L’ARMÉNIE, CETTE VICTIME INVISIBILISÉE
C’est une guerre de civilisation que l’Occident ne veut pas voir. Une destruction méthodique d’un peuple et de ses structures administratives, politiques et spirituelles par des voisins agacés par la survivance de cette anomalie locale. Dans le Caucase du Sud, formant un bouchon dans le couloir turcique menant d’Istanbul au Xinjiang, l’Arménie se tient, fière et droite quoique abîmée par des siècles d’invasion et d’occupation.
Il y a un an, dans l’indifférence internationale quasi complète, l’armée azerbaïdjanaise, épaulée par la Turquie, attaquait le Haut-Karabakh, ancestrale terre arménienne attribuée artificiellement et cyniquement à l’Azerbaïdjan par Staline, au début des années 1920. En 44 jours, à l’aide de bombes à sous-munitions, de drones tueurs, de missiles au phosphore et de milliers de mercenaires djihadistes, plus de 2/3 de la république d’Artsakh autopoclamée en 1991 (et reconnue indépendante par les deux chambres législatives françaises) étaient conquis par les TurcoAzéris. Depuis, malgré la présence d’une force de paix russe, la situation est précaire. Les Arméniens ne se demandent si « ils » vont revenir, mais quand… C’est tout cela que rappelle, Valérie Toranian, directrice de La Revue des Deux Mondes dont la famille a fui le génocde de 1915 pour s’installer en France, dans un texte crucial et salutaire. On allait écrire : bernanosien. Publié dans la collection quinzomadaire « Placards & Libelles », L’Arménie, du sang sur nos mains * ne plaira pas à notre ministre des Affaires étrangères Jean-Yves Le Drian, qui prônait la neutralité dans un conflit où des civils étaient décapités au cri de « Allah Akbar ». Ni à ceux qui, s’ils l’approuvaient, craindraient d’être taxés d’islamophobes au motif que l’agresseur est musulman. Ni à tous ceux estimant que les chrétiens, forcément coupables par essence, payent là leurs péchés et leurs crimes (les croisades !). Mais il plaira à tous les esprits lucides qui ont compris que ce qui se jouait là-bas, dans le Caucase, nous concernait aussi. Et que défendre les Arméniens contre les Barbares, c’est aussi défendre la France.