STIMULER L’IMMUNITÉ POUR SOIGNER LES CANCERS
Une révolution est en marche : l’immunothérapie ne cherche pas à détruire la tumeur mais aide le système immunitaire à la combattre.
Chirurgie, chimiothérapie, radiothérapie… Ces traitements classiques ont fait la preuve de leur efficacité en cherchant à éliminer la tumeur : l’extraire au scalpel, la détruire par des médicaments ou en la bombardant de rayons X. L’immunothérapie n’attaque pas le cancer de front. Mais elle donne à l’organisme les moyens de lutter par lui-même contre sa tumeur. En temps normal, le système immunitaire est capable de reconnaître et d’éliminer les cellules précancéreuses et cancéreuses. Mais ces dernières peuvent parfois acquérir la capacité d’endormir les défenses immunitaires. « Ce traitement les stimule, particulièrement ces globules blancs qu’on appelle les lymphocytes T. Ainsi renforcés, ils peuvent attaquer les cellules cancéreuses et les détruire. Mais il faut être vigilant car une immunité trop fortement stimulée pourrait s’en prendre à d’autres organes comme la thyroïde, la peau ou le colon », explique le Dr Safae Terrisse, oncologue médicale, à l’hôpital Saint-Louis à Paris.
Une efficacité parfois spectacUlaire
L’immunothérapie est mieux tolérée que la chimiothérapie et n’entraîne pas ses terribles effets secondaires. Cela permet aux patients de mener une vie quasiment normale. Son efficacité est parfois spectaculaire : certains patients, hier condamnés, voient leur pronostic vital métamorphosé. « L’immunothérapie double globalement la survie par rapport à la chimiothérapie dans des indications précises. Pour un malade sur cinq, l’efficacité est encore bien plus grande. Attention, tous les cancers ne sont pas concernés. Elle est principalement indiquée dans le mélanome, les cancers du rein, de la vessie, du poumon et les cancers ORL », souligne le Dr Terrisse. Mais ces résultats très performants ne s’observent que chez 20 à 40 % des patients. Il faut arriver à cibler ceux qui ont intérêt à bénéficier de ces traitements, d’autant qu’ils sont onéreux : environ 5 000 € par mois. On connaît les liens entre immunité et microbiote, ceci a amené les chercheurs à s’intéresser aux liens entre microbiote et cancer. « Le microbiote intestinal peut intervenir dans toutes les phases du cancer : de la genèse au développement de la tumeur, jusqu’à la réponse à l’immunothérapie. Des études montrent que la prise d’antibiotiques à large spectre perturbe le microbiote et diminue l’efficacité de l’immunothérapie. Ces mêmes études révèlent que certaines bactéries du microbiote sont associées à la réussite de l’immunothérapie, d’autres à son échec », analyse le Dr Terrisse. Certaines de ces bactéries ont été identifiées. Des protocoles de recherche proposent d’améliorer l’efficacité de l’immunothérapie par l’administration, au préalable, de probiotiques, autrement dit de bactéries favorables vivantes ou inactivées. Ces perspectives permettent de rêver à des traitements anticancéreux moins agressifs et plus performants, des thérapies qui permettront aux patients de mener une vie normale, sans fatigue ni perte de cheveux. On peut aussi rêver à une future immunothérapie qui rendrait notre système immunitaire capable d’anéantir le cancer de la même manière qu’il traite le rhume ou la grippe. La recherche progresse et les espoirs sont permis.