LES RENDEZ-VOUS
Les plaisirs de la table sont l’une des raisons de vivre de cet écrivain fantasque. Lorsqu’il n’écrit pas, il festoie, savoure, déguste. Et il boit. Puis il en parle – et très bien.
“Si la gourmandise
est universelle, le goût est singulier”
On le sait, Nicolas d’Estienne d’Orves aime la vie en couleurs, de préférence vives. Ce jour-là, il portait une veste à col châle gris anthracite, une chemise à larges carreaux bleu marine, un pantalon de toile rouge vermillon et des souliers d’intérieur orange. Le style NEO, en somme. On sait moins qu’il est une des plus fines bouches qui soit – il sépare d’ailleurs l’humanité en deux clans : ceux qui « ont de la gueule » (qui aiment les plaisirs de la table) et ceux qui n’en ont pas.
On ne s’étonnera pas que NEO (le surnom, tiré de ses initiales, que lui ont donné ses amis) soit devenu membre du Club des Cent (le saint des saints de la gastronomie) à l’âge où d’autres sortent à peine de l’adolescence : notre homme aime les abats, le pâté de tête et les viandes faisandées, les fromages de hussards, les apéritifs anciens et… les bonbons Haribo, qui sont un peu ses madeleines proustiennes. Comme digestif, il ne boit que de l’armagnac, du calva ou de la chartreuse. On voit par là que NEO est un homme de principes.
C’est de son père, autre personnage flamboyant, que d’Estienne d’Orves tient son goût sans modération de la table – et de ce qui l’accompagne souvent : l’amitié. Il s’efforce donc de transmettre à ses fils de 9 et 11 ans le même héritage, au cours de repas homériques qui tournent vite au « têteà-tête de veau », comme il le raconte dans son dernier livre, formidable éloge de la bidoche, des vins cathares et des sablés à la confiture. Le cri de ralliement de la famille : « Sus à la
tripe ! » Végans s’abstenir…
À la façon des romanciers du XIXe siècle, NEO écrit sans cesse.
« Après vingt ans de journalisme, j’ai fini par croire que c’est la commande qui fait le talent, dit-il. Et, bien qu’étant l’auteur de trente livres, je n’arrive toujours pas à me considérer comme un écrivain. » Que NEO se rassure : il en est un. Et haut en couleur.