À KER LANNOUÉ, FRANÇOIS BOUILLIS OPTE POUR LES CIRCUITS COURTS
Exploitée depuis quatre générations par les Bouillis selon un schéma traditionnel de polycultureélevage (vaches laitières et céréales), la ferme familiale Ker Lannoué (landes, en breton) à Epiniac, en Ille-etVilaine, s’est mise à l’heure des circuits courts il y a deux ans. « Quand j’ai proposé à mes parents de m’associer avec eux, la condition était de monter un atelier de transformation d’une partie de notre lait en fromages pour les vendre sur place, explique François Bouillis. Ils ont accepté de se lancer avec moi dans l’aventure. »
En attendant, il a fallu monter le laboratoire de fabrication des fromages au lait cru et faisselles directement relié au tank de l’étable, aménager une cave d’affinage, des sanitaires et un magasin de vente. Une facture de 200 000 euros. « C’était le prix d’un tracteur neuf, sourit le père, Yannick Bouillis, quinquagénaire, installé à la ferme depuis 1995. Autant investir dans un outil de production permettant d’installer notre fils et mieux valoriser notre production tout en diversifiant nos sources de revenus ; 10 % de notre lait est utilisé pour les fromages, le reste est vendu à la laiterie de Saint-Malo. » En outre, ce projet répondait aux aspirations de son fils. « Les circuits courts, c’était une évidence. Cela fait dix ans que j’étais tombé dedans. C’était lors d’un stage découverte en classe de seconde dans une ferme du département qui faisait des fromages au lait cru et les vendait sur place », se souvient François Bouillis, aujourd’hui âgé de 25 ans. Il multiplie ensuite les expériences pour apprendre le métier et ses spécialités avant de revenir dans le giron familial. Le 1er juillet 2020, la fromagerie sort de terre. Le temps de l’affinage des premiers fromages, le magasin ouvre en septembre suivant, dans un contexte de confinement. « Le click and collect à partir de notre site internet a permis le décollage de l’activité, sourit François Bouillis. J’étais le seul dans le secteur à maîtriser la fabrication de fromages au lait cru. Le bouche-à-oreille a bien fonctionné, d’autant que nous sommes près d’un maraîcher bio pratiquant la vente directe et d’un fabricant de pain paysan. » Revers de la médaille, le succès au-delà des prévisions budgétaires, oblige François à travailler plus de 70 heures par semaine. « Les circuits courts, c’est quatre fois plus de rentabilité, mais cinq fois plus de travail, lance-t-il. Nous avons recruté ma soeur aînée Adélaïde en CDI et une stagiaire pour s’occuper des ventes en novembre dernier. Nous avons une vingtaine de professionnels comme des restaurateurs ou des magasins spécialisés comme clients en plus des particuliers qui viennent sur place. » Les clients apprécient. « Je ne mangeais jamais de fromage avant de venir ici, commente AnneSophie, salariée d’un laboratoire à Combourg, à 10 kilomètres de là. C’est devenu un petit plaisir, notamment le fromage frais à l’ail des ours ou à l’échalote. On voit où est fabriqué ce qu’on mange, et en plus ce n’est pas plus cher qu’ailleurs. » Pour elle, le bonheur est dans le bio.