Affacturage, la démocratisation en marche auprès des PME
Année après année, l’affacturage progresse. Mais il reste 95 % des PME à convaincre de ses bienfaits et de sa simplicité
Tiré par les grands comptes depuis la crise financière de 2008, l’affacturage se porte bien. Et même très bien. Toutefois, les PME sont encore réticentes à y avoir recours, voyant encore pour nombre d’entre elles un financement de la dernière chance. Pourtant, en améliorant la trésorerie de l’entreprise et la réduction du risque d’insolvabilité des clients, l’affacturage présente de nombreux avantages, y compris pour les petites organisations. D’autant que de nouveaux produits plus simples et mieux adaptés aux petites structures font leur apparition.
SOPHIE SEBIROT
Bien que ralentie, la croissance de l’affacturage poursuit son bonhomme de chemin. Selon l’Association française des sociétés financières (AFS), les opérations d’affacturage ont augmenté de 6,6 % pour les neuf premiers mois de 2017 contre +9,9 % sur la même période 2016. Des chiffres que corroborent les experts de Xerfi Precepta qui prévoient un bond de 10 % du chiffre d’affaires des factors en 2017, après une hausse de 9 % en 2016 à 258 milliards d’euros. Une bonne santé portée par les grandes entreprises, qui depuis la crise financière de 2008 et la contraction du crédit bancaire qui a suivi, ont conservé une ligne d’affacturage. “Certes, les grands comptes tirent le volume d’affacturage vers le haut, mais selon l’étude Xerfi, les PME représentent 32 % des entreprises ayant recours à l’affacturage et 35 % des volumes. Ces dernières ont contribué à la réussite de l’affacturage et demeurent notre coeur de cible historique”, précise
Claude Valade, directeur général
de Natixis Factor. “L’affacturage était destiné au départ aux PME. Il s’est par la suite développé sur une clientèle grands comptes”, confirme Béatrice Collot, directrice du trade et de l’affacturage chez HSBC.
Pourtant, le nombre de petites structures qui y ont recours, rapporté au nombre total des TPE/ PME françaises, reste minime. Un constat confirmé par la profession. “On estime que près de 3 % de l’ensemble des PME et 1 % des TPE françaises ayant des besoins de trésorerie à court terme ont recours à une solution de financement de leurs factures clients, contre 10 % au Royaume-Uni. Il n’existe aucune raison objective pour que les PME françaises n’aient pas les mêmes besoins que leurs consoeurs britanniques”, estime Eugénie Aurange, directrice du développement des marchés et de la communication chez Crédit Agricole Leasing & Factoring (Cal&F). Un fait qui s’explique notamment par la mauvaise image dont souffre l’affacturage et qui semble perdurer. “Il y a 15 ans, l’affacturage était considéré comme l’ultime solution par les PME, parce que certaines d’entre elles y avaient recours très tard, voire trop tard”, explique Claude Valade. “Le nombre de TPE/PME qui ont recours à l’affacturage augmente ; ceci étant, il y aura toujours des sociétés qui ne verront dans l’affacturage qu’un financement de la dernière chance”, tempère Sébastien Ferdinand, directeur des relations clientèle chez BNP Paribas Factor.
Un levier de développement
Que ce soit pour des besoins de trésorerie immédiats, une meilleure gestion du poste client ou une diminution des risques d’impayés, les atouts de l’affacturage sont nombreux. “Les PME françaises souffrent de la manière dont fonctionne l’économie française. 14500 entreprises disparaissent chaque trimestre faute de trésorerie, alors que le plus souvent leur carnet de commandes est plein”, déplore Eugénie Aurange. Or, l’affacturage constitue une source de financement à court terme pour
La bonne santé de l’affacturage est portée par les grandes entreprises, qui depuis la crise financière de 2008 et la contraction du crédit bancaire qui a suivi, ont conservé une ligne d’affacturage
“La guerre des prix existe et les prix ont
tendance à être tirés vers le bas. Nous proposons des forfaits à 240 euros
par mois.” Béatrice Collot, HSBC.
les entreprises. “L’affacturage est le premier financement à court terme sur un actif et le deuxième concours bancaire, si l’on tient compte de l’utilisation du découvert”, affirme Sébastien
Ferdinand. “Nous offrons un plafond de financement en adéquation avec les besoins du client et nous sommes en capacité de mobiliser jusqu’à 90 % du poste client au moment où notre client en a le plus besoin”, insiste Béatrice
Collot.
