L’avenir inquiétant de Michelin
Gel des investissements, gel des embauches. L’usine Michelin de La Roche-sur-Yon appuie sur le frein pour les deux ans à venir. De quoi inquiéter la CGT qui craint pour l’avenir du site.
Douche froide pour les syndicats de l’usine Michelin. Le projet skipper du Bibendum se dégonfle à vue d’oeil. Le plan de route qui prévoyait de positionner le site yonnais en champion d’Europe sur le marché du pneu haut de gamme pour poids lourds a pris du plomb.
Vendredi 2 février, la direction a annoncé son intention d’abandonner l’objectif de produire 1,2 million de pneus à l’année. Conséquence, les 13 à 15 M € d’investissements prévus pour 2018 sont gelés. Tout comme les embauches. Pour 2019, le bonhomme Michelin devrait suivre le même régime.
Marché en panne
La cause ? Des prévisions peu réjouissantes sur le marché du
poids lourd. « On ne prévoit pas de croissance forte en Europe, dans les années à
venir », s’est justifié le quartier général de Clermont-Ferrand, par la voix de sa responsable de la communication, Pascale Audibert.
Ce qui explique la révision à la baisse des objectifs de production ramenés à 850 000 pneus annuels. Et pour cela, « plus besoin de faire tourner l’usine 7 jours sur 7 ». D’où la pause dans les recrutements, après les vagues d’embauches qui ont fait passer les effectifs de 636 salariés en 2014 à 787 aujourd’hui. « On se laisse du temps avant de recruter et on ne s’interdit pas de le faire dans les mois à venir. Mais clairement, on ne sera plus sur des campagnes massives comme on a pu le faire auparavant. »
Compétitivité
Pour cause, l’arrivée de près de 500 nouvelles têtes depuis
2014 aurait quelque peu déstabilisé l’usine yonnaise. Le remplacement des plus expérimentés par des débutants aurait eu un
impact sur la productivité. « Les commandes étaient là, mais on n’a pas réussi à fournir assez, assure Pascale Audibert. On a un problème de compétitivité sur cette usine ».
Avant d’engager de nouveaux investissements, la direction demande du temps, « pour que l’usine soit de nouveau rentable ». Et arriver à un « coût façon » (coût de fabrication d’un pneu) inférieur à celui pratiqué actuellement.
Fuite des machines
Le genre de nouvelles qui a le don d’affoler les syndicats. Notamment la CGT qui garde en tête la liquidation des 760 postes de l’usine de Joué-les-Tours en 2013. Ou le coup de canif dans le projet skipper en 2015.
Depuis, la CGT reste méfiante. Et ne peut s’empêcher de voir dans le transfert de quatre machines yonnaises
vers l’Espagne et la Roumanie, un signe de mauvais
augure. « Comment l’usine de La Roche pourra s’en sortir si le marché mondial repart, sans son matériel et sans personnel formé. N’est ce pas tout simplement une délocalisation de la production poids lourds ? » s’interroge Anthony Guilloteau, délégué CGT.
Suppression de postes
De même, la CGT s’inquiète pour le personnel. Avec un retour de la production équivalente à 2015 (860 000 pneus), date à laquelle l’usine comptait 635 salariés, se pose la question des effectifs. « La CGT a demandé quel est l’effectif du site prévu dans les années à venir et l’impact sur les embauches. A ce jour, aucun chiffre ne nous a été communiqué. » Alors même que des suppressions de postes se profilent pour les techniciens, collaborateurs et cadres.
« 4 x 8 réactifs »
Quant à la réorganisation du temps de travail, les doutes persistent : « La direction nous à montrer des hypothèses de travail basées sur le 3 x 8 pour les équipes de fin de semaine de Vannes et d’un 4 x 8 sur la cuisson. » Depuis les salariés, usés par les « 4 x 8 réactifs », particulièrement éprouvant pour la vie de famille, sont dans l’attente. « On a demandé la tenue d’un comité central extraordinaire sur l’avenir de La Roche et des autres usines Michelin qui travaillent avec nous. » Pour, espère Anthony Guilloteau, obtenir des réponses aux inquiétudes.