DU NEUF SUR HITLER
★★★★ Hitler. Le monde sinon rien, de Brendan Simms, Flammarion, 925 pages, 39 €.
Sur Hitler, Brendan Simms propose un complet renversement de perspective. Là où les historiens français ne voient chez lui que son anticommunisme, ce professeur de Relations internationales à l’université de Cambridge met en évidence la fascination du chef nazi pour le monde anglosaxon. Dès les années 1920, en effet, la Grande-Bretagne apparaît au futur dictateur comme un modèle d’État national fort en raison du maintien au pouvoir des élites traditionnelles. Les États-Unis aussi, car ils bénéficient d’un territoire immense assorti d’une forte proportion de descendants d’immigrés germaniques, donc « racialement supérieurs ». À cause de son sang, trop « mélangé » selon Hitler lui-même, l’Allemagne doit s’autopurifier pour devenir un monolithe racial, conquérir à l’Est le nécessaire « espace vital » et se partager le monde avec les Anglo-Saxons.
Le rejet des avances du dictateur par Londres et Washington, longtemps cajolées, le pousse à déclarer la guerre. Un conflit que le Führer croira gagner par des fuites en avant dont l’agression contre l’URSS – un danger de second ordre selon lui ! Et qu’il entend faire « payer » aux démocraties occidentales par l’extermination des Juifs, leurs « maîtres » supposés. Raciste dans son essence au nom du renouveau génétique allemand, génocidaire dans sa pratique en vertu du culte de la violence, l’idéologie nazie fut traversée de contradictions qui étaient avant tout celles de son créateur. Simms les dissèque avec précision dans cet ouvrage passionnant et novateur.