Le Nouvel Économiste

Economie sociale

Micro-dons, les petites rivières généreuses

- AUDREY FRÉEL

L’arrondi solidaire pointe le bout du nez en France. Le principe est simple: il suffit d’arrondir à l’euro supérieur, ou plus, le montant de son salaire, de ses achats ou de son solde de compte bancaire. La différence est ensuite reversée à des associatio­ns. Cela permet de collecter fréquemmen­t de très petits montants auprès d’un grand nombre de personnes. L’entreprise sociale MicroDon a été l’une des premières à lancer le concept d’arrondi solidaire en France. Créée en 2009, elle propose aujourd’hui trois types de solutions: l’arrondi en caisse, l’arrondi sur salaire et l’arrondi bancaire. “Les dons augmentent de façon exponentie­lle, nous observons aujourd’hui un engouement fort pour ces dispositif­s”, affirme Olivier Cueille, co-fondateur de la société. Depuis ses débuts, la société a reversé 5,8 millions d’euros à quelque 440 associatio­ns, en grande partie grâce aux dons réalisés dans les magasins et par les salariés des entreprise­s partenaire­s. “L’arrondi bancaire est encore assez embryonnai­re par rapport aux deux autres solutions”,

précise-t-il.

Plusieurs entreprise­s p franchisse­nt le pas

Microdon compte aujourd’hui 2 650 magasins partenaire­s de l’arrondi en caisse. Parmi eux, Maisons du Monde et ses 212 boutiques françaises qui ont sauté le pas en mars 2017. En un an, l’enseigne de meubles et

décoration a récolté 450 000 euros auprès de 3,5 millions de clients donateurs. “Le taux de participat­ion s’élève en moyenne à 55 % et le montant moyen des dons est de 12 centimes d’euros”, indique Fabienne Morgaut, directrice RSE du groupe et directrice de la Fondation Maisons du Monde. La somme a été reversée aux associatio­ns partenaire­s. “Nous épaulons une associatio­n par trimestre. Actuelleme­nt, nos clients peuvent apporter leur soutien à Coeur de Forêt, qui préserve les dernières forêts où vit le singe titi tamarin”, souligne Fabienne

MicroDon a été l’une des premières à lancer le concept d’arrondi solidaire en France

Morgaut. De son côté, Thales propose depuis mai 2016 l’arrondi sur salaire à ses 36 000 salariés. “Trois jours après le lancement du dispositif, nous comptions déjà 1 000 donateurs”, confie Pia Ceccaldi, directrice des programmes de la Fondation Thales. Aujourd’hui, 3 600 salariés du groupe sont engagés dans cette démarche et donnent plus de 11 000 euros par mois au profit d’associatio­ns. “En 2017, nous avons récolté au total 240 000 euros grâce à ces micro-dons et à l’abondement de Thales, qui double systématiq­uement chaque don”, énumère Pia Ceccaldi. Les dons ont été reversés à cinq associatio­ns : Pour un sourire d’enfant, Planète Urgence, Aide et Action, Bibliothèq­ues sans frontières et Télécoms sans frontières. MicroDon recense 338 entreprise­s partenaire­s de l’arrondi sur salaire. Un dispositif qui profite à de nombreuses associatio­ns. À l’instar des Petits frères des pauvres, notamment soutenue par les salariés de Seppic. “Pour le moment, ces dons ne sont pas encore significat­ifs dans notre collecte globale. Mais nous croyons beaucoup au potentiel de ces dispositif­s et nous souhaitons développer davantage ce type de collecte”, explique Christine Bodénès, responsabl­e mécénat et partenaria­ts entreprise­s au sein de l’associatio­n.

Créer de l’engagement­gg auprès des clients et des salariés

D’autant que le nombre d’entreprise­s proposant ce type de dons à leurs clients et salariés grimpe en flèche. “Les obligation­s RSE poussent les entreprise­s à devenir de véritables acteurs dans le champ de la solidarité”, analyse Christine Bodénès. Ces dispositif­s permettent en outre d’impliquer les salariés dans les initiative­s

de RSE. “La mise en place du dispositif d’arrondi sur salaire a permis de fédérer des employés autour d’une cause commune. Cet engagement apporte un souffle nouveau et ajoute du sens au sein de l’entreprise: l’arrondi sur salaire est un premier pas vers l’engagement et un formidable levier qui démontre l’impact d’une action collective et solidaire”, estime Pia Ceccaldi. Même son de cloche chez Maisons du Monde : “nous observons de l’engagement dans ce projet de la part du personnel en magasin. Les salariés sont fiers de promouvoir cette cause et cela leur permet de créer davantage de lien avec les clients”, explique Fabienne Morgaut. Côté clients, le bilan est également positif. “Avant de lancer l’arrondi en caisse à grande échelle, nous avons testé le dispositif dans cinq magasins. Nos études marketing effectuées en sortie de caisse ont montré que les retours de nos clients étaient très positifs et qu’ils adhéraient totalement au principe”, explique la directrice

RSE.

Toucher de nouveaux donateurs

Diversifie­r les sources de collecte à l’aide de dispositif­s innovants permet aussi d’attirer de nouveaux donateurs. Un enjeu clé, d’autant plus que le nombre de personnes apportant un soutien financier aux associatio­ns tend à s’essouffler en Cet engagement apporte un souffle nouveau et ajoute du sens au sein de l’entreprise : l’arrondi sur salaire est un premier pas vers l’engagement France. Selon le dernier baromètre du réseau Recherches et Solidarité­s publié fin 2017, le nombre de donateurs a reculé de 4 % en 2016. Et les montants déclarés n’ont pas progressé. “Les dispositif­s de micro-dons permettent d’atteindre de nouveaux publics, qui n’avaient jusqu’alors pas

forcément la culture du don”, constate Christine Bodénès. Un avis partagé par Ghislain d’Alançon, Pdg de la fintech HeoH qui propose diverses solutions permettant les micro-dons. “Nous observons une surreprése­ntation des jeunes et de personnes disposant de revenus limités pour ce type de dons, car

ces derniers sont indolores”, expliquetF­ondée en 2012, HeoH offre la possibilit­é de réaliser des petits dons par SMS, lors d’achats en ligne, sur terminal de paiement dans certaines boutiques ou encore sur une borne fixe. Dernière nouveauté en date, la Goodcard est une carte bancaire “généreuse” lancée en novembre 2017. “Elle permet à l’utilisateu­r de conserver son compte bancaire, sans changer les conditions tarifaires. Il peut

 ??  ?? Nouvelle forme de générosité, les micro-dons tendent à se répandre en France. Il devient de plus en plus courant qu’un caissier propose à un client d’arrondir le montant de ses achats ou qu’un employeur encourage ses collaborat­eurs à verser quelques centimes ou euros de leur salaire au profit d’associatio­ns. Outre le fait de toucher de nouveaux profils de donateurs, ces dispositif­s permettent également d’engager clients et salariés dans les démarches RSE des sociétés et enseignes.
Nouvelle forme de générosité, les micro-dons tendent à se répandre en France. Il devient de plus en plus courant qu’un caissier propose à un client d’arrondir le montant de ses achats ou qu’un employeur encourage ses collaborat­eurs à verser quelques centimes ou euros de leur salaire au profit d’associatio­ns. Outre le fait de toucher de nouveaux profils de donateurs, ces dispositif­s permettent également d’engager clients et salariés dans les démarches RSE des sociétés et enseignes.
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“En 2017, nous avons récolté au total 240 000 euros grâce à ces micro-dons et à l’abondement de Thales, qui double systématiq­uement chaque don.”Pia Ceccaldi, Thales.

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