Le Figaro Magazine

Patrice Franceschi La bourLingue Poétique

Écrivain pour les uns, baroudeur pour les autres, il s’est lancé dans la poésie de l’aventure et de l’exotisme, sur les traces de Blaise Cendrars, Pierre Mac Orlan et Álvaro Mutis.

- les rendez-voUs de J-r van der plaetsen

Entre une plongée chez les forces spéciales du 1er rPiMa, une visite aux combattant­s kurdes et une navigation dans les mers du sud, Patrice Franceschi a jeté l’ancre pour quelques mois. son port d’attache se situe dans une ville que traverse l’Yonne, où coexistent bâtiments en pierre de bourgogne, façades à pans de bois et toitures aux tuiles vernissées. Mais, comme ses amis sylvain tesson ou Gérard Chaliand, Patrice Franceschi est un homme qui ne tient pas en place. Entre une virée de soldat et une bordée de matelot, il s’autorise quelques dégagement­s poétiques. C’est, pour lui, une question de survie.

La poésie de Franceschi n’a rien de commun avec la rythmique ou la versificat­ion classiques. Pour exprimer ce qu’il voit et sent, il a d’ailleurs inventé une forme nouvelle, inspirée des haïkus japonais, qu’il a baptisée kor-waï. La différence entre les deux formes est aussi profonde qu’entre un octosyllab­e et un alexandrin : là

“La mer Juste la mer sur les grèves

Qui frappe

Les bateaux échoués”

où les haïkus sont composés de trois vers libres de cinq, sept et cinq pieds, les kor-waïs de Franceschi sont constitués de quatre vers et dix-sept pieds sans rimes. En apparence, c’est un détail ; en réalité, c’est comme si Descartes et ronsard faisaient irruption chez les samouraïs.

On le sait depuis Cendrars et Mac Orlan : la poésie n’est pas l’ennemie de l’action – alors que la mièvrerie est un danger mortel. Franceschi s’est engagé avec témérité sur les traces de ces poètes. « Art / Amour, Aventure / Ainsi j’ai dit j’étreindrai vrai / Et voilà… », écrit-il dans un de ses poèmes où l’on ressent, malgré la recherche d’extrême concision, la moiteur des rizières de Cochinchin­e, l’épaisseur hostile des forêts du tonkin, l’âpreté des pistes de chameliers dans le Hoggar. « Comme la mer, le désert ou la jungle, dit-il, la poésie est un des derniers espaces de liberté. » Comment lui donner tort ? son beau recueil de poèmes illustre cet alexandrin de baudelaire : « Homme libre, toujours tu chériras la mer ! »

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La phrase du livre à retenir (p. 31)
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