IL ÉTAIT UNE FOIS À HOLLYWOOD
Grandes collectionneuses de bijoux, les stars de l’âge d’or du cinéma ont souvent porté leurs propres parures de diamants à l’écran.
ses bracelets Cartier en cristal de roche et diamants, Gloria Swanson les arborait par paires. À la ville comme à l’affiche. C’est en 1932 que la star du muet achète au joaillier de la rue de la Paix ces bijoux extensibles qui s’enfilent sans fermoir – les disques de cristal de roche étant montés ingénieusement sur un fil à ressort. L’actrice les aime tellement qu’elle ira jusqu’à les porter dans deux de ses films : Le Parfait Accord (Perfect Understanding), en 1933, puis Boulevard du crépuscule (Sunset Boulevard), en 1950, où elle les empile sur le même poignet. Leur structure volumineuse et leurs effets de transparence soulignés par les brillants conviennent parfaitement au noir et blanc d’alors. Sur la pellicule, leur éclat est accentué à la fois par les robes de satin blanc, les somptueux décors clairs et les lumières fortes, parfois jusqu’à l’éblouissement, des studios.
LE GLAMOUR DES GROS CAILLOUX
À l’époque, l’actrice n’est pas la seule à porter ses propres gemmes à l’écran et Mary Pickford, Merle Oberon ou Mae West arrivent parfois avec leurs boîtes à bijoux sur les plateaux de la MGM ou de la Paramount. Dans les années 1930, le glamour hollywoodien s’exprime autant avec les fourreaux noirs, les robes lamées et les chevelures en cascade qu’avec les gros cailloux. Les grands noms de la couture et de la joaillerie ne collaborent pas encore avec le cinéma, les costumiers subliment les stars en leur façonnant un style qui les accompagne de film en film mais aussi dans la vie. À Hollywood, la femme et l’actrice se confondent parfois
___u jusqu’à ne faire qu’une.
Grande croqueuse de diamants – et d’hommes –, Paulette Goddard porte ainsi sur le tournage de Coup de théâtre (Dramatic School, 1938) l’un de ses colliers transformables en manchettes qui mêle aux 60 diamants baguette, marquise et brillant, 46 incroyables taille émeraude. Lorsqu’un journaliste s’extasie sur cette rivière étincelante de près de 30 carats, l’actrice lui rétorque avec humour : « Je me suis fiancée si souvent, je ne rends jamais rien ! » Suggérant ainsi qu’elle aurait utilisé quelques bagues d’engagement pour arrondir son collier. Celle qui n’acceptait « jamais de fleurs ni rien de périssable » refusait rarement les bijoux. Pour la consoler de ne pas avoir décroché le rôle de Scarlett O’Hara dans Autant en emporte le vent, son mari Charlie Chaplin lui offre ainsi une demi-parure de diamants qu’elle porte dans Femmes (The Women) de George Cukor. On l’y aperçoit également avec sa manchette de cabochons d’émeraude gros comme des bonbons sertis dans des motifs floraux par Trabert & Hoeffer, alors joaillier préféré du Tout-Hollywood.
DES BIJOUX PHOTOGÉNIQUES
Volumes imposants et cascades de pierres siéent au noir et blanc
Comme Paulette Goddard, la plupart des actrices de ce chef-d’oeuvre cinématographique, sorti en 1939, s’y affichent avec leur collection personnelle. La bague de fiançailles de Norma Shearer, un énorme diamant taille marquise, y fait presque pâle figure à côté de la manchette en or de Joan Crawford, les deux gigantesques citrines apparaissant aussi belles sur son ensemble lamé qu’avec sa robe en sequins. Ici, le duel de bijoux sur pellicule appuie avec brio la compétition féroce à laquelle se livrent les deux femmes autour du personnage masculin. C’est aussi pour théâtraliser la photogénie de Marlene Dietrich dans Le Grand Alibi (Stage Fright, 1950) qu’Alfred Hitchcock autorise la star à choisir ses bijoux. Et la manchette Jarretière de Van Cleef & Arpels dont l’actrice ne se sépare quasiment jamais d’entrer du même coup dans l’histoire du cinéma. Et de la joaillerie. Le bracelet articulé de diamants et à la boucle imposante tout en rubis sera vendu par Sotheby’s New York en 1992 pour… 990 000 dollars. ■