“ARIODANTE” D’HIER ET D’AUJOURD’HUI
L’intrigue, comme souvent avec les opéras baroques, était un peu alambiquée. Robert Carsen, pour mettre en scène l’Ariodante de Haendel *, a donc opté pour la simplicité et l’efficacité : le drame se déroulera dans les alcôves, chambres, bureaux et pièces d’apparat d’un château. Ici, les ateliers de l’Opéra ont superbement réalisé cet environnement, dans de très modernes tonalités de vert. Carsen, quant à lui, joue à mélanger les époques : on a l’impression d’être dans un siècle passé quand soudain les choeurs apparaissent, déguisés en une meute de journalistes bien d’aujourd’hui. En rendant l’histoire plus limpide, il a facilité sa lecture pour le spectateur, tout en se préservant le plaisir de le prendre parfois à contrepied grâce à d’ingénieux effets de mise en scène et autres anachronismes gaguesques. Les chorégraphies de Nicolas Paul s’inscrivent dans le même esprit, mêlant des pas baroques à des mouvements contemporains.
Créé en 1735 pour l’inauguration du Covent Garden, cet opéra baroque était, comme beaucoup d’autres, tombé dans l’oubli jusqu’à la renaissance du genre dans les années 1970. L’excellent orchestre The English Concert fait ses débuts à l’Opéra de Paris. Sur scène, la distribution est tout à fait exceptionnelle, à commencer par Emily D’Angelo dans le rôle d’Ariodante, autrefois tenu par un castrat. Cette mezzo canadienne donne à voir et à entendre, allongée sur le devant de la scène, une des plus belles interprétations de l’aria du deuxième acte. Assurément un sommet de l’art lyrique. Opéra Garnier, Paris 9e, jusqu’au 20 mai.