ASSURANCE-VIE Des solutions originales pour diversifier son épargne,
Un brin ringarde l’assurance-vie ? Détrompez-vous, car les assureurs multiplient les initiatives pour proposer aux épargnants de nouveaux supports, parfois très novateurs, afin d’aider à diversifier son patrimoine.
Un fonds en euros à capital garanti mais au rendement modeste (+1,20 % en moyenne en 2020) et des fonds investis en actions ou en obligations, nécessairement risqués. Voici les traditionnels supports financiers de tout contrat d’assurance-vie. Mais l’univers des possibles est heureusement bien plus riche. « Actions en direct, produits structurés, actifs immobiliers, entreprises non cotées sont autant de classes d’actifs intéressantes, car complémentaires, relève Vincent Pelsez, banquier privé chez Natixis Wealth Management. Diversifier est d’autant plus pertinent que ces classes d’actifs ont leurs propres cycles et évoluent différemment au fil du temps. »
Cela tombe bien, les contrats d’assurance-vie ont largement étoffé leurs offres ces dernières années et proposent de multiples possibilités pour diversifier son épargne. À défaut d’être proposées dans les produits des banques de détail, ces solutions se retrouvent fréquemment parmi les contrats des courtiers internet, ceux des banques en ligne comme Boursorama ou Fortuneo, en banque privée et dans l’univers de la gestion de patrimoine. Attention cependant. « De nombreux marchés sont à des niveaux élevés, note Emmanuel Collineau, de Meezemaker, cofondateur de la société de conseil en patrimoine en ligne Grisbee. Il est préférable de faire des versements programmés pour lisser les points d’entrée. »
1 GESTION PILOTÉE Diversifier sans y penser
Vous n’avez pas le temps ou les connaissances pour piloter au mieux votre épargne et lui faire prendre le virage de la diversification, indispensable aujourd’hui pour espérer gagner de l’argent ? Optez pour la gestion pilotée ! Avec elle, vous n’aurez qu’à choisir un niveau de risque correspondant à votre tempérament et à votre horizon de placement, puis c’est un professionnel qui se chargera de répartir votre épargne sur différents supports du contrat et d’organiser les arbitrages lorsqu’il estime un changement de cap nécessaire. Longtemps réservée à une élite, cette gestion pilotée (également appelée gestion déléguée ou sous mandat) est aujourd’hui plus largement accessible,
y compris dans des contrats grand public vendus par des réseaux traditionnels. Elle figure systématiquement dans ceux qui sont vendus sur internet. Même si certaines sont trop récentes pour être jugées, les performances sont dans l’ensemble convaincantes et presque toujours bien supérieures à celle d’un fonds en euros garanti. « En majorité, les assurés choisissent des gestions équilibrées qui offrent un bon compromis entre préservation du capital à moyen terme et recherche de performance », constate Gilles Belloir, à la tête du courtier en ligne Placement-direct.fr. Ce service supplémentaire est parfois offert aux épargnants, qui ne supportent donc aucuns frais supplémentaires. Et lorsqu’il est facturé, le coût est en général limité, de l’ordre de 0,20 à 0,30 % par an, à ajouter aux frais de gestion. Pourquoi s’en priver ?
2 ETF De moindres coûts
Longtemps absents de l’assurance-vie, car jugés trop peu rentables pour les assureurs et les distributeurs, les ETF (Exchange Traded Funds, ou trackers) apparaissent dans de plus en plus de contrats. Ces fonds cotés en permanence répliquent l’évolution d’indices boursiers très variés, allant du CAC 40 au Nasdaq, en passant par d’innombrables déclinaisons géographiques (pays émergents, Japon…) ou sectorielles (santé, énergie, biens de consommation…). Il est même possible de combiner ETF et investissement socialement responsable. «Il existe une centaine de fonds responsables en Europe et leur nombre ne cesse de croître », observe Arnaud Gihan, responsable de l’activité iShares pour BlackRock. Les contrats les plus complets en proposent plus d’une centaine – pas tous responsables –, et nombre d’autres produits en renferment au moins une vingtaine.
Gros avantage de ces ETF : des coûts extrêmement faibles. Il faut en effet compter de 0,20 à 0,40 % de frais de gestion annuels internes, donc déduits de la performance, là où les fonds classiques à gestion active (pilotés par des gérants) facturent de 1,50 à 3 % par an. Autre atout indirect : rares étant les gérants à réussir à battre les grands indices internationaux, vous avez plus de chance d’obtenir une performance proche des indices à long terme. Pour compenser la faiblesse des frais, la plupart des assureurs facturent des frais supplémentaires lors de l’acquisition et de la vente de ces supports indiciels, à hauteur de 0,10 % du montant acheté ou vendu.
