MASSON, LE BÂTISSEUR
Rien ne laisse indifférent chez lui : ni son oeuvre, d’un éclectisme rare, ni sa personnalité, riche et complexe. Ce qui frappe d’abord chez André Masson, c’est la diversité de sa palette. La puissance évocatrice de ses forêts, mais aussi la finesse de ses scènes d’intérieur ou l’audace de ses dessins érotiques, donnent le ton de la passionnante rétrospective proposée actuellement par le Centre Pompidou-Metz *.
Attiré par les expérimentations, l’ami d’André Breton et d’Antonin Artaud s’est vite illustré par sa volonté d’explorer des territoires inconnus. À l’image de ses peintures de sable, faisant la part belle à l’automatisme. D’autres compositions, réalisées au cours de ses voyages, enrichissent l’ensemble. On retient notamment ses corridas et ses caricatures politiques exécutées en Espagne, voire ses représentations de végétaux immortalisées en Martinique. Sans oublier sa passion pour les mythes ou ses hommages à la résistance. Issus des plus grandes institutions françaises et étrangères, ses tableaux offrent une superbe occasion de comprendre la manière dont se sont construites sa perception du monde et sa façon de la traduire en formes et en couleurs. Grièvement blessé en avril 1917 lors de l’offensive
nd du Chemin des Dames, il gardera toujours en mémoire cet événement tragique, tout comme les atrocités que le sort mit sur sa route au cours du conflit. Et d’évoquer, bien des années plus tard, un « moi saccagé » qu’il tentera d’apaiser dans ses travaux. Il est aussi question de ses premières influences : Cézanne, Gauguin, Saurat, dont il effectua des reproductions pendant son apprentissage. Aucun détail ne manque sur sa découverte fondamentale du cubisme sous l’impulsion du marchand Daniel-Henry Kahnweiler (Picasso, Braque, Gris, Léger…). Un superbe parcours, élaboré par la présidente des lieux Chiara Parisi à l’occasion du centenaire du Manifeste du surréalisme, grâce auquel on en sait plus parallèlement sur le sculpteur, le décorateur de théâtre, le critique d’art, le poète, l’écrivain… Pierre de Boishue
* « André Masson, il n’y a pas de monde achevé », jusqu’au 2 septembre.