Le Figaro Magazine

Raphaël QuenaRd

Vers les sommets

- Clara Géliot

D’un court-métrage à un rôle secondaire, le Grenoblois a débarqué dans le cinéma telle une bombe dont l’écho retentit dans les oeuvres des grands cinéastes comme dans des premiers films. La preuve avec le saisissant « Chien de la casse », de Jean-Baptiste Durand.

Raphaël Quenard, c’est d’abord une voix. Un accent prononcé, non identifié, qui pourrait trouver racine dans la banlieue grenoblois­e où ce fils d’un chercheur en matériaux d’isolation thermique et d’une employée de la Macif a grandi, et qui donne surtout l’impression que ce gars dégingandé a constammen­t le nez bouché. Mais Raphaël Quenard, c’est aussi une gueule. Selon les personnage­s à qui il prête ses traits, son visage devient angélique, rassurant, nigaud ou menaçant. Car Raphaël Quenard, c’est surtout un talent brut, féroce, qui s’ajoute à une présence remarquabl­e et une intensité que l’on pourrait rapprocher de celle d’un Jim Carrey ou d’un Patrick Dewaere. Voilà pourquoi il n’aura pas fallu longtemps pour que ce garçon, qui s’est préparé aux métiers de footballeu­r, militaire et chimiste avant d’apprendre – comme un certain Depardieu – à poser un texte avec Jean-Laurent Cochet, tape dans l’oeil des plus grands réalisateu­rs français, de Bertrand Bonello à Michel Hazanavici­us en passant par Jacques Audiard, Quentin Dupieux ou Jeanne Herry. Résultat, en cinq ans seulement, ce jeune trentenair­e affiche un CV à faire pâlir d’envie les plus aguerris. Mais aussi humble que travailleu­r, ce passionné qui court les salles d’art et d’essai après ses journées de tournage, le jure : le projet compte plus que le reste – les grands noms, la gloire, etc. Quand il a su que le scénario de Chien de la casse, premier long-métrage de JeanBaptis­te Durand – alors totalement inconnu – pouvait lui réserver un rôle intéressan­t, il n’a donc pas ménagé ses efforts pour le décrocher. Sans prendre le temps d’ôter l’anorak orange avec lequel il a débarqué à notre rendez-vous, gonflé d’enthousias­me et de bonne humeur, il est revenu spontanéme­nt sur les prémices de ce tournage : « On peut dire que je l’ai traqué, ce réal ! Après lui avoir envoyé des messages sur Facebook, je lui ai fait parvenir les liens de mes courtsmétr­ages et, d’une relance à une autre, il a fini par m’inviter à passer des essais. » Ce que l’acteur ne savait pas encore, c’est que le Mirales, « roi d’un royaume inexistant », garçon de village hâbleur, exaspérant, dominateur, pathétique et cultivé était un rôle en or qu’il parviendra­it, face au délicat Anthony Bajon, à sublimer.

À quand un grand méchant ?

Et s’il déploie dans ce premier premier rôle une pureté et une force indéniable­s, dans Je verrai toujours vos visages, le film de Jeanne Herry, Raphaël Quenard emporte, en une scène partagée avec Adèle Exarchopou­los, tout le film et domine un casting tenu par les stars du moment. Avant la fin de l’année, il est attendu dans pas moins de sept longs-métrages ou séries. Après Fumer fait tousser, on le retrouvera une nouvelle fois chez Dupieux (Yannick, avec Pio Marmaï) ; il frottera son humour naturel à celui de Jean-Pascal Zadi dans Pourquoi tu souris ? de Christine Paillard et Chad Chenouga, avec aussi Emmanuelle Devos ; il aura une place dans une minisérie Arte de Laetitia Masson et une de choix dans un film d’escroqueri­e produit par Netflix et réalisé par Jérémie Rozan. Une façon d’aborder un pan de travail dont cet inconditio­nnel du Comte de Monte-Cristo rêve : jouer les vrais durs. « Edmond Dantès ayant été récemment pris par Pierre Niney, j’aimerais incarner des méchants hauts en couleur comme Raspoutine, Bruno Sulak ou Christophe Rocancourt et dévoiler cette part sombre qui est en moi car rien de ce qui est humain ne m’est étranger. »

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Chien de la casse, de Jean-Baptiste durand (en salles le 19 avril).

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