LE RENOUVEAU DES RÉSIDENCES SECONDAIRES
On vous dit confinement et couvre-feu ? Vous pensez plutôt verdure, espace et liberté. Alors pourquoi ne pas investir dans une résidence secondaire ?
Un sondage publié par le réseau Orpi en juillet 2020 révélait que 25 % des Français envisageaient l’achat d’une résidence secondaire. L’été dernier, les agences immobilières ont été prises d’assaut par des candidats acquéreurs, aux projets parfois chimériques. «Il y a eu un afflux de demandes après le premier confinement, témoigne Olivier de ChabotTramecourt, directeur général du Groupe Mercure, spécialisé dans l’immobilier de prestige. Mais il s’agissait parfois de projets un peu épidermiques qui n’ont pas résisté à la réalité de la campagne, notamment en termes de prix. Les acheteurs qui nous contactent aujourd’hui sont plus matures. » Maturesmaisjeunes:28%desacquéreurs potentiels ont moins de 39 ans et 11 % moins de 30 ans. «L’achat d’une résidence secondaire n’est plus, comme auparavant, un signe de réussite passé la quarantaine. Il répond à une volonté de quitter un environnement urbain pour s’offrir un moment d’oxygèneauvert »,constateChristineFumagalli, présidente d’Orpi. Certains, d’ailleurs, n’hésitent pas à privilégier leur habitat secondaire aux dépens du principal. Tel ce couple de Parisiens qui a vendu son120m²duquartierSaint-Paulaucoeur du Marais pour réinvestir le montant de la vente dans un petit (50 m²) pied-à-terre dans le même quartier et une maison de campagne à une heure de Paris.
Une résidence de moins en moins secondaire
Cet exemple est révélateur d’une nouvelle tendance : l’avènement de la résidence hybride, à la fois principale et secondaire. Un changement de paradigme lié aux confinements successifs. Selon un récent sondage réalisé par le réseau d’immobilier de luxe Barnes, 43 % des personnes interrogées avaient l’intention de réorganiser leur vie professionnelle et familiale. «Pour 89 % d’entre eux, cette réorganisation devrait passer par un accroissement du temps passé chaque année dans leur résidence secondaire et 72 % la transformeraient volontiers en résidence semi-principale », explique Thibault de Saint Vincent, président de Barnes.La notion de refuge est par ailleurs plébiscitée. Peu de nos clients envisagent un nouveau confinement sans pouvoir être réunis en famille. » Les professionnels notent d’ailleurs un engouement croissant pour les propriétés disposant de dépendances susceptibles d’accueillir famille et amis. Destinée à être utilisée régulièrement, la résidencesecondairedoitêtreprochedela principale, au maximum à deux heures de voiture ou de train. Un Parisien amoureux de la vallée de Chevreuse, au sud des Yvelines, a même voulu une propriété accessible en RER !
Les vieilles pierres ont la cote
En quête d’authenticité et de charme, les acheteurs privilégient les bâtisses anciennes ou, du moins, révélatrices de l’architecture locale : colombage, briques et toit de chaume en Normandie, longère en tuffeau dans le Val de Loire… Sur la Côte basque, prisée de la clientèle bordelaise, les immenses villas néobasques (entre 500 et 700 m²) des années 1920 des architectes Henri Godbarge ou André Pavlovsky sont très recherchées. «Exemptes de défauts, au calme, sur un grand terrain et avec une vue, elles peuvent dépasser les 5 millions d’euros », souligne un agent immobilier local. Proximité de leur résidence principale et architecture de caractère ne sont pas les seuls critères des urbains en quête de chlorophylle. «On n’achète plus la même résidence secondaire que nos parents ou nos grands-parents. Aujourd’hui, les acheteurs veulent du “prêt à habiter”, si possible avec des prestations haut de gamme », constate Alexander Kraft, président de Sotheby’s International Realty France. La maison doit être vaste (au moins 200 m² habitables) mais pas trop (au-delà de 600 m², l’entretien devient compliqué) et disposer de 3 ou 4 chambres en suite, c’est-à-dire chacune dotée de sa propre salle de bains. Les dépendances transformées en maison d’amis ou en espace détente (salle de massage, sauna, hammam…) comme la présence d’une piscine, voire d’un tennis sont aussi appréciées.
