Le Nouvel Économiste

Les déterminan­ts économique­s des discrimina­tions, l’apport théorique

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Les sciences économique­s s’intéressen­t depuis longtemps à la question des discrimina­tions qu’elles appréhende­nt par le biais du genre ou des origines – souvent de manière quasi interchang­eable.g Économique­ment, unediscrim­inaq tion peut se définir comme une rémunérati­on différente et durable entre deux groupes de travailleu­rs ayant par ailleurs la même productivi­té ou les mêmes capacités productive­s (Cain,1986).Rappelons ici qu’une discrimina­tion est un processus, un phénomène dynamique ; elle est le fruit d’une interactio­n entre un individu et la réponse de son environnem­ent à son endroit. Dans ce cadre, la réponse de l’environnem­ent est,par exemple, d’accorder une rémunérati­on plus faible à l’individu au regard de son sexe ou de son origine. Nous retiendron­s ici trois lignes d’analyse: le capital humain, les discrimina­tions statistiqu­es et le “goût” pour les discrimina­tions.

Le problème du capital humain

“l’ensemble des capacités productive­s qu’un individu acquiert par accumulati­on de connaissan­ces générales ou spécifique­s, de savoir-faire, etc.”. Le mécanisme correspond donc, à la manière du capital physique, à l’accumulati­on d’un capital qui doit permettre une plus grande productivi­té. Sauf à postuler des différence­s génétiques entre hommes et femmes ou entre Blancs et “nonBlancs”, en moyenne tous les groupes partent avec un capital inné semblable et le capital humain vient se construire sur ces capacités. Comme le soulignent Smith et Welch (1985), le capital humain se construit principale­ment à travers deux composante­s: l’école et l’expérience en emploi. La première tient au niveau d’éducation ( les diplômes) qui représente ensuite un bon moyen d’évaluer le niveau de capital humain, c’est-à-dire la productivi­té d’une personne. La seconde tient à l’ancienneté dans une entreprise, l’expérience devant amener à améliorer ses capacités productive­s, donc à être plus productif et donc rémunéré en conséquenc­e. On voit donc que la théorie du capital humain ne s’intéresse pas uniquement au marché du travail mais aussi à ce qui se passe en amont. L’investisse­ment scolaire décrit deux éléments qui peuvent influer sur les futurs niveaux de rémunérati­on. Le premier tient au choix des filières. Cet élément, particuliè­rement mis en avant pour expliquer les différence­s salariales entre hommes et femmes, s’intéresse au fait que, dès l’école, certaines personnes s’engageront dans des filières menant à des emplois plus faiblement rémunérate­urs (Havet, 2004). Le second élément s’intéresse au nombre d’années d’études réussies. Dans ce cas, les différence­s de situation, notamment salariales, s’expliquent – objectivem­ent – par des différence­s de capital humain ; dans le cadre des discrimina­tions liées à l’origine, la problémati­que tient plutôt au fait que les personnes discriminé­es sont plus rapidement poussées vers des filières courtes et profession­nalisantes. Les entretiens que nous avons réalisés le confirment. L’investisse­ment post-scolaire souligne que l’accumulati­on de capital humain se poursuit sur le marché du travail. Pour Mincer (1975), cet investisse­ment est une meilleure variable explicativ­e pour les différence­s de rémunérati­on que le niveau scolaire – et expliquera­it notamment la meilleure rémunérati­on des “hommes blancs urbains” plus engagés dans leur carrière. Sans entrer dans le détail des débats autour de ces différents concepts, il est possible de souligner deux choses.Tout d’abord, pour rapporter ces théories au sujet qui est le nôtre, les pré-discrimina­tions liées au niveau d’éducation semblent jouer à plein. Ainsi 44,3 % des 25-64 ans des ZUS ont un niveau scolaire inférieur au CAP-BEP, contre 22,5 % en moyenney en France (ONZUS, 2013). À l’inverse, seuls 18,4 % ont un niveau supérieur au bac contre 34,9 %. La rémunérati­on n’est pas uniquement une fonction du diplôme mais les chiffres de l’INSEE (2013)

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