Les principes d’action de Monti, Maître es réforMes
Président du Conseil des ministres d’Italie pendant dix-huit mois cruciaux, entre 2011 et 2013, l’actuel sénateur est parvenu à sauver le système de retraite par répartition de son pays, en portant à 67 ans l’âge de départ. Il livre son témoignage sur cet
Quand l’Italie a traversé une crise financière majeure, j’ai eu la faiblesse de croire que son système politique était plus efficace qu’un système autoritaire. » par ces quelques mots, Mario Monti montre qu’il n’a rien oublié de l’année et demie qu’il aura passée à la tête du gouvernement italien. cela avait pourtant si bien commencé le 18 novembre 2011, quand les députés lui accordèrent leur confiance par 556 voix contre 61 – un score historique jamais vu ! Monti venait d’être nommé président du conseil d’un gouvernement de 16 ministres, dont aucun n’était issu d’un parti politique, par Giorgio napolitano, le président de la république. trois semaines plus tard, le 5 décembre, il présente sa politique à la presse ; il n’a qu’une ministre à sa droite, elsa fornero. Une collègue économiste de l’université de turin (où il a enseigné) qu’il a chargée du dossier des retraites, avec pour mission de réformer un système qui traîne depuis vingt ans. elle a bouclé son texte en vingt jours. Mais quand elle doit annoncer le coeur de sa proposition, la hausse à 67 ans de l’âge de départ en retraite et celle du montant des cotisations qui va avec, l’émotion la submerge.
La confiance des créanciers
Mario Monti vient à son secours. il rappelle les enjeux : réduire impérativement les dépenses publiques pour « sauver l’italie ». soit 63 milliards d’euros planifiés sur trois ans. dans cette masse, les retraites représentent un gros paquet ; c’est devenu le sujet essentiel. cette année-là, l’italie est plongée dans la crise. on la voit sur la pente
de l’espagne, du portugal, ou même pire : de la Grèce.
La Banque centrale européenne (Bce), présidée par Jean-claude trichet (l’actuel président de l’académie des sciences morales et politiques qui recevait à l’institut Mario Monti, associé étranger de l’académie, au début de ce mois de janvier), lui demande des réformes en contrepartie de son aide financière. des réformes « immédiates, résolutoires et crédibles ». Le but est de redonner confiance à ceux qui détiennent de la dette souveraine italienne, et de rendre viable, à long terme, la dépense des retraites. Monti, qui a été pendant dix ans (de 1994 à 2004) commissaire européen, n’a pas besoin d’explications. il quitte rome pour les sommets européens où se gère la crise… il sait qu’on l’attend.
« L’impression qui prévaut, dit-il, c’est la domination, courtoise mais indiscutable, de l’Allemagne et de ses alliés de l’Europe du Nord. À l’intérieur des différentes instances comme dans le débat public, la BCE est très à l’écoute de la chancelière, Angela
Merkel, et de son ministre des Finances, Wolfgang Schäuble. »
« Certes, poursuit-il, j’étais moimême convaincu de toutes les qualités du modèle allemand de l’économie sociale de marché, mais j’estimais aussi que la tendance allemande à tout recadrer n’était ni correcte du point de vue des institutions ni porteuse de solutions à la crise. »
La victoire des cent jours
Mais puisque l’allemagne fait la leçon à tout le monde, Monti montre qu’il peut lui aussi, en contrepartie du soutien qu’il obtient, remettre son pays debout. pour la seule réforme des retraites, ce redressement va représenter quelque 88 milliards d’euros d’économies pour les années 2012-2021. Une réforme indispensable parce que la natalité italienne s’est dégradée au point de se situer, en 2010, à un taux de fécondité de 1,46 contre 2,03 pour les français (et qui sera de 1,27 contre 1,86 neuf ans plus tard) ; une réforme urgente parce qu’il faut alléger la pression des marchés financiers sur les finances du pays.
La loi sur les retraites est datée du 22 décembre 2011. elle porte deux noms : ceux du président du conseil et d’elsa fornero qui expliquera : « Cette réforme a vu le jour sous le signe de l’urgence, mais elle représente le point crucial d’un processus de restructuration qui a placé le système italien de retraite parmi les plus soutenables d’Europe. » resté dix-huit mois au pouvoir, Mario Monti dira que tout s’est joué durant les cent premiers jours, quand il a lancé le principal et réformé les retraites. Les obstacles se sont multipliés par la suite, mais l’essentiel avait été fait. La leçon qu’il tirera est à méditer :