3 ACTIONS Le goût du risque
Avec la crise boursière qui a éclaté en même temps que la crise sanitaire, les épargnants français ont retrouvé le chemin de la Bourse en achetant des actions d’entreprises cotées. Si la plupart d’entre eux ont utilisé leur compte-titres ou leur PEA pour passer à l’action, d’autres ont choisi un chemin moins connu, celui de l’assurance-vie. «Plus de 20 % des versements réalisés dans notre contrat Bourse Direct Horizon sont investis directement en actions », témoigne Catherine Nini, directrice générale de Bourse Direct, dont la clientèle est familière des marchés financiers. De nombreux contrats en ligne vendus sur internet offrent ainsi une assez large palette d’actions éligibles, en général celles du SBF 120 (les 120 plus grosses capitalisations françaises) et les 50 mastodontes européens de l’Euro Stoxx 50. Certains vont encore plus loin, comme Patrimea, qui y ajoute de nombreuses actions de géants américains comme Alphabet, Coca-Cola, Facebook ou Pfizer. « Beaucoup d’assurés apprécient de pouvoir investir dans des actions de fonds de portefeuille au sein de leur assurance-vie », constate Stellane Cohen, présidente d’Altaprofits, un courtier précurseur dans ce domaine avec son contrat Titres@Vie. Si l’assurance-vie permet de bénéficier d’une fiscalité très avantageuse pour ces portefeuilles d’actions (notamment à la succession), elle reste d’un maniement particulier : les ordres sont obligatoirement passés à cours inconnu (c’est l’assureur qui achète et vend les titres en fin de séance) et des frais de transaction (de 0,30 à 0,60 %) s’ajoutent aux classiques frais du contrat.
4 IMMOBILIER La valeur refuge
L’assurance-vie représente un cadre avantageux pour y abriter des fonds investis en immobilier, puisqu’elle permet de faire échapper les gains aux lourds impôts fonciers. Ces fonds de « pierre-papier », plutôt rassurants dans un environnement incertain, figurent aussi parmi les plus plébiscités par les épargnants. Dans de nombreux contrats, il est ainsi possible d’investir dans des sociétés civiles de placement immobilier (SCPI) ou des organismes de placement collectif en immobilier (OPCI), des placements qui investissent dans des immeubles de bureaux, des commerces ou des entrepôts, loués à des entreprises et dont les loyers sont reversés sous forme de revenus.
Il existe néanmoins quelques fonds immobiliers qui jouent une carte originale et que vous ne pourrez pas trouver ailleurs que dans l’assurance-vie. C’est le cas des sociétés civiles, immobilières ou non, qui permettent d’investir dans des portefeuilles diversifiés, car investis à la fois dans des biens immobiliers physiques, mais aussi dans des fonds professionnels immobiliers, voire dans des actions de sociétés foncières ou dans des SCPI. « Notre société a vocation à investir dans le résidentiel, le secteur de la santé, la logistique et les locaux d’activité, mais aussi dans les bureaux et dans des fonds institutionnels », explique Gaëlla Hellegouarch, directrice générale de Theoreim, qui commercialise depuis quelques mois la SC Pythagore, qui a la particularité de ne pas prélever de frais d’entrée.
Certaines de ces sociétés civiles, très en vogue aujourd’hui, misent sur des secteurs particuliers : les SCI Silver Avenir ou ViaGénérations, par exemple, achètent des logements en viager, souvent de qualité et bien situés, qui ont la particularité de se revaloriser chaque année, au fur et à mesure que l’espérance de vie des rentiers s’amenuise et que se revalorise le prix de la nue-propriété. ViaGénérations, pionnière de ce créneau, a revalorisé ses parts de plus de 6 % par an ces trois dernières années.
