UNE FANTAISIE AMÉRICAINE
★★★ French Exit, de Patrick deWitt, Actes Sud, 265 p., 22 €. Traduit de l’anglais (Canada) par Emmanuelle et Philippe Aronson.
C’est une veuve d’un certain âge, habitant l’Upper West Side avec son fils Malcolm, une chiffe molle indécise de
32 ans. Frances Price, snob et atrabilaire, ferait passer la Maggie Smith de Downton Abbey pour un parangon de gentillesse et d’empathie (« La soirée s’annonçait tout en insultes déguisées et en insinuations répétées ; elle avait hâte d’y être »). Son ancien mari, un avocat sans scrupules, lui a laissé une fortune considérable, mais celle-ci s’est évaporée. Elle récupère en cash ce qu’elle peut – 170 000 euros –, puis s’exile à Paris avec son fils sur l’île Saint-Louis, où une amie lui a prêté un petit appartement. Dans les valises, il y a un chat cacique, surnommé Small Frank, endormi avec du Valium écrasé dans sa pâtée durant la traversée transatlantique. Frances est persuadée qu’il s’agit de la réincarnation de son défunt époux, Franklin Price, dont elle déteste le souvenir. Mais le chat s’échappe, au grand dam de la veuve qui souhaitait lui tordre le cou. Surgiront alors chaque soir dans l’appartement une vieille folle extravagante, un médecin et son caviste attitré, un détective privé mutique chargé de retrouver une voyante qui devra communiquer avec le chat, lequel se met à lui parler durant une séance de spiritisme lunaire. On avait repéré le Canadien Patrick deWitt en 2012 avec l’extraordinaire
Les Frères Sisters,
western désopilant et baroque adapté à l’écran par Jacques Audiard, puis avec un roman néogothique très farfelu,
Heurs et Malheurs du sousmajordome Minor (également adapté au cinéma – avec Michelle Pfeiffer –, mais repoussé pour cause de Covid). Avec French Exit,
il ouvre les vannes et semble atteint de bouffées délirantes. Sérieux, s’abstenir.