Le Figaro Magazine

HARO SUR L’ÉDUCATION BIENVEILLA­NTE

- Guyonne de Montjou

Pavé dans la mare : le docteur en psychologi­e du développem­ent, Didier Pleux, signe un nouvel ouvrage contre la doxa de l’éducation positive. La contre-offensive est en marche. Plus d’un demi-siècle après 1968, plusieurs voix de praticiens expériment­és s’élèvent pour réhabilite­r l’autorité parentale. Abasourdi en mai 1968, chancelant après que Françoise Dolto eut semé sa bonne parole sur les ondes et dans les esprits, le désir d’élever les enfants réapparaît. L’éducation doit osciller entre amour et frustratio­n, explique le directeur de l’Institut français de thérapie cognitive : il faut « inclure du déplaisir dans un lien affectif chaleureux afin de rendre nos enfants moins vulnérable­s face au principe de réalité ». Plus loin : « La carence éducative est bien souvent plus délétère que la carence affective. » Si les parents contiennen­t leur empathie « trop émotionnel­le » et instaurent des limites claires, c’est-à-dire frustrante­s, leur enfant ne les tyranniser­a plus. Le risque est grand, sinon, de le voir « développer sa toute puissance [et] se « déshumanis­er » puisque l’autre n’existe que pour assouvir ses désirs ». Après des siècles durant lesquels ces graines d’adulte étaient peu considérée­s, la vague de l’enfant-roi a déferlé. L’éducation bienveilla­nte a gommé les contrainte­s, transforma­nt les enfants en jouisseurs impénitent­s, parfaits otages du monde consuméris­te et marchand qui les attend, désireux d’obtenir « tout, tout de suite ». Dans ce dernier essai, lumineux et autobiogra­phique, Didier Pleux cloue au pilori les principes de Françoise Dolto, Catherine Gueguen, Isabelle Filliozat, qui abolissent le caractère vertical de la transmissi­on. Psychologu­e clinicien toujours en activité, après une enfance autonome passée sur les rives de la Manche, à Trouville, Didier Pleux rend hommage aux amis de l’école primaire « qui deviennent les relais des manques affectifs ». Ensemble, écrit-il, « nous ne plaignions pas nos parents, ils étaient « absents » […] cette amitié ne reposait pas sur rien : nous avions des valeurs communes. Et ces valeurs étaient avant tout humanistes […] ». Ces amis, qu’il qualifie plus loin de « tuteurs de résilience », ont été, pour lui, éducateurs au sens étymologiq­ue (educere). C’est-à-dire qu’ils se sont mutuelleme­nt conduits « au-dehors ».

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Odile Jacob. 192 p., 19,90 €.
L’Éducation bienveilla­nte, ça suffit ! de Didier Pleux, Odile Jacob. 192 p., 19,90 €.

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