Épargne retraite en assurance-vie, les nouvelles lois fiscales
Même avec la flat tax à 30 % pour les contrats supérieurs à 150 000 euros, l’assurance-vie conserve ses atouts de produit d’épargne en vue de la retraite
Les intérêts des contrats d’assurance-vie seront désormais taxés au moment de leur déblocage à 30 % lorsque le montant épargné dépassera les 150 000 euros, et même lorsque le contrat aura huit ans d’existence. Malgré cette ponction supplémentaire, malgré la baisse de ses performances, l’assurance-vie et même le fonds euros reste un bon placement en vue de préparer sa retraite. Notamment grâce à sa solidité, encore renforcée par la loi Sapin 2 et la directive Solvabilité 2. Mais comme souvent, de la diversification est conseillée au travers des unités de compte, du Perp du PEA ou des SCPI.
La messe est dite. Après plusieurs semaines d’expectative, les détenteurs d’assurance-vie ont enfin été fixés sur le sort fiscal qui attendait leurs contrats. Le 27 septembrep dernier, le ministère de l’Économie a annoncé qu’à compter de ce jour, tout versement au-delà de 150 000 euros pour une personne seule, et de Les gros contrats ne verront plus la taxation de leurs intérêts baisser en deçà des 30 % comme c’était le cas avant cette date fatidique du 27 septembre. 300000 euros pour un couple, effectué sur un contrat d’assurance-vie générera des gains taxés à hauteur de 30 % au moment du rachat du contrat, c’est-à-dire lors du déblocage des fonds investis, même après 8 ans de détention. Auparavant, la taxation était dégressive en fonction de la durée de détention du contrat : 50,5 % pour moins de quatre ans, de 30,5 % entre quatre et huit ans et de 23 % au-delà. Pour résumer, les gros contrats ne verront plus la taxation de leurs intérêts baisser en deçà des 30 % comme c’était le cas avant cette date fatidique du 27 septembre. “Fatidique”, vraiment ? Cette nouvelle façon de taxer l’assurance-vie va-t-elle vraiment changer la donne pour le placement favori des Français ?
Un impact mesuré
A priori, pas vraiment. D’abord parce que ce plafond de 150 000 euros est restrictif. Selon une étude de l’Observatoire permanent de la banque, de l’assurance et du crédit (Operbac), réalisée par l’Institut CSA auprès de 8007 personnes en 2015, le montant moyen des sommes investies en assurance-vie se situe à 10 700 euros chez les 25-34 ans. Il atteint 31 500 euros pour les 45-54 ans. Les 65-74 ans détiennent en moyenne 58 700 euros sur leur contrat tandis que chez les 75 ans et plus, le placement s’élève à 63 000 euros en moyenne. Donc seul le haut du panier est véritablement touché par la réforme. Même s’il est improbable de voir un jour les
détenteurs d’assurance-vie bloquer le pays, le gouvernement pouvait difficilement tous se les mettre à dos… Ils sont tout de même 37 millions. Le fait que seuls les intérêts soient taxés a aussi tendance à amoindrir l’impact de la réforme. “La performance des contrats dépend des supports investis. Un contrat exclusivement en fonds en euros pourra être moins performant (surtout depuis ces dernières années) qu’un contrat en unités de compte. La différence de taxation pourra donc être marginale si le contrat a été peu performant”, analyse Maryline Lourenço, juriste Patrimonial Fiscal de Cholet Dupont. L’impact de la réforme devrait donc rester mesuré, d’autant que l’assurance-vie conserve tous ses avantages. “Elle permet de gérer tout ou partie de son patrimoine financier dans une enveloppe fiscalement favorable, et notamment de diversifier ses actifs entre différents produits et gestionnaires, au sein d’un même contrat, explique Sabine Jiskra, responsable de la gestion de fortune chez l’Institut du Patrimoine. Elle permet aussi de profiter de la rémunération de l’actif en euros qui offre encore une performance positive, supérieure au rendement du monétaire, et reste sans risque en termes de capital. Elle permet également d’effectuer une épargne régulière dans un bon environnement fiscal et de faire des retraits à la carte, immédiats ou à terme. Enfin, elle facilite la transmission des capitaux décès aux membres de sa famille ou à tout autre bénéficiaire en limitant les droits à payer.” Le risque de voir des hordes de souscripteurs se retirer soudainement de l’assurance-vie paraît donc limité.
Changement de destination
Cependant, si l’assurance-vie conserve tous ses attraits ou presque, elle pourrait changer de
destination. “Désormais pour un contrat de plus de 150 000 euros, il ne sera pas beaucoup plus intéressant d’attendre huit ans avant d’effectuer des
prélèvements, analyse Jean Berthon, le président de Gaipare. L’assurancevie va redevenir une épargne de moyen terme dans laquelle on aura moins
d’états d’âmes à piocher.” Or l’une des destinations de l’assurance-vie était d’aider les Français à préparer leur retraite. Il s’agissait donc d’une épargne à long terme qui pouvait potentiellement s’étaler sur des dizaines d’années. Dès lors, la barre des 150 000 euros peut facilement être passée au moment de prendre
sa retraite. “L’assurance-vie peut servir de complément de revenus lors de la retraite, les souscripteurs peuvent par exemple procéder à des rachats partiels de façon programmée ou ponctuelle”, rappelle Sabine Jiskra. Et à chaque fois qu’un tel prélèvement sera fait, il sera taxé à 30 %. “Finalement, ces rachats seront faiblement imposés”,
poursuit-elle, puisque comme nous “Désormais pour un contrat de plus de 150 000 euros, il ne sera pas beaucoup plus intéressant d’attendre huit ans avant d’effectuer des prélèvements.”
Jean Berthon, Gaipare.