Dernière exigence, peut-être la plus difficile à satisfaire, les néo-acheteurs veulent être au calme, avoir un grand jardin et être à proximité d’un bourg pour pouvoir faire les courses à pied. Le mouton à cinq pattes en quelque sorte !
Le prix du rêve
Dans un rayon de 150 à 200 km autour de la capitale, il y a des résidences secondaires pour tous les budgets. Dans le Perche, à partir de 150 000 €, vous trouvez une maison de 90 m² habitables sur 1 hectare de terrain en pleine campagne. Avec le double, il est possible de dénicher un grand corps de ferme à rafraîchir au milieu d’une parcelle de 6 000 m². Au coeur de la campagne normande, des chaumières de 200 m² sur 2 hectares de parc avec piscine se négocient de 400 000 et 500 000 €.
À partir de 1 million d’euros, vous pouvez devenir châtelain en investissant dans un manoir niché dans la verdure. Quant aux passionnés d’équitation, ils devront débourser entre 3 et 4 millions d’euros pour s’offrir une vaste propriété avec quelques boxes sur 10 à 15 hectares de prés et de terre, à proximité de Deauville.
Une fois le bien acheté, reste à l’entretenir. «Entre les impôts locaux, le jardinier, quelques heures de femme de ménage par semaine, le maintien hors gel de l’habitation, le chauffage de la piscine et les travaux courants, il faut compter au minimum, entre 10 000 à 15 000 € par an, témoigne Cyril Maupas, directeur de l’agence Sotheby’s International Realty de Deauville. Mais cela varie suivant les spécificités des propriétés. Par exemple, un jardin édouarien avec des chambres de verdure nécessite un jardinier à plein temps. » Pour David Mercier, directeur de Daniel Féau châteaux, il faut être concret. «Pour éviter les mauvaises surprises, nous informons les acquéreurs des éventuels travaux à prévoir : chaudière ou cuve à fioul vétustes, assainissement non conforme ou encore toiture mal entretenue. Nous leur communiquons aussi un budget prévisionnel pour l’entretien courant. » Même si c’est rare, certains propriétaires envisagent de louer leur maison ou au moins ses dépendances pour amortir les frais. «Une maison de 3 chambres à Deauville se loue environ 300 € la nuit », explique Jonas Wiesel, cofondateur de l’agence RealAdvisor. Vous pouvez mettre votre bien en location via des plates-formes de locations saisonnières en ligne (Abritel, Airbnb…) ou passer par un professionnel. Cette dernière solution amputera vos loyers de 20 à 25 % mais vous déchargera des soucis de gestion, comme l’état des lieux, l’accueil des vacanciers, le ménage et la blanchisserie.
Une structure juridique adéquate
Vous pouvez acheter votre résidence secondaire en direct. Si vous êtes en couple, son statut (indivision, bien propre ou commun) va dépendre de votre régime matrimonial et des fonds propres apportés par chacun de vous. Vous pouvez aussi choisir de faire acquérir le bien par une société. Ce qui vous permet, entre autres, de donner successivement les parts pour optimiser les abattements sur les droits de donation (100 000 € tous les 15 ans entre parent et enfant) et de transmettre tout en gardant la main sur votre patrimoine grâce à des statuts judicieusement rédigés. La formule la plus courante est celle de la société civile immobilière (SCI) imposée à l’IR (impôt sur le revenu). Attention, cette solution n’est pas viable si vous envisagez, même quelques semaines par an, la location saisonnière. Dans ce cas, il vous faudra opter pour une SCI à l’IS (impôt sur les sociétés) ou mieux encore, si vous achetez en famille, pour une SARL de famille à l’IR. «Avec cette formule, vous pouvez déduire tous les frais des loyers et amortir le bien comme avec une SCI à l’IS. Mais vous bénéficiez de la fiscalité des particuliers en matière de plus-value de cession, bien plus avantageuse que celle applicable aux cessions réalisées par une SCI à l’IS », prévient Bertrand Rollin, notaire à Reims et membre du Groupe Monassier. ■