À L’AFFICHE Culturellement vôtre,
La nouvelle ambitieuse série de Canal+ a pour décor la France de l’affaire Dreyfus et de « Fort Chabrol ». Spectaculaire.
La Belle Époque a la cote : grâce à la série Netflix Lupin, les romans de Maurice Leblanc s’arrachent en librairie et le biopic sur Gustave Eiffel avec Romain Duris sera un des événements cinématographiques en 2021.
Paris Police 1900, la nouvelle et ambitieuse série estampillée Canal+, restitue elle aussi cette période clé de notre Histoire par le truchement d’une plongée vertigineuse chez les condés de la IIIe République. Comme dans J’accuse de Polanski, ce n’est pas l’aspect le plus reluisant de ces temps retrouvés qui est ici mis en avant : corruption, violence, antisémitisme, misogynie… Si l’historien israélien Zeev Sternhell était encore de ce monde, il aurait jubilé en retrouvant au fil des huit épisodes des images spectaculaires d’un « protofascisme » français : meetings de Drumont et des frères Guérin appelant à égorger les Juifs, presse populaire dénonçant le complot judéo-maçonnique et le gouvernement dreyfusard, violences de rue, actes de sédition, etc. Mais une fiction (qui a droit aux anachronismes) ne fait pas l’Histoire ; or, tout cela, très appuyé, prend parfois le dessus sur le reste. C’est dommage pour mille raisons. L’intrigue policière est palpitante : des corps de femmes retrouvés découpés dans des valises qui conduisent la police à enquêter chez les bouchers de la Villette, (gros) bras armés des ligues nationalistes. La mise en scène est très soignée, avec des clins d’oeil à Visconti pour les salons de courtisanes, à l’expressionnisme allemand pour les ambiances nocturnes brumeuses, et même à…
Gangs of New York. Le décor est réaliste à souhait : pavés, réverbères et calèches en veux-tu en voilà. Les personnages (flics ou voyous, « réels » comme Bertillon ou imaginaires) sont, à quelques exceptions caricaturales près, remarquablement écrits (bravo Fabien Nury). Quant aux comédiens, ils sont la clé de la réussite visuelle et scénaristique de la série. Canal+ a eu la bonne idée de choisir des acteurs peu connus : on ne cherche donc pas la star derrière le rôle. Pas d’Omar Sy ici… * À partir du 8 février, 21 h.