L’affacturage permet également à l’entreprise de se protéger contre
le risque d’impayés. “Le paiement des factures n’est pas toujours suivi suffisamment par les TPE/PME faute de temps. Or le défaut de paiement peut entraîner la faillite d’une société. Externaliser la gestion des factures grâce à l’affacturage permet d’être certain que l’on sera payé”, indique
Béatrice Collot. “En nous chargeant du recouvrement des créances de nos clients, nous les aidons à optimiser leur poste clients, et donc à bénéficier d’une meilleure notation de la part de la Banque de France”, confirme Eugénie Aurange. D’autant que les factors s’intéressent davantage à la solvabilité et à la qualité des clients des TPE/PME, qu’à leur situation. “Les avantages de l’affacturage sont nombreux : le premier avantage concerne la sécurisation du BFR ; en monétisant le poste clients, les entreprises disposent de trésorerie pour leurs achats et les chefs d’entreprise peuvent se concentrer davantage sur le développement. L’affacturage permet également de mieux gérer le poste client par une relance et un recouvrement efficaces des créances de l’entreprise. Il sécurise également les ventes, puisque le chef d’entreprise sera assuré de la solvabilité de ses clients ; l’affacturage permet ainsi à une PME de s’offrir une solution qui constituerait une charge plus importante si elle était internalisée”, résume Olivier Cervera, directeur commercial de Natixis Factor. Ce dernier insiste sur le fait que les PME doivent penser à l’affacturage davantage en amont : “il constitue un levier de développement pour l’entreprise”.
Des pproduits pplus simples et plus segmentés
Aux avantages intrinsèques de l’affacturage s’ajoute désormais une multiplicité de nouveaux produits. Titillés par les fintechs venues s’attaquer à leur marché, les factors traditionnels se sont adaptés en élargissant et digitalisant leur offre. “Nous avons développé différents produits simples, fluides et rapides qui peuvent être financés dans les 24 heures. Pour les créateurs d’entreprise, nous avons mis en place des forfaits. Nous disposons de services digitaux ouverts 24 heures sur 24 et 7 jours sur 7. En 2018, nous mettrons en place la signature électronique”, indique Sébastien Ferdinand chez BNP Paribas Factor. Crédit Agricole Leasing & Factoring vient de son côté de lancer le produit Cash in Time. “Le dirigeant scanne sa facture sur son téléphone mobile et reçoit une réponse immédiate. Il est destiné notamment aux PME qui n’ont pas la taille critique
pour disposer d’un service de recouvrement interne”, explique Eugénie
Aurange, qui poursuit : “l’enjeu est de disrupter le marché pour répondre aux besoins des PME”. “Les nouveaux outils de diagnostic que nous proposons, tels que Activ’Tréso, permettent
de faire la démonstration aux chefs d’entreprise des vertus de l’affacturage”, souligne Olivier Cervera. Des nouveaux produits qui ont pour vocation de rendre l’affacturage
plus attractif. “Désormais, nous proposons une solution moderne qui comprend quatre métiers en un seul contrat. Cela permet aux PME de disposer des avantages d’une ETI ou d’un grand groupe”, poursuit le directeur
général de Natixis Factor. “Les raisons pour lesquelles les entreprises utilisent l’affacturage dépendent de leur taille. Elles peuvent l’utiliser pour du recouvrement de créances mais aussi pour disposer d’une ligne de crédit ou encore pour la rapidité et la simplicité du produit”, résume Sébastien
Ferdinand.
Effet démultiplicateur
Aux critiques régulièrement faites à l’affacturage concernant notamment son coût élevé, les professionnels répondent “démocratisation du produit”. “L’affacturage s’est démocratisé depuis une dizaine d’années”, souligne
Béatrice Collot. “La guerre des prix existe et les prix ont tendance à être tirés vers le bas. Nous proposons des forfaits à 240 euros par mois. En outre, le taux de commission de l’affacturage est de 1 à 3 % au début pour une TPE, mais ce taux diminuera par la suite”,
ajoute Sébastien Ferdinand. “Le forfait n’est pas forcément une solution intéressante pour la PME… Le service sera-t-il facturé à sa juste valeur ? Ce n’est pas certain”, nuance Béatrice
Collot, qui ajoute: “chez HSBC, nous préférons faire du sur-mesure en fonction de l’entreprise, car nous estimons que cela est plus transparent”.
Selon Eugénie Aurange, “l’avenir de l’affacturage réside dans son ouverture aux TPE/PME grâce à des solutions simples et rapides. Notre objectif est de financer les PME pour qu’elles puissent se développer et grandir et que cela ait un impact positif sur l’économie réelle”. Et Claude Valade de
conclure : “Nous avons 95 % de PME à convaincre”.
Titillés par les fintechs venues s’attaquer à ce marché prometteur, les factors traditionnels se sont adaptés en élargissant et digitalisant leur offre. L’affacturage s’est démocratisé depuis une dizaine d’années et le prix a considérablement baissé. En outre les pratiques se sont modifiées pour apporter plus de flexibilité et de simplicité pour le client