Le Figaro Magazine

Une maison aU vert, coûte qUe coûte

- Par Pascal Tonès

Depuis le début de l’année 2022, le marché reste euphorique en Île-de-France. Les acquéreurs potentiels veulent tous mettre la main sur une maison avec jardin ou un appartemen­t spacieux en dernier étage, quitte à s’éloigner de la capitale. Des perles rares qui partent à prix d’or si elles n’ont aucun défaut lorsqu’elles arrivent dans les agences.

Un marché immobilier téflon. Qu’il s’agisse de la pandémie ou de la présidenti­elle, rien n’arrête les acheteurs francilien­s. L’année 2022 commence sous les mêmes auspices que 2021 selon les profession­nels de l’immobilier : « Le début d’année est hyperactif, alors qu’en temps normal, c’est plutôt calme à Boulogne », constate Valérie Le Roy Maguin, chez Barnes Boulogne. « Nous n’avons plus de biens à vendre et le marché se fragmente en deux dans la ville. D’un côté, les appartemen­ts classiques, sans extérieur, en 2e étage, qui voient leurs prix légèrement reculer et se négocient autour des 9 000 à 10 000 €/m². De l’autre, les biens avec terrasse, jardin ou balcon filant qui partent à 12 000 €/m², voire entre 15 000 et 16 000 €/m² pour les propriétés les plus prestigieu­ses », ajoute-t-elle. Les familles parisienne­s qui s’agrandisse­nt cherchent plus que tout des espaces extérieurs, et si Boulogne-Nord reste le coeur de cible des acquéreurs, beaucoup n’hésitent plus à migrer dans le sud pour trouver leur bonheur. « Le prix de départ pour les maisons, c’est 2 millions d’euros », constate Thomas Veber, de

Paris Ouest Sotheby’s Internatio­nal Realty. Mais attention, les vendeurs doivent être raisonnabl­es. J’ai l’exemple d’une maison restée sur le marché pendant quatre ans dans la ville parce que le vendeur en demandait 4 millions d’euros alors qu’elle en valait 2 de moins », précise-t-il.

Neuilly, et ses prix stratosphé­riques, connaît le même engouement, même si le problème de l’offre est plus que jamais sur la table. « Les biens sans défaut peuvent se vendre jusqu’à 16 500 €/ m ² dans la ville et l’on trouve rarement des logements en dessous des 11 000 €/m² », explique Olivia Pottier, directrice de l’agence Émile Garcin dans la ville. « À Neuilly, les biens les moins chers sont à trouver du côté de l’avenue Charles-deGaulle, à 10 500 €/m ², ou près du boulevard Bineau ainsi que sur toute la partie de la ville qui borde Levallois-Perret »,

conclut-elle. La demeure rêvée des acquéreurs ? L’appartemen­t de 130 m² en plein quartier Sablons avec 3 chambres. « Le délai de vente moyen à Neuilly est de 58 jours, mais pour les biens zéro défaut, il descend à 7 jours voire 24 heures »,

observe Sandra Sabah, team leader Engel & Völkers

pour les Hauts-de-Seine. Face à ce marché tendu, les particulie­rs peuvent se tourner vers le marché levalloisi­en en quête d’un appartemen­t en dernier étage avec terrasse. « Les prix pour ces biens vont de 7 100 à 12 700 €/m² dans la ville. Les maisons sont plus rares, mais on en trouve quelques-unes dans le quartier de la mairie ou près du parc de la Planchette, entre 5 800 et 13 300 €/m² », affirme Sandra Sabah.

Car en ce début d’année, comme les années précédente­s, l’obsession première des acquéreurs demeure la maison. « Le télétravai­l a modifié les exigences des acheteurs. Le critère de luminosité est aujourd’hui essentiel dans leur choix, tout comme la présence d’une vraie pièce supplément­aire pour créer un bureau », indique Nicolas Fels, directeur de l’agence Century 21 à Versailles. Et face à la hausse des prix dans la petite couronne, nombreux sont ceux qui traversent la Seine ou vont tenter leur chance dans les Yvelines, la Seine-et-Marne ou le Val-d’Oise. Selon les données de la chambre des notaires de Paris, le prix des maisons dans les Hauts-de-Seine a augmenté de 7,9 % en un an et de 30 % en cinq ans. La pression est telle dans le départemen­t qu’en fin d’année 2021, au sein d’une ville comme Sèvres, le coût des maisons a augmenté de plus de 20 % en un an pour s’échanger au prix fort. Aujourd’hui, une villa de 120 m² avec 180 m² de terrain dans le quartier Brancas se vend 1 160 000 €. Plus loin encore dans le 92, du côté de Suresnes, les maisons ne se négocient plus en dessous des 800 000 €. « Toutes les communes de petite couronne sont devenues très chères, même pour les Parisiens », constate Geoffroy Reins, directeur réseau Île-de-France au sein d’Espaces Atypiques. « Prenez des villes du Val-de-Marne comme Saint-Mandé ou Vincennes. Les prix sont quasiment les mêmes qu’à Paris », ajoute-t-il.

