VIES DE FAMILLE
★★★ Nos tendres cruautés, d’Anne Tyler, Phébus, 350 p., 21 €. Traduit de l’anglais (États-Unis) par Cyrielle Ayakatsikas.
Connaissez-vous les Garrett ? Voici robin et Mercy, les parents d’alice, Lily et David. Cette famille de baltimore ressemble à beaucoup d’autres, ou presque. Le nouveau roman d’anne tyler, lauréate du prix Pulitzer, nous fait partager son existence de la fin des années 1950 à nos jours. La construction de Nos tendres cruautés est virtuose, les ellipses dopent le récit sans perdre le lecteur. une mère s’éloigne. une fille prépare son prochain mariage avant même d’avoir divorcé. On apprend celui du fils en passant, par une banale lettre de remerciement pour un dîner. Pourtant, la vie suit son cours comme si de rien n’était. Les enfants grandissent trop vite. De vieux films en super 8 réveillent des souvenirs. Le temps a filé. On regrette certaines époques même si on n’aurait jamais voulu les revivre. Des secrets inutiles, des illusions, des petites cruautés s’invitent.
Ces dernières valent le détour. « Je sais que vous détestez la nourriture sophistiquée », assène la mère à sa famille pour justifier le dessert de bas étage qu’elle sert. « Cette femme n’aurait pas dû avoir d’enfants », rétorque l’une de ses filles. Faut-il parfois sauter une génération pour établir des liens d’amour avec certains proches ? Peut-être. « Un passant aurait été incapable de deviner que les Garret se connaissaient, tant ils paraissaient dispersés et seuls », note anne tyler. On quitte cependant ces personnages le coeur serré, avec l’odeur sucrée-salée de l’enfance comme réminiscence des jours heureux.