Le Monde du Camping-Car

Corrèze : balade dans les jardins de Colette.

- Texte : Patrick Géraud

Pour son dixième anniversai­re, découvrons à Varetz, près de Brive-la-Gaillarde, un parc de cinq hectares qui évoque en six jardins l’oeuvre de la romancière. C’est un bouquet de couleurs où botanique, littératur­e et jeux pour enfants se marient. Puis, nous irons à Brive pour savoir pourquoi cette ville est gratifiée de “gaillarde”.

Explorer ces jardins, c’est un peu parcourir la France au gré des déménageme­nts et des coups de coeur de l’auteure des Claudine. Des tables de lecture délivrent des extraits de ses oeuvres associés aux différents jardins et un panneau indique leur situation géographiq­ue. La visite débute par la Bourgogne, où Sidonie-Gabrielle Colette passa son enfance à Saint-Sauveuren-Puisaye entre 1873 et 1891. C’est là que grandit son amour pour la nature. Lorsque sa famille quitte cette maison “craquante comme un pain chaud”, elle perd un petit coin de paradis fleuri entouré de verger et potager. Le jardin de l’enfance, reconstitu­é ici, voit la floraison d’anémones du Japon, de glycines de Chine et de bien d’autres fleurs écloses aux couleurs de l’été. Nous découvrons son potager qui donne de belles tomates bleues, des potirons ou des piments mandarine… Un sentier conduit dans un parc boisé peuplé de feuillus, de peupliers blancs, de merisiers comme celui de sa résidence des Monts-Boucons, en Franche-Comté. Elle s’y installe en 1900 au moment où paraît le livre Claudine à l’école sous le nom de son mari Willy, qui signe sans vergogne les oeuvres de sa femme. Elle a retrouvé un paradis où elle commence l’écriture de La Retraite sentimenta­le.

Jardins merveilleu­x

En 1905, son amour pour Willy se fane. Elle quitte la propriété et le couple divorce. Dans les jardins, une dizaine de jeux géants sont en accès libre pour amuser petits et grands. L’école buissonniè­re est permise, les marelles sont gigantesqu­es, les mikados démesurés et le jeu de quilles… finlandais. Un jeu d’adresse où l’on perd la boule pour un bâton. En 1910, Colette gagne la villa de Rozven à Saint-Coulomb – près de SaintMalo – avec son amie Missy, la duchesse de Morny. Dans cette parcelle que nous traversons, bruyères, chardons et granit s’acoquinent. Des petites cabines de plage blanc et bleu rappellent la Bretagne qu’elle mentionne dans son livre Le Blé en herbe. Chemin faisant, nous voici sur les terres qui suggèrent celles de Castel Novel – situé non loin de là, à Varetz même. Des allées, on aperçoit l’une des tours du château qui abrite maintenant un hôtel-restaurant. Colette y séjourna souvent, de 1911 à 1923, après avoir épousé Henry de Jouvenel, héritier de ce bien familial. Elle en parle avec ravissemen­t : « Les murs pétillent de lézards et sont blonds d’abeilles […]. Le rosier blanc de la façade est si blanc de fleurs qu’il trace la nuit une voie lactée. » Ici, les saules plantés en parterre font revivre ceux présents à l’époque de ses villégiatu­res. Les narcisses rivalisent de beauté avec crocus, hortensias et jacinthes. À travers les blés,

une allée de galets nous accompagne jusqu’à… la Côte d’Azur et Saint-Tropez, “patrie des beaux pêcheurs”, comme elle l’écrit à une amie. En 1926, elle y achète une maison dans le Var qu’elle baptise la Treille Muscate. Nous devinons, parmi les oliviers, les lavandes papillon et les pins parasols, la Méditerran­ée qu’elle voyait de sa terrasse. Une roseraie rappelle l’amour de Colette pour ces fleurs. Aujourd’hui une rose porte son nom, la “rosa Colette” créée par le rosiériste Meilland en 1994. Elle se colore sans faire de choix marqué entre le rose saumon et le corail et s’ouvre de juin à septembre. En 1938, elle élit domicile au Palais-Royal à Paris. De sa fenêtre, elle contemple un jardin à la française, composé de deux allées de tilleuls, recréé ici en une élégante perspectiv­e. C’est dans cet appartemen­t qu’elle composa le livre Pour un herbier, qui assemble des portraits de fleurs. La visite se termine par un jeu dans un labyrinthe en forme de papillon de 5 000 m2 en saule tressé. Il porte le surnom de la fille de Colette : Bel-Gazou, qui signifie en provençal “beau gazouillis”. Il y a cinq portes à ouvrir avec un mot de passe. Un livret aide, petits et grands, à trouver les différents sésames en répondant aux questions relatives à l’oeuvre de cette immense femme de lettres qui sut très tôt que l’amour porté aux personnes et aux fleurs les rend plus belles encore.

Brive, la courageuse

“Brive, la gaillarde, la fortifiée, la courageuse, je vous donne des privilèges de ville libre.” Par cette lettre du roi Philippe VI de Valois, libellée en 1347, la ville obtient des privilèges en récompense de sa bravoure pendant la guerre de Cent Ans et gagne ainsi sa glorieuse épithète. Vu du ciel le centre-ville dessine un coeur, sym- bole de générosité que la profusion des produits du terroir ne dément pas. On les retrouve sous la halle Georges-Brassens en écho à sa chanson Hécatombe, qui narre l’histoire d’une dispute entre ménagères et gendarmes sur ce marché. Vous y croiserez peut-être Mme Danièle MazetDelpe­uch qui cuisina pendant deux ans les repas de François Mitterrand à l’Élysée. Le film Les Saveurs du Palais, tiré de sa vie, est un régal. Le centre-ville foisonne de galeries marchandes, de belles façades en gré, de rues et places tranquille­s rafraîchie­s de fontaines. À chaque saison sa fête. Cet été, la quinzième édition du Brive Festival, enchantera le centre-ville transformé en un surprenant décor de plage exotique. À l’automne, les bonnes feuilles tombent à la Foire du livre du 9 au 11 novembre. Tout au long de l’année, entre alambics et chaudrons en cuivre à la distilleri­e Denoix vous dégusterez les liqueurs et apéritifs à base de… noix.

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 ??  ?? Un papillon en saule tressé s’est posé parmi les six jardins. Dans ce vaste labyrinthe, on joue à se perdre dans la vie et l’oeuvre de Colette.
Un papillon en saule tressé s’est posé parmi les six jardins. Dans ce vaste labyrinthe, on joue à se perdre dans la vie et l’oeuvre de Colette.
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