Alexandre Couillon, cuisinier de l’année
Alexandre Couillon, chef du restaurant La Marine à Noirmoutier, vient d’être sacré « cuisinier de l’année », dans l’édition 2017 du guide Gault et Millau.
Le Journal du Pays Yonnais : Quelles ont été vos premières impressions lorsque vous avez reçu cette nouvelle distinction ?
Alexandre Couillon : Une immense joie, bien sûr. Mais surtout de la fierté. J’ai pensé à mon maître d’apprentissage, sans qui je ne serais rien aujourd’hui. Mais j’ai aussi pensé à mes parents et à ma femme, Céline, qui me soutient et m’aide depuis toutes ces années. J’ai aussi ressenti une grande humilité, en me rendant compte que j’appartenais à la même catégorie que de grands noms comme Troisgros, Robuchon et Roellinger. Autant de chefs illustres de la Cuisine française, qui ont toujours été des modèles pour moi. Mais de là à penser qu’un jour, mon nom viendrait compléter ce prestigieux palmarès…
Qu’ont voulu mettre en avant les rédacteurs du Gault et Millau, en vous décernant ce titre de « cuisinier de l’année » ?
Ils ont bien compris et apprécié la cuisine que je pratique depuis mes débuts. Une cuisine sincère, bien ancrée à Noirmoutier. Elle ne peut pas être réalisée ailleurs ! C’est une cuisine « du marché ». Chaque jour, j’utilise des produits locaux différents. Je cultive moi-même mes légumes dans mon potager. Les poissons sont livrés chaque matin par mon propre bateau. Le Gault et Millau a particulièrement aimé la façon dont je les cuisine, en les gardant vivants le plus longtemps possible. Ils ont apprécié ma cuisine proche du terroir, qui ne reproduit pas des plats existants. Je préfère les inventer dans l’instant, à l’instinct. Je n’aime pas les fioritures.
« On a aussi fait zéro couvert »
Quel a été votre parcours ?
Un parcours semé d’embûches ! En 1999, j’ai repris le restaurant de mes parents, que j’ai rebaptisé La Marine. Avec ma femme, nous avions 22 et 23 ans. Tout n’était pas simple, il a fallu s’adapter et ne pas baisser les bras. Au début, nous ne vendions que quelques soupes de poissons aux touristes de passage sur l’île. On a même fait zéro couvert certains soirs de juillet ! Pendant huit ans, nous avons bien galéré. La première étoile du guide Michelin, en 2007, nous a motivés à continuer de tracer cette voie d’une cuisine atypique. Ce qu’a confirmé la deuxième étoile de 2013.
Ce titre de « cuisinier de l’année » est donc pour vous un aboutissement ?
Aboutissement, non, car je ne compte pas m’arrêter en si bon chemin ! Comme pour le précédent titre de « Grand de demain », décerné en 2008 par le Gault et Millau, celui-ci représente la suite logique de mon parcours. Il est l’expression d’une certaine maturité. Et surtout, il rend aussi hommage à mon équipe et aux artisans locaux, qui sont les ingrédients indispensables pour ma cuisine. Je me considère avant tout comme un bâtisseur, qui construit patiemment son oeuvre, en cherchant à la faire évoluer, autant qu’à la pérenniser.
« Je garde la tête froide »
Depuis septembre dernier, le documentaire, disponible sur Netflix, vous a permis d’avoir une stature internationale…
Cela avait déjà commencé avant, mais il est vrai que ce documentaire a permis à ma cuisine de s’ouvrir à de nouveaux horizons. Je reçois dans mon restaurant de plus en plus de clients étrangers, qui ont été attirés suite au visionnage de ce documentaire. Mais je peux vous assurer que je garde la tête froide !
Quels sont vos projets immédiats ?
Je vais sortir un livre en novembre, intitulé Marine et Végétale, écrit avec un journaliste de Libération. Un ouvrage dans lequel je retrace mon parcours, tout en proposant 25 recettes richement illustrées. Actuellement, nous sommes pris par le chantier d’un hôtel de cinq chambres, qui doit ouvrir en mai prochain.