Le Monde du Camping-Car

Un balcon sur l’Atlantique

Son nom est celui d’une rivière, son qualificat­if celui d’un bord de mer. Mon tout fait 17. Ce voyage en camping-car sur les routes de Charente-Maritime révèle d’exceptionn­els belvédères, face à l’Atlantique. De la baie de l’Aiguillon à l’estuaire de la G

- Texte et photos : Didier Houeix

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’eau de la Gironde, trouble, terreuse, dissimule un monde, bien vivant, poissonneu­x. Pibales, esturgeons ont fait sa réputation. Dans la baie de l’Aiguillon, la couleur a changé. L’eau de mer qui se mêle aux sédiments des vasières est grise. Entre ces deux pôles – nord de l’Aiguillon et sud de la Gironde – l’Atlantique impose ses rythmes de marées à Royan, Oléron, Rochefort ou Charron, notre point de départ.

L’océan rythmera votre voyage, omniprésen­t, mais quelques incursions dans les terres nous feront découvrir des fortificat­ions militaires et des châteaux forts. Premiers camps de base ? Esnandes, Charron. Deux balcons sur un espace naturel protégé, où l’horizon et sa ligne font office de repère. Ici, dans la baie, les cieux sont immenses. Le soir, au coucher, levez les yeux vers les étoiles, à hauteur du port de Corps de Garde. C’est là que vous trouverez « La

Ponetère », une guinguette-restaurant, tenue par Sylvie et Patrice, posée sur le bord de la Sèvre niortaise. Les mouclades de Sylvie Costa ont une réputation que la maîtresse de maison s’applique à redorer chaque jour, aux services du midi et du soir. Elles sont préparées uniquement avec des moules de bouchot « La Charron ». Depuis des génération­s, dans la baie de l’Aiguillon, elles sont récoltées, contrôlées et conditionn­ées par des mytilicult­eurs

ddontt lle savoir-iffairei s’appuie’i sur une llongue tradition. Réputées pour leurs qualités gustatives, elles se récoltent du début de l’été à la fin de l’automne dans cette baie, réserve naturelle devenue, sur 5 000 ha de vasières et prés-salés, le domaine privilégié d’oiseaux hivernants et migrateurs.

Un pont pour les Demoiselle­s de Rochefort

Des migrateurs, les forains de la troupe d’Étienne – Georges Chakiris – le sont aussi. Lorsque Jacques Demy tourne « Les Demoiselle­s de Rochefort »… à Rochefort, il imagine la première scène sur le pont transborde­ur : ce monument d’architectu­re métallique lui rappelle sa ville natale, Nantes. Au volant d’une camionnett­e bleue, Étienne descend sur la nacelle. Une musique rythmée par le piano de Michel Legrand démarre ! Les acteurs se mettent en place et dansent sur le générique. Observez bien la scène : en arrière-plan le viaduc de Martrou – celui que vous empruntere­z (D.733) pour passer d’une rive à l’autre de la Charente – était en constructi­on. On salue la prouesse technique – les drones n’existaient pas en 1966 – du cameraman qui obtient des cadrages vus des 50 mètres de hauteur du pont, aujourd’hui entièremen­t restauré. Un chantier titanesque. Pour vous donner une idée, la tour Eiffel c’est cinq millions de rivets ; pour le pont transborde­ur c’est deux millions cinq cent mille. 50 mètres plus bas, à pied ou à vélo, prenez place sur cette nacelle pour 4,30 minutes de traversée au-dessus des eaux de la Charente, à la demande, sur un simple signe au pilote. « Eh Oh ! » Pour 3 € A/R ou 2 € l’aller, la nacelle qui peut recevoir 100 personnes, vous dépose rue du Transborde­ur (Échillais) ou rue Jacques Demy (Rochefort). Étienne et sa troupe de forains l’empruntero­nt une dernière fois, dans l’autre sens. Il est plaisant de constater que cette rue, décor d’un mémorable clap de fin, est devenue le rendez-vous de nombreux camping-caristes. Sans doute guère

plus d’une nuit, ils bivouaquen­t là, au pied de grands arbres, d’une taille bien plus modeste à l’époque du film. Rochefort est à un quart d’heure de Saint-Jean d’Angles. La visite du parc de loisirs et d’histoire du château de Saint-Jean d’Angle, pour vos enfants, petits-enfants et pour les plus grands, occupe une demi-journée. Facile !

La ceinture de feu

En 1994, André Rousselot, charentais et passionné de Moyen-Âge, rachète le château. Enfin, ce qu’il en reste : il tient debout par la grâce de la végétation qui s’en est emparée. Six ans de travaux colossaux plus tard, en coopératio­n avec les Monuments de France, et le château rouvre ses portes. « Dès le départ, je souhaitais une visite ludique destinée aux enfants, à la famille. Ainsi, avec le ticket d’entrée, vous pouvez enfiler un costume.» Précisons que le papa d’André fonda le musée Grévin de La Rochelle. Histoire de France et plaisir de jouer, associés ; la formule fonctionne. Tout est fait pour car le programme est riche. Visite du château, de la maison paysanne, du potager médiéval, de la motte castrale, chamboule tout et billard, tir à l’arc et parcours pieds nus, clairière magique Mélusine, parcours disc golf… Comme le précise l’accueil, c’est « Plus de 3h de plaisir pour petits et grands » Et les campingcar­istes sont les bienvenus ! Mais André Rousselot n’oublie pas que nous sommes sur un site historique majeur : « Le propriétai­re de cette forteresse possédait les marais salants alentour. C’était le meilleur sel du monde. Les Anglais qui l’achetaient ont voulu s’en emparer…» Ancienne place européenne du commerce de ce sel, devenue place militaire, Brouage – 20 km à l’ouest de Saint Jean d’Angles –, étoile de pierre au coeur du marais, est un des « plus beaux villages de France ». Vous poserez votre véhicule sur l’aire de camping-car (proche de la rue du Québec) à l’entrée du village, en arrivant de Rochefort par la D3. Brouage, ancien port de la côte Atlantique, sera fortifié sur ordre de Richelieu. Rues alignées au cordeau, corps de garde et poudrière, habillée de pierre et remparts à angles obtus, Brouage surprend le visiteur par son aspect caserne. Rien de surprenant : les constructi­ons militaires ne manquent guère sur cette côte. Ainsi, de fort Louvois. Programmez sa visite lforsque la marée est haute. On peut s’y rendre à pied, mais l’arrivée par la mer, en chaland, au départ de Bourcefran­c-le-Chapus a un petit côté vacances, incomparab­le ! Le contexte de l’époque n’avait rien d’exotique : fort Louvois était un élément de « La ceinture de feu », destinée à défendre les arsenaux de Rochefort : le port de Brouage, ensablé, était devenu obsolète. Maillon de « la force

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 ??  ?? Sur le pont transborde­ur, Jacques Demy tourna la scène d’ouverture des « Demoiselle­s de Rochefort ». Un lieu très apprécié des camping-caristes.
Sur le pont transborde­ur, Jacques Demy tourna la scène d’ouverture des « Demoiselle­s de Rochefort ». Un lieu très apprécié des camping-caristes.
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La visite de l’église Sainte-Radegonde à Talmont-surGironde se révèle passionnan­te.

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