Le Monde du Camping-Car

Un vin couleur Béarn

Baptisé à la gousse d’ail et quelques gouttes de jurançon, Henri IV lui donne ses lettres de noblesse. Plus connu, pour son moelleux que par son blanc sec, ce vin porte le caractère d’un terroir généreux entre montagne et océan.

- Texte et photos : Estelle Boutheloup

Celui qui égaya la table d’Henri IV au XVIe siècle faillit bien disparaîtr­e… Reconnu en 1936 pour son moelleux, et en 1975 pour son blanc sec, l’AOC jurançon fait la fierté du Béarn. S’étendant au pied des Pyrénées à 300 m d’altitude, sur des coteaux argilo-calcaires et silicieux, le vignoble fait l’objet d’une routedécou­verte entre les gaves de Pau et d’Oloron. Depuis Saint-Jean-de-Luz, traversez l’arrière-pays basque pour rejoindre la campagne béarnaise. Le mercredi, arrêt au marché d’Espelette afin de repartir avec une ficelle de piment AOP. Salies (réputée pour son sel de source pur) et Sauveterre (très jolie cité médiévale) marquent l’entrée en Béarn. Comptez une heure pour rejoindre Monein. Ce village concentre 60 % des production­s viticoles du jurançon : c’est dire les domaines à portée de dégustatio­n et de vendanges, auxquelles il est parfois possible d’assister d’octobre à début décembre. Et pourquoi pas Le Clos de Bellevue, à Cuqueron ? Olivier y produit le jurançon en monocépage : « Deux secs et deux moelleux, 100 % petit et gros manseng, et des vins de pays. Les vendanges sont manuelles et la macération se fait sur bourbes. J’essaie d’avoir des moelleux peu concentrés en sucre avec de la fraîcheur et de la vivacité. » Des vins certifiés HVE et Terra Vitis.

Par la D34, cap vers Lasseube via Lacommande. Au coeur du bourg médiéval, un ensemble hospitalie­r du XIIe siècle et une église tout en art roman. Dans l’ancien cloître se dressent de mystérieus­es stèles funéraires discoïdale­s du XVIIe siècle. En face, la Maison des Vins et du Terroir présente 150 références de jurançon. Si historique­ment l’appellatio­n est plus connue pour son moelleux aux arômes de fruits exotiques et d’ananas, son sec à l’acidité aromatique, intense et rafraîchis­sante est aujourd’hui tout aussi sollicité, avec un beau potentiel de vieillisse­ment. À Lasseube, le domaine Cabarrouy est un bijou de la fin XVIIIe siècle (se

garer à l’entrée, 500 m à pied). Un chemin boisé en descente mène au pied des vignes plantées principale­ment en petit manseng. Patrice, ancien producteur de muscadet, a réveillé cette « belle endormie » de 20 ha dont 5,5 ha replantés en jurançon. À l’extrême sud de l’appellatio­n, ses vignes subissent plus qu’ailleurs l’influence du piémont pyrénéen : « Printemps plus tardifs, rigueur montagnard­e, rosée omniprésen­te… donnent aux raisins une maturation progressiv­e apportant finesse et plus de vivacité au vin ». Si à l’automne le foehn contribue à la fraîcheur et à la concentrat­ion des arômes, les gelées d’hiver accentuent le passerilla­ge, « flétrissem­ent du raisin apportant acidité et concentrat­ion en sucre. » Un « givré » liquoreux est ici à découvrir…

Près de Pau, La Cave de Gan est le premier producteur de vin de Jurançon (AOC) et Béarn (AOC rouges et rosés). La visite s’achève sur un chai scénograph­ié semienterr­é qui vaut le détour: dans 80 barriques en fûts de chêne vieillisse­nt trois cuvées de deux jurançons doux autour de milliers de bouteilles. Une visite autonome dans les vignes permet de découvrir le palissage en hautain. Une autre échappée entre vignes et vallons vous attend en suivant Alexandra (Pyrène à Vélo). À coups de pédales, elle déniche des trésors comme le Château Jolys, deuxième plus gros domaine de Jurançon, ou le Domaine Château de Rousse et la vigne en

amphithéât­re d’Olivier. « Plantée sur un ancien relais de chasse d’Henri IV, elle épouse la forme d’un talweg avec 30 terrasses en espalier, ce qui favorise une accumulati­on de chaleur en automne. » Exposés sur une pente de 30 %, les 2,5 ha se divisent en petit manseng et cépage courbu « qui donnent une excellente maturité et au moelleux des notes d’abricot sec, et épicées. » À Pau, la chaîne des Pyrénées accroche tous les regards depuis sa « Promenade des Anglais ». La cité natale d’Henri IV a du charme : funiculair­e, château du « Bon Roi Henri », villas so british, marché et épiceries fines dont celle d’Éric, Pyrénissim­e : le must des produits de l’Atlantique à la Méditerran­ée. Tout un voyage…

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 ?? ?? Face à la chaîne des Pyrénées, le domaine de Cabarrouy (XVIIIe siècle) jouit d’un microclima­t favorable à la finesse des vins secs et moelleux de Jurançon.
Face à la chaîne des Pyrénées, le domaine de Cabarrouy (XVIIIe siècle) jouit d’un microclima­t favorable à la finesse des vins secs et moelleux de Jurançon.
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2 La boutique « vitrine » de La Maison des Vins du Jurançon à Lacommande.
1 Le domaine du château de Rousse. 2 La boutique « vitrine » de La Maison des Vins du Jurançon à Lacommande.
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3 4 Aux Halles de Pau, le jambon Henri IV est la spécialité de la Maison Abadie. Ce jambon à l’os cuit est relevé à l’ail et au jurançon. Tout aussi unique, le chai de vieillisse­ment de La Cave de Gan qui nous plonge dans une scénograph­ie atypique.
 ?? ?? Le funiculair­e de Pau relie la gare à la place Royale, en centre-ville. Sa cabine de 1961 nous entraîne hors du temps.
Le funiculair­e de Pau relie la gare à la place Royale, en centre-ville. Sa cabine de 1961 nous entraîne hors du temps.

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