En effet, si l’on se reporte aux données des notaires, le mètre carré moyen à Saint-Mandé s’élève à 8 760 € pour un appartemen­t et atteint les 9 360 € à Vincennes. Des prix identiques voire plus élevés que ceux pratiqués dans le 13e, le 19e ou encore le 20e arrondisse­ment de Paris. « Cela rebat les cartes dans le Val-de-Marne et les villes proches du RER A, pas trop loin de Paris, comme Nogent-sur-Marne ou Fontenay-sousBois sont les grandes gagnantes », souligne Sébastien Mouton, de Barnes Val-de-Marne. Ces deux communes ont pour particular­ité d’offrir encore un grand nombre de maisons en vente, dans des cadres très verts, proches de la Marne ou du bois de Vincennes. À Fontenay-sous-Bois, par exemple, les maisons du quartier du Village, l’un des plus plébiscité­s, se négocient encore autour des 7 000 €/m² quand les plus chères, proches du bois, se vendent sous les 10 000 €/m². À Nogentsur-Marne, les beaux pavillons sont en dessous du million d’euros, aux alentours de 770 000 €, selon les données des notaires.

La grande couronne a La cote

Même mouvement dans les Yvelines. Si Versailles est toujours recherchée, en un an les prix progressen­t de 5 à 6 % selon les profession­nels. « Pour 800 000 €, vous pouvez avoir un bel appartemen­t à Versailles mais pas une maison, à moins d’aller près de la gare Versailles-Chantiers, et encore, elles sont très rares sous les 900 000 € », précise Nicolas Fels. Quelques opportunit­és sont encore à saisir dans la ville près du quartier de Montreuil où les transactio­ns se négocient autour des 6 500 €/m², mais pour les zones de Saint-Louis ou NotreDame, il faudra au moins débourser 10 000 €/m² pour un bien de qualité. C’est le cas de cette maison de ville de 120 m² avec toit-terrasse de 50 m², sur 3 étages, mise sur le marché pour 1 298 000 €. Plus loin dans les Yvelines, c’est Saint-Germainen-Laye qui a la cote. Là encore, les maisons sont prises d’assaut et voient leur prix augmenter de plus de 30 % ces cinq dernières années. Les acheteurs misent sur le centre-ville même si les biens proches du lycée internatio­nal, vendus entre 5 500 et 6 500 €/m², intéressen­t la clientèle étrangère et les expatriés, notamment les Français qui, au compte-gouttes, reviennent du Royaume-Uni depuis le Brexit. « Reste que même dans cette ville, pour une maison familiale de 100 m² avec 100 m² de jardin, le ticket d’entrée est à 2 millions. Les particulie­rs s’éloignent donc encore plus et vont jusqu’à Orgeval », souligne Sophie Cardon, de l’agence Paris Ouest Sotheby’s Internatio­nal Realty. Une tendance à l’éloignemen­t qui pourrait bien perdurer selon Thierry Delesalle, notaire parisien : « Le mouvement post-Covid devrait être moins fort cette année que l’année précédente, mais il ne s’arrêtera pas brutalemen­t et les prix vont continuer d’augmenter en grande couronne. Les stocks se réduisent de plus en plus un peu partout et l’absence de constructi­ons neuves pousse les acheteurs vers l’ancien. » Si l’on se réfère aux données de la Banque de France, la production de crédits à l’habitat atteint 23,6 milliards d’euros, renégociat­ion comprise, en janvier 2022 contre 21,7 milliards en décembre 2021. De quoi laisser présager une année 2022 des plus dynamiques.

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Les ménages sont souvent contraints de s’éloigner du centre-ville.
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L’obsession première des acquéreurs demeure la maison.

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