Paris, place financière régionale
Euronext bientôt hors du jeu boursier mondial
Dans l’état actuel des technologies de transactions, il n’y a plus place que pour quatre grands opérateurs boursiers dans le monde, deux aux États-Unis, un en Europe et un en Asie. Dans une troisième tentative depuis 2000, le London Stock Exchange (LSE) et Deutsche Börse, qui ont annoncé un mariage entre égaux, créeraient l’opérateur européen de la bande des quatre pesant plus de 25 milliards d’euros. Certes, la partie n’est pas terminée, puisque l’un des deux opérateurs américains, l’Intercontinental Exchange (ICE), réfléchit à une contre-offre sur le LSE. Mais de toute évidence, quelle que soit l’issue de cette phase actuelle de consolidation, Euronext, qui regroupe les bourses de Paris, Amsterdam, Bruxelles et Lisbonne, et qui capitalise moins de 3 milliards d’euros, sera marginalisé. Et “Paris place financière internationale” ne sera plus qu’un slogan du passé, ce qui est bien fâcheux et bien dommage. D’abord bien fâcheux, même si le plus grand nombre en France se rallierait volontiers au point de vue d’une économiste anglaise de Cambridge, amie de Keynes, Joan Robinson, pour qui “When Industry leads, Finance follows”. Autrement dit, la finance n’est bonne qu’à mettre de l’huile dans les rouages de l’industrie pour la faire fonctionner, mais elle n’est pas essentielle, ce à quoi s’opposera violemment Joseph Schumpeter en écrivant dès 1911 que “les services que rendent les intermédiaires financiers sont essentiels pour provoquer, faciliter, accompagner les innovations technologiques et le développement économique”. Cette position a été confirmée par les recherches académiques les plus récentes qui montrent qu’il existe un parallélisme certain entre la croissance économique d’un pays et le niveau de développement de son système financier. Ensuite, cette issue concernant Euronext, élément essentiel de l’écosystème financier français, est bien dommage, car Euronext fut naguère en passe de devenir l’une des premières plateformes mondiales de transactions, à la suite de la fusion entre Nyse et Euronext en 2007, puis du rachat du marché d’options LIFFE sis à Londres, de la chambre de compensation LCH Clearnet, et du rapprochement envisagé entre cet ensemble et Deutsche Börse en 2011/2012, qui fut enrayé par la décision des Autorités de la concurrence de Bruxelles. Il faut reconnaître que l’appui des acteurs économiques et politiques français à ces développements fut bien tiède. Ce n’est pas tout le monde qui aime la finance, mais ceux-là n’auront qu’à s’en prendre à euxmêmes de voir Paris devenir une place financière régionale, comme l’était encore Lyon il y a trente ans. Maigre consolation devant le déclassement de Paris et de la France dans l’économie mondiale.
Ce n’est pas tout le monde qui aime la finance, mais ceux-là n’auront qu’à s’en prendre à eux-mêmes de voir Paris devenir une place financière régionale,g comme l’était encore Lyon
il y a trente ans.