Splendeurs et misères de la politique
De Stéphane Juvigny, Fayard, 429 p., 21,90 €.
★★★ Esthétique de la trahison,
Une élection présidentielle peut se jouer sur un détail. ainsi, le jeune président François stolon s’apprêtait à être réélu avant qu’un accident de vélo de la première adjointe au maire de Paris (en charge de la circulation…) ne provoque d’inattendues conséquences au sein de la campagne. Pour ses débuts en littérature, stéphane Juvigny signe un roman de politique-fiction, genre qui peut souffrir d’être prisonnier de ses modèles réels comme de créer des personnages imaginaires peu crédibles. Esthétique de la trahison évite ces écueils et dresse un vaste tableau des moeurs, pratiques, caractères à l’oeuvre dans ce milieu. si la conquête du pouvoir et les passions humaines n’ont pas fondamentalement changé depuis la plus haute antiquité, l’auteur les éclaire à la lumière d’éléments très contemporains.
Pouvoir des juges, osmose entre ceux-ci et la presse, émergence d’une gauche « devenue a-laïque » complaisante envers les musulmans radicaux, droite sans boussole : personne n’est épargné sous la plume de celui qui a travaillé dans des cabinets ministériels. Le constat est désenchanté – « Cette nouvelle génération de politiques, sous le masque des habits neufs, avait réussi à combiner l’efficacité ancestrale des technocrates et un usage parfaitement maîtrisé des codes médiatiques. Elle ne vibrait pas pour les idéaux démocratiques, la démocratie n’était qu’un moyen pour accéder au pouvoir » –, mais le roman enthousiasme par son rythme, son écriture nerveuse, sa construction impeccable. bienvenue dans la jungle.