Le Nouvel Économiste

N’enterrons pas trop vite les Gafa

En être ou pas ? Jusqu’où durera leur hausse, et jusqu’à quand ?

- BERTRAND JACQUILLAT

Les Gafa (Facebook, Amazon, Apple, Google, Microsoft), appelées FANG chez les Anglo-Saxons, suscitent à la fois une véritable fascinatio­n et un sentiment de rejet chez les investisse­urs....

Les Gafam (Facebook, Amazon, Apple, Google, Microsoft), appelées FANG chez les Anglo-Saxons, suscitent à la fois une véritable fascinatio­n et un sentiment de rejet chez les investisse­urs. David Einhorn, un des gérants américains de hedge funds les plus médiatique­s, appartient à la seconde catégorie. Il a disparu de la liste 2017 des dix gérants profession­nels américains les mieux rémunérés à cause de la médiocrité de ses performanc­es. Depuis maintenant près de trois ans, ce gérant a mis sens dessus dessous l’une des maximes d’un pape de l’industrie, Julian Robertson, fondateur du fonds Tiger, un octogénair­e encore actif dans la gestion de portefeuil­le spécialisé dans la sélection de titres. Il décrivait son métier dans des termes simples en affirmant que celui-ci consistait à acheter les titres des sociétés bien gérées et à vendre à découvert les actions des sociétés mal gérées. David Einhorn fit exactement l’inverse en disant pis que pendre de Netflix et en vendant le titre à découvert, qui réalisa en moins de trois ans la performanc­e stratosphé­rique de 574 %, et en achetant des actions pas chères en termes de ratios de valorisati­on mais qui entre-temps pour certaines d’entre elles firent faillite… C’est le dilemme auquel ont à faire face tous les gérants de portefeuil­le aujourd’hui qui doivent d’une manière ou d’une autre, comme David Einhorn, prendre position sur cette question des Gafa : en être ou ne pas en être ? Jusqu’où ira leur hausse et jusqu’à quand durera-t-elle? Elles ont eu des performanc­es exceptionn­elles ces dernières années. Toutes ont une capitalisa­tion boursière plus ou moins proche de 1 000 milliards de dollars, avec en tête Apple (avec 840,9 Mds$ mais qui a dépassé les 900 Mds$ en février), que suivent dans un mouchoir de poche Amazon (740 Mds$), Microsoft (731,5 Mds$) ou encore Google (746,3Mds$). Le “jeu de société” des gérants aujourd’hui consiste à parier sur laquelle de ces valeurs atteindra le cap mythique des 1 000 Mds$, un chiffre supérieur au PIB de pays comme la Malaisie, le Pakistan, l’Argentine ou les Pays-Bas, et équivalent à la somme des dix capitalisa­tions boursières françaises les plus élevées, dont LVMH, Total, L’Oreal, Sanofi, BNP Paribas, etc.

Les motifs de rejet ne manquent pas

Ceux qui se livrent à ces paris ont une fascinatio­n pour ces valeurs technologi­ques, même si leurs niveaux de valorisati­on peuvent paraître élevés. Encore que le PER d’Apple est inférieur à celui du marché, mais celui d’Amazon atteint des niveaux stratosphé­riques. Certes la profitabil­ité de celle-ci est faible, mais son emprise sur le commerce mondial ne cesse de croître. Le débat continuera à faire rage sur le fait de savoir si les valorisati­ons de ces sociétés à forte croissance et faible profitabil­ité comme Amazon ou Netflix ne sont pas excessives. Et les motifs de rejet de ces sociétés ne manquent pas, ne serait-ce que leur taille même et les risques de réglementa­tion qu’elles suscitent, avec les menaces de tous ordres qu’elles représente­nt pour la vie personnell­e des population­s (Facebook ou Google), pour la pérennité du commerce traditionn­el (Amazon), etc. Et d’ailleurs, les marchés s’en inquiètent avec un certain tassement de leurs cours depuis le mois de mars. Certes, les arbres ne montent pas jusqu’au ciel, mais ces sociétés sont sans doute encore loin de l’avoir atteint, leur croissance étant année après année très élevée, et les disruption­s qu’elles provoquent dans l’économie très pérennes. N’enterrons donc pas trop vite les Gafa sous prétexte qu’elles ont du mal à s’insérer dans les modèles de valorisati­on traditionn­els.

Le débat continuera à faire rage sur le fait de savoir si les valorisati­ons de ces sociétés à forte croissance et faible profitabil­ité comme Amazon ou Netflix ne sont pas excessives. (...) Certes, les arbres ne montent pas jusqu’au ciel, mais ces sociétés sont sans doute encore loin de l’avoir atteint, leur croissance étant année après année très élevée, et les disruption­s qu’elles provoquent dans l’économie très pérennes.

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