC Virtuosa rassemble les composantes de l’art de vivre européen, dans un univers à la fois chic et sobre. Pour les clients les plus exigeants, des espaces privatisés ont été créés dans le Yacht Club, l’équivalent d’un bateau dans le bateau. »
Avec 12 restaurants, 20 bars et deux salles de spectacle, dont une qui prêtera son cadre aux productions exclusives du Cirque du Soleil, aucun risque de s’ennuyer pendant la
SIMULATEUR DE SURF, PATINOIRE… QUAND LE BATEAU DEVIENT
“LA” DESTINATION
semaine de croisière (au départ de Marseille). Comme son aîné, le MSC Grandiosa, le MSC Virtuosa se veut la vitrine des engagements environnementaux du groupe. « Nous sommes très bons élèves ! » se félicite Patrick Pourbaix, exemples à l’appui : les déchets sont détruits ou compressés à bord, un système de réduction catalytique sélective réduit les émissions d’oxydes d’azote de 85 %, l’eau potable est produite à bord grâce à une centrale de désalinisation, les plastiques jetables sont bannis, un programme d’excursions appelé Protectours, axé sur la sensibilisation à l’environnement et la participation des passagers, a été mis en place. Et dès 2022, le GNL remplacera le bon vieux fioul.
En juin 2020, ce sera au tour de Princess Cruises d’entrer en scène avec l’Enchanted Princess, un colosse de 330 mètres de long et d’une capacité de 3 660 passagers. Cinquième navire de la classe Royal, il défie tous les superlatifs : 1 539 cabines et suites réparties en 38 catégories. Les happy few occupant les Sky Suites bénéficieront d’un panorama à 270°. Après une saison inaugurale en Méditerranée, il mettra le cap vers les Caraïbes.
Pour le français CroisiEurope, le spécialiste de la croisière fluviale, 2020 marque un tournant. La compagnie renforce sa présence en mer en lançant le MV La Belle des Océans. Certes, ce navire a 20 ans, mais il a été rénové, tout en conservant le cachet vintage de sa conception d’origine. En saison estivale, ce bateau de 62 suites effectuera un périple exceptionnel entre Montréal et Saint-Pierre-et-Miquelon, via le fleuve SaintLaurent, la baie de Tadoussac et les îles de la Madeleine. À l’abordage ! ■
“LA BELLE DES OCÉANS” CONSERVERA SON CACHET VINTAGE