Écoptimistes ou écomodernistes ?
En lisant ce titre « Les Écoptimistes », nous pensions avoir trouvé le mouton à cinq pattes. Un écolo qui pense que ce n’est pas la fin du monde. Erreur. Les écoptimistes de la journaliste Dorothée Moisan (ex-AFP) sont des pessimistes de bonne humeur. Simplement, ils essayent de garder le moral et le sourire. Dans cette galerie de neuf portraits très conformes à l’anticonformisme écolo du moment, on retrouve l’humoriste de France Inter Guillaume Meurice
– il fait l’éloge de la flemme et rêve d’abolition du capitalisme ; la maire EELV de Poitiers, Léonore Moncond’huy, dont le scoutisme au ras du compost l’amène à refuser une subvention à l’aéroclub du coin parce qu’il ne faut plus donner aux enfants l’envie d’aller trop loin en consommant des hydrocarbures ; on trouve de sympathiques et hyperactifs Géo Trouvetout, diffuseurs de low-tech et de biomatériaux comme la pirogue en fibre de jute ; une glaciologue dont l’expédition féministe dans les neiges profondes du Grand Nord lui vaut le prix Shackleton (Heïdi Sevestre). Ces amis vitaminés de la « sobriété heureuse » changeront-ils la face du monde ?
Il faut bien admettre que non. Les émissions mondiales de CO2 n’ont diminué que de 8,8 % pendant le premier confinement de 2020, quand les transports et les industries étaient à l’arrêt sur presque toute la planète. Or, il faudrait qu’elles diminuent de 50 %. Il va falloir se préparer à une montée des eaux, à un réchauffement des villes, à un (désolant) affaissement de la biodiversité. Rectifions donc le titre de ce livre : les vrais écoptimistes sont les écomodernistes. Ils voient les défis à relever, et ils croient qu’on peut largement limiter les dégâts, sans prêcher la fin du capitalisme. Il aurait fallu leur laisser un peu plus de place dans ce récit, mais ils ne collent pas au profil type de Dorothée Moisan. Pourtant, il existe des partisans anticonsuméristes de l’uniforme à l’école et de l’interdiction du portable avant 15 ans, des ingénieurs écoanxieux qui préparent les centrales nucléaires de demain, des défenseurs de la chasse qui connaissent mieux la nature qu’à Paris 11e, et même des lecteurs du Fig Mag qui défendent la propriété agricole pour lutter contre l’étalement urbain. Le bobo de droite ne nie pas la nécessité de changer deux, trois trucs qui ne vont pas (euphémisme), par exemple en finir avec le plastique universel. Moisan a publié jadis Les Plastiqueurs. Nous disons « Bravo ! » Charles Jaigu Les Écoptimistes, de Dorothée Moisan, Seuil, 192 p., 13,50 €.