5 PME NON COTÉES Pour la performance
Soutenir l’économie en investissant au capital d’entreprises françaises ou européennes de taille moyenne non cotées en Bourse. C’est tout l’objet du capital-investissement, jusqu’alors réservé aux institutionnels ou aux particuliers fortunés, mais dont les performances laissent rêveur (+11,30 % par an, en moyenne, sur les 10 dernières années). Désormais, il ne se passe plus un mois sans que de nouveaux supports de ce type soient proposés aux particuliers via l’assurance-vie (tous sont référencés sur la plate-forme Althos-invest.com). Il existe deux catégories de fonds. Les premiers collectent l’épargne des particuliers, investissent dans des PME avant de revendre leurs participations 8 à 10 ans plus tard avec, si tout se passe bien, une plus-value à la sortie. Le souci : il est préférable de conserver le fonds jusqu’à son échéance, parfois longue, pour en espérer une performance satisfaisante, les sommes étant parfois même bloquées. Pour attirer le plus grand nombre, certains acteurs tentent de résoudre cette absence de liquidité avec des fonds qu’il est possible d’acheter ou revendre (quasiment) à tout moment. C’est le cas d’Apax Private Equity Opportunities, d’Idinvest Private Value Europe 3, d’Isatis Capital Vie et Retraite, de NextStage Croissance, de Siparex EquiVie et, bientôt, d’Axa Avenir Entrepreneurs, géré par Ardian. Mais seuls quelques assureurs (Axa, Cardif, Generali, Spirica…) proposent un choix étoffé de fonds non cotés au sein d’un même contrat.
6 INFRASTRUCTURES Rendements réguliers
Les plans de relance américains et européens font la part belle à la création d’infrastructures, que ce soit dans les télécoms (déploiement de réseaux de fibre optique), la transition énergétique (fermes solaires ou éoliennes) ou les transports (ferroviaire, autoroutier…). Si les institutionnels palliaient jusqu’à présent aux colossaux besoins de financement, les particuliers sont désormais invités à y participer. C’est ainsi que de nouveaux types de fonds émergent en assurance-vie, investis dans des infrastructures au travers de sociétés non cotées en Bourse. Ces projets ont pour atout d’être relativement sécuritaires (les exploitants s’engagent à verser des revenus récurrents), ce qui laisse présager des rendements de l’ordre de 4 à 5 % par an sur le long terme. Parmi les pionniers figurent Axa Avenir Infrastructure (Axa) et GF Infrastructures Durables (Generali). Il existe également des fonds investis dans des sociétés d’infrastructure cotées, comme DNCA Invest Beyond Infrastructure & Transition ou M & G Global Listed Infrastructure, davantage tributaires des soubresauts boursiers.
7 FONDS STRUCTURÉS Une relative sécurité
Les fonds structurés permettent d’obtenir une performance connue à l’avance si un scénario boursier se réalise, par exemple une stagnation ou
une hausse d’un indice déterminé ou d’une valeur. Avec eux, il est donc possible de gagner de 5 à 10 % par an, même si la Bourse fait du surplace. « Aujourd’hui, nous rencontrons surtout des produits créés sur mesure pour certains clients, par une banque privée ou des conseillers en gestion de patrimoine, et beaucoup moins de produits lancés par des grands réseaux », observe Grégory Vial, chez Feefty. Il en existe pour quasiment tous les goûts et tous les besoins. « Certains sont risqués, car adossés à une seule action, avec des espoirs de gains importants, d’autres sont plus diversifiés, car construits autour d’indices plus larges, mais avec des promesses de gains plus mesurées », précise Grégory Vial. La plupart sont des fonds à rappel automatique : si le scénario prévu s’est réalisé au bout d’un an, vous recevrez votre capital et le gain promis.
Si l’action ou l’indice retenu a baissé, il faudra attendre un peu plus longtemps, jusqu’à 5 ou 6 ans, mais un effet « mémoire » permettra de rémunérer l’épargne pour chaque année écoulée au niveau promis. Attention, ces produits peuvent s’avérer risqués : si l’action ou l’indice choisi perd, au final, jusqu’à 30 à 40 % de sa valeur, vous ne récupérerez que votre capital (moins les frais) sans aucun gain. Et si la baisse est supérieure, vous devrez la supporter en totalité. À réserver donc, aux investisseurs optimistes sur l’évolution des marchés ou qui, en tout cas, ne croient pas à une baisse sévère.
8 EUROCROISSANCE Le futur garanti
Il s’agit d’un placement hybride entre les fonds en euros à capital garanti à tout moment et les supports en unités de compte, sans protection. Avec un fonds Eurocroissance, l’épargnant a la certitude de récupérer les capitaux investis à l’issue d’un délai d’au moins 8 ans. Mais il n’existe aucun filet de protection avant l’échéance prévue.
S’ils existent depuis plusieurs années, ils sont toujours assez rares, car peu d’assureurs se sont laissé séduire. Mais ceux qui s’y sont lancés saluent généralement l’intérêt et les performances du produit, avec des performances – provisoires – allant de 2,20 à 3,70 % l’an dernier. Réformés par la loi Pacte, de nouveaux fonds Eurocroissance sont en préparation. Serez-vous prêt à abandonner une garantie permanente contre une promesse de rendement légèrement supérieur à moyen terme ? Voilà la question à se poser avant d’investir. ■