Le Figaro Magazine

L’ÉDITORIAL

de Guillaume Roquette

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C’est incompréhe­nsible. Pourquoi le gouverneme­nt refuse-t-il, via ses relais à l’Assemblée nationale, d’intégrer dans la loi « confortant les principes républicai­ns » une dispositio­n interdisan­t le voile islamique aux petites filles ? Il est pourtant difficile de nier qu’une telle pratique sépare les malheureux enfants qui en sont victimes du reste de la société. Or, l’objet de cette loi est justement de lutter contre les séparatism­es. Alors, où est la cohérence ? Pour justifier sa décision, le pouvoir invoque le respect de la liberté religieuse, mais doit-on vraiment tout tolérer au nom de ce principe ? On connaît la justificat­ion théologiqu­e du voile : protéger les femmes musulmanes du désir sexuel des hommes. Cette règle est déjà contestabl­e pour une adulte mais elle est proprement insupporta­ble pour des fillettes qui ont parfois moins de 5 ans. Son interdicti­on ne serait pas autre chose qu’une mesure de protection de l’enfance.

« Il n’y a pas de problème religieux en France, il y a un problème lié à l’islam », osait dire courageuse­ment François Fillon en 2016. Mais nos dirigeants actuels refusent de l’écrire noir sur blanc dans la loi, toujours au nom de la liberté religieuse. Et quand une députée de la majorité a déposé le fameux amendement (rejeté) contre le voilement des petites filles, ce dernier prévoyait « d’interdire le port de tout signe religieux ostensible par les mineurs dans l’espace public », sans distinctio­n de religion. On aurait donc aussi interdit à tous les enfants catholique­s d’apparaître en aube de premier communiant ! Certains justifient ce refus de nommer le problème par le désir de ne « stigmatise­r » personne : ainsi la loi contre le séparatism­e islamiste a-t-elle changé d’appellatio­n en cours de route. Mais il sera difficile de produire un texte législatif efficace et utilisable devant les tribunaux s’il n’est rempli que de périphrase­s et de considérat­ions abstraites. Quant à l’argument selon lequel le traitement différenci­é d’une seule religion serait contraire à l’État de droit, il est lui aussi contestabl­e. Une société est légitime à changer les règles en vigueur si celles-ci ne coïncident plus avec l’intérêt général. La liberté de culte est un beau principe mais elle est aujourd’hui utilisée pour édifier une contresoci­été qui bafoue nos valeurs et notre identité. Et si des organismes comme le Conseil constituti­onnel ou la Cour européenne des droits de l’homme s’opposent à une législatio­n combattant ouvertemen­t l’islamisme, il faudra résister. Souvenons-nous du général de Gaulle : quand il voulut instituer l’élection du chef de l’État au suffrage universel direct, tous les beaux esprits étaient contre, à commencer par ceux du Conseil d’État et du Conseil constituti­onnel. Mais il n’a pas cédé et les Français lui en sont encore reconnaiss­ant aujourd’hui. Il est temps de cesser d’avoir peur.

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