POUR VIVRE HEUREUX VIVONS IDIOTS
C’est un ouvrage vertueux que signe Paul Vacca : il rendra modestes ceux qui se pensent intelligents, et comblera les idiots. Les Vertus de la bêtise (Éditions de l’Observatoire, 125 p., 12 €) part d’un constat simple : l’intelligence n’est pas le Graal, surtout depuis qu’elle se met à devenir artificielle. Pourquoi tout le monde est-il obsédé par son QI, pourquoi prêtons-nous aux big data des vertus qu’elles n’ont pas ?
« La meilleure façon de se rebeller contre l’intelligence artificielle, c’est encore de faire un bon usage de notre bêtise naturelle », affirme tranquillement l’essayiste. Après tout, l’expression « imbécile heureux » n’a pas été inventée pour rien.
Il liste astucieusement ce qu’il nomme les « sept piliers de la bêtise » soit, dans l’ordre, « Le sommeil de l’intelligence (ou les bienfaits de la sérendipité) », « Jouer au plus con avec l’algorithme »,
« Se libérer de l’intelligence », « L’efficacité des questions bêtes (éloge de Columbo) », « La bêtise comme ciment social »
– une arme imparable car plus les hommes se réunissent, plus ils deviennent idiots –, « Apprendre à désapprendre : le chemin enchanté des écoles buissonnières », et enfin,
« La bêtise, la face cachée du génie humain ». Un monde sans bêtise, dit Vacca, serait désolant, car « Bouvard et Pécuchet, par exemple, n’aurait plus lieu d’être dans la bibliographie de Flaubert. Emma Bovary prendrait désormais la forme d’une comédie romantique puisque l’héroïne éponyme ne rencontrerait pas cet idiot bâté de Charles, ni Rodolphe, ce sombre fat, mais Maximilien, un être d’une intelligence exquise, et ils couleraient des jours heureux. » Quelle horreur… Il oublie de mentionner que dans un monde pareil, Paul Préboist et Jean Lefebvre n’auraient jamais décroché le moindre rôle, et que
Joël Séria aurait versé dans le drame social…
Paul Vacca ne précise pas s’il est lui-même intelligent ou stupide, mais une chose est sûre : son livre est un bon moyen de mourir idiot.