LE TOUR D’ESPAGNE PAR DEUX ENFANTS

★★★ El Gordo, de Xavier Mauméjean, Alma éditeur, 276 p., 19 €.

Nous sommes en 1936. En Angleterre, un garçon de 12 ans, William, a récupéré un billet de loterie espagnol qui doit rapporter 15 millions de pesetas. William a une amoureuse, Sweet, qui vient de perdre son père, l’homme qui avait acheté le fameux ticket, El Gordo. Ni une ni deux, le jeune intrépide romantique décide d’embarquer pour l’Espagne afin de récupérer le pactole et de l’offrir à la jeune fille. Arrivé chez les Ibères, il découvre la guerre, rencontre un enfant muet plus jeune que lui, surnommé « Passe-montagne » en raison de la cagoule perpétuellement vissée sur sa tête. Au cours de leur épopée dans un pays à feu et à sang, William croisera Federico Garcia Lorca avant qu’il ne se fasse trucider, et surtout Julius Evola, grand manitou du fascisme italien, toqué d’ésotérisme et de néopaganisme, persuadé qu’El Gordo a des pouvoirs magiques. Les gamins survivent à mille mésaventures, rencontrent une fasciste habillée de cuir, pilotant un side-car ou un biplan, un sniper nommé Lazare qui se fait guider par un gosse en laisse, une folle qui les emprisonne et parle à un mannequin en bois surmonté d’un portrait, fraient avec les phalangistes à Séville, les anarchistes à Madrid qui s’appellent tous

« Bakounine », et des amazones aux lunettes sans verres gardant un pont. On en passe et des meilleurs. Xavier Mauméjean, membre du Collège de Pataphysique signe un roman picaresque exceptionnel, drôle et fantaisiste, qui lui permet de mieux décrire l’un des épisodes les plus tragiques du XXe siècle. Pour ne rien gâcher, il écrit superbement. On aimerait en lire plus souvent des comme ça.