FANTASIA DANS LES VOSGES
★★★ Le Temps des loups, d’Olivier Maulin, Le Cherche Midi, « Borderline », 323 p., 15 €.
Avant l’été, alors que sa « trilogie royale » (En attendant le roi du monde, Les Évangiles du lac, Petits monarques et catacombes) était rééditée aux éditions de La Nouvelle Librairie, Olivier Maulin était interrogé par l’un de ses admirateurs sur une radio courtoise. De quoi allait parler son nouveau roman ? Maulin était serein : « J’ai toujours aimé écrire sur les crétins, cette fois-ci, je pense avoir trouvé mon bonheur. » L’auteur du Bocage à la nage, de Gueule de bois, et surtout, des Lumières du ciel (deux bras cassés qui vendent des sapins halal à Noël) a en effet dégoté des champions du monde pour Le Temps des loups : les frères Grosdidier. Deux semi-abrutis, un débile profond. Jean-Didier Grosdidier, et les autres, Jean-Jean et Jean-Maurice, surnommé Jean-Mo. Le dernier, sorte d’Averell Dalton de la fratrie, a une idée de génie : kidnapper une auteur à succès au salon littéraire de Nancy pour demander une rançon. Tout cela se passe dans les Vosges. Les tocards, mal préparés, capturent en fait la tenancière de la buvette, qui, une fois chez eux, décide de transformer leur ferme en restaurant à flammekueche, la « pizza des boches ».
Ce n’est que le début. Il y a un romancier prétentieux et des gendarmes intéressants, ainsi qu’un sauvage qui, dans les bois, entend « la bête », comme dans
La Grande Frousse de Mocky. Maulin est déchaîné. Il a de ces fulgurances… Lorsque le moins couillon des frères contemple le plus idiot, on apprend qu’« au fond de lui sommeillait un Grec hanté par la limite ». On pourrait dire qu’il s’agit de l’un des romans ruraux de Marcel Aymé réécrit par Céline. Mais non, c’est bien du Maulin.