L’HERBE EST PLUS VERTE À PORTO ALEGRE
★★★ Supermarché, de José Falero, Métailié, 336 p., 22 €. Traduit du brésilien par Hubert Tézenas.
Dans une favela de Porto alegre, Pedro et son ami Marques, « un garçon un peu stupide », rayonnistes dans un supermarché, ont organisé un système de chapardage massif au sein du magasin. De quoi améliorer l’ordinaire, mais Pedro vise un commerce plus lucratif. Pourquoi ne pas vendre de la marijuana dans la favela où seules les drogues dures intéressent les gangs ? s’étant familiarisé aux notions de plus-value et d’accumulation du capital grâce à la lecture de Marx, le jeune homme, révolté par l’injustice sociale, s’est fixé un objectif simple : « Je veux de l’argent ! »
Le tandem met en place le trafic, s’initie aux subtilités du crédit et de l’usure. L’argent commence à rentrer. La bande s’élargit jusqu’aux soeurs et compagnes des protagonistes qui ne manquent pas d’allant ni de caractère. Cependant, Pedro doit faire face à un paradoxe : vendre toujours plus d’herbe afin de pouvoir abandonner le trafic et jouir de sa nouvelle richesse.
Premier roman d’un jeune auteur né dans une favela de Porto alegre, Supermarché séduit par le picaresque des situations, sa galerie de personnages, la drôlerie des dialogues, le rythme du récit. José Falero ne trempe pas sa plume dans le misérabilisme et sa peinture sociale est sans illusions : les pauvres veulent « devenir eux aussi des bourgeois »
et s’enrichir sur le dos des autres. Cette comédie brésilienne sans folklore, aux accents de comédie italienne, vire au noir, mais il n’est jamais trop tard pour racheter ses fautes par la littérature.