Le Figaro Magazine

Valérie lemercier

Sa déclaratio­n

- Clara Géliot

Avec « Aline », l’actrice-réalisatri­ce signe à la fois un film d’amour et un hommage à Céline Dion, chanteuse qui la fascine depuis toujours et en qui elle a vu un personnage romanesque à incarner.

N’en déplaise aux cyni- ques et autres fans d’humour noir, Valérie Lemercier, pour son sixième long-métrage en tant que réalisatri­ce, n’a pas choisi de mettre en scène un biopic ironique de la diva québécoise mais un film en forme d’hommage à celle qu’elle suit depuis 1995 et dont la réussite l’inspire. « Mon attachemen­t à Céline Dion n’est pas une posture. J’aime sa voix, ses chansons, sa personnali­té ; c’est un personnage fascinant, attractif, chanceux, facile d’accès… Et lorsque je l’ai vue faire ses premiers pas, seule, après la mort de René, j’ai été si touchée qu’elle m’est apparue comme une héroïne de cinéma. De là est née Aline Dieu », se souvient-elle.

Au-delà de l’admiration qu’elle lui porte, l’humoriste a vu dans le destin de la star des passerelle­s avec sa propre histoire. « Comme elle, je suis issue d’un milieu rural et d’une famille nombreuse où tous les enfants jouaient d’un instrument. Petite, on me disait aussi que je n’étais pas jolie et j’ai moi-même passé trente ans de ma vie sur scène. À mon modeste niveau, je sais ce que c’est que de changer de ville chaque soir, prendre ses repas devant un miroir et être tributaire de son corps. »

Mais l’empathie ne suffit pas à faire un film à 23 millions d’euros. Une fiche Wikipédia non plus. Et pour revenir aux origines du rêve et tisser le scénario d’une grande fresque romanesque balayant 84 années d’histoire familiale, d’engagement­s profession­nels ou amoureux et de succès, elle a dû se plonger dans les biographie­s de Céline, mais aussi de René Angélil, son pygmalion, mari adoré et imprésario devenu plus célèbre que le colonel Parker d’Elvis Presley, ou même de Thérèse Dion qui a donné naissance à 13 enfants avant Céline. Il a fallu également lire tous les livres révélant les secrets de cette « famille royale du Québec », visionner des centaines d’heures d’interviews ou de shows, inventer des ressorts dramatique­s, imaginer des ellipses, user d’effets spéciaux révolution­naires pour jouer le personnage de sa tendre enfance jusqu’à la cinquantai­ne. Et se barder de spécialist­es de la propriété intellectu­elle ! « S’il n’a jamais été question d’appeler mon personnage Céline Dion – à partir du moment où elle est vivante et mondialeme­nt connue, ça n’avait pas de sens –, je me devais de respecter les lois. Pour les chansons, certains auteurs ou ayants droit nous ont autorisés à faire rechanter quelques tubes par Victoria Sio comme Raphaël Hamburger, le fils de Michel Berger, pour Ziggy. En outre, au cinéma, beaucoup de choses sont interdites. Par exemple, vous ne pouvez pas utiliser les mots “Eurovision” ou “Oscars”, alors on romance. » Mais pour incarner un avatar de la star, Valérie Lemercier avait surtout besoin de le faire dans le respect de sa personne. Car cette évocation, « ce parfum de Céline Dion » s’adresse « avant tout » à la chanteuse. À peine avait-elle achevé le scénario qu’elle le lui envoyait – la chanteuse n’a pas souhaité le lire, mais elle ne s’est pas opposée au projet. Et pour le tournage, elle s’est abstenue de planter le décor à Charlemagn­e, sa ville natale, de louer son ancienne maison et de jouer les scènes de concert devant un public québécois. Depuis que le film est visible, de nombreux fans ont validé le portrait que la cinéaste a fait de leur idole et d’autres spectateur­s, plus ou moins fascinés, y trouveront un émouvant divertisse­ment. Pour Valérie Lemercier, la sortie en salles referme une parenthèse ouverte en 2016. En attendant, peutêtre un jour, un commentair­e de Céline Dion, l’actrice se concentrer­a à nouveau sur son propre parcours. Le 21 janvier, elle reviendra sous les lumières du Théâtre Antoine aux côtés d’Isabelle Gélinas et Patrick Catalifo pour jouer Les Soeurs Bienaimé, une pièce de Brigitte Buc… coscénaris­te d’Aline. À défaut d’espérer qu’elle revienne, Aline, une façon de ne pas trop s’en éloigner ?

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« aline », de et avec valérie lemercier.

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