Finlande, terre de lumières
Deux musées parisiens mettent à l’honneur deux peintres nordiques, méconnus en France mais illustres dans leur pays pour leur virtuosité exceptionnelle : Albert Edelfelt (1854-1905) et Akseli Gallen-Kallela (1865-1931).
Cap au Nord ! Une région qui attire le Petit Palais, organisateur des récentes rétrospectives des Suédois Carl Larsson et Anders Zorn et de l’exposition dédiée à « L’Âge d’or de la peinture danoise ». Le nouveau parcours de l’institution parisienne, qui célèbre cette fois le génie du Finlandais Albert Edelfelt (1), constitue une offre tout aussi séduisante. Le choc est immédiat devant ses travaux, réunis pour la première fois dans la capitale depuis… 1905 ! À l’image de la lumineuse sensation procurée par l’huile sur toile Enfants au bord de l’eau, exécutée en 1884 par cet illustre représentant des genres réaliste et impressionniste. Un style d’une pureté admirable, prisé par ses pairs et compatriotes, dont le non moins étonnant Akseli Gallen-Kallela (2), remarquablement mis à l’honneur, lui, au Musée JacquemartAndré.
Par leur lyrisme austère, ses paysages charment pareillement le regard. Les panoramas défilent, diffusant parfois un sentiment de solitude apaisée. De nombreuses toiles, issues notamment du Musée Gallen-Kallela d’Espoo, convoquent l’imaginaire. Au premier rang desquelles les représentations de son atelier plongé dans la nature profonde au coeur de l’hiver. Loin de la ville et de ses fracas. Un état d’esprit qui le rapproche de son prestigieux aîné, qui aime autant explorer les territoires les plus reculés de Finlande. Mais pas uniquement. « Edelfelt était quelqu’un », résumait le romancier Henri Amic. Difficile de le contredire en arpentant les salles du Petit Palais. Au total : une centaine d’oeuvres, dont beaucoup proviennent du Musée d’art de l’Ateneum d’Helsinki.
L’extrême variété de ses sujets séduit, l’homme excellant aussi dans l’art du portrait. Le plus célèbre, aux yeux du public français, demeure celui de Louis Pasteur immortalisé dans son laboratoire. Une somptueuse allégorie de la Science et du Progrès, qui valut à son auteur la reconnaissance hors de son pays et la rosette de la Légion d’honneur. Paris ? Un autre point commun entre les deux artistes. Edelfelt s’y illustre dès 1874 dans l’atelier de Jean-Léon Gérôme, après avoir intégré l’École des beaux-arts. Il a une vingtaine d’années et rencontre ensuite Jules Bastien-Lepage qui lui prodigue de précieux conseils. Dix saisons plus tard, Gallen-Kallela débarque à son tour en France. Il y fait son apprentissage à l’Académie Julian. Pour l’anecdote, il dispose avec son colocataire d’un vieux poêle laissé par… Edelfelt.
Créations inattEnduEs
Un bel exemple de solidarité entre les deux peintres, unis parallèlement par leur patriotisme et leur méfiance vis-à-vis de la toute-puissante Russie. Ce qui n’a pas empêché Edelfelt de rendre un bel hommage au tsar Alexandre III, via une charmante aquarelle de ses enfants Michael et Xenia. Les compositions historiques, sous l’impulsion des commissaires d’exposition Anne-Charlotte Cathelineau et AnneMaria Pennonen, ne manquent pas. Parmi les sources d’inspiration : la révolte des paysans de 1596-1597. Autre curiosité : cet autoportrait en costume du XVIIe siècle. Le terme « touche-à-tout » s’applique de la même façon à Gallen-Kallela, classé chez les symbolistes et les naturalistes. La visite élaborée par Pierre Curie, conservateur en chef du patrimoine, donne un aperçu précis de l’étendue de ses talents avec des créations inattendues, comme cette étude pour un tapis, ce vitrail baptisé Finlande, Lève-toi, cette huile Les Skieurs, Akseli et Jorma qui célèbre une nouvelle fois les corps communiant avec la nature, voire ces travaux de dimension ésotérique. Prenez vite deux billets pour la Finlande !