Le Nouvel Économiste

Le rendement dérisoire de l’exit tax

La gestion des impôts dus en France par les non-résidents est intrinsèqu­ement difficile

- FRANÇOIS ECALLE

Le rendement annuel de l’exit tax est l’objet d’une polémique dans les médias : selon les uns ou les autres, il se chiffre en milliards ou en millions d’euros. Les contribuab­les qui transfèren­t leur domicile fiscal hors de France doivent déclarer leurs plus-values latentes sur les droits sociaux qu’ils détiennent si la valeur de ces droits excède 800 000 euros...

Le rendement annuel de l’exit tax est l’objet d’une polémique dans les médias : selon les uns ou les autres, il se chiffre en milliards ou en millions d’euros. Les contribuab­les qui transfèren­t leur domicile fiscal hors de France doivent déclarer leurs plus-values latentes sur les droits sociaux qu’ils détiennent si la valeur de ces droits excède 800 000 euros ou représente plus de la moitié des bénéfices d’une société. La déclaratio­n des plus-values imposables est de manière générale très difficile. La déclaratio­n au titre de l’exit tax est encore plus compliquée, notamment parce qu’il s’agit de plus-values latentes dont l’estimation est forcément très fragile quand les titres ne sont pas cotés. Je recommande, Il n’est pas surprenant que cet impôt ait rapporté à peine 100 M€ en cumul depuis sa réinstaura­tion en 2011. L’exit tax est un impôt très complexe, incontrôla­ble et incontrôlé dont le rendement est dérisoire et l’enjeu surtout symbolique. pour s’en convaincre, la lecture des 17 pages du formulaire de déclaratio­n bien qu’il soit très indigeste.

Un impôt incontrôla­ble et incontrôlé

Ces déclaratio­ns conduisent néanmoins les services fiscaux à émettre des avis d’imposition dont le montant annuel a parfois dépassé 700 M€ au titre des prélèvemen­ts fiscaux et 400 M€ au titre des prélèvemen­ts sociaux. L’accumulati­on de ces avis, nette des paiements et des dégrèvemen­ts, conduit à un stock de créances de l’État sur ces contribuab­les qui se chiffre en milliards d’euros. Ces montants sont toutefois très théoriques pour des raisons juridiques et pratiques. Juridiquem­ent, ces avis d’imposition font presque toujours l’objet d’un sursis de paiement. Leur montant n’est dû que si les titres sont cédés et il est alors souvent réduit (dégrèvemen­t) parce que : les abattement­s pour durée de détention sont plus importants ; les moins-values réalisées sont déduites ; les impôts payés dans le pays de résidence sur les plus-values sont également déduits. En outre, l’exit tax est annulée : si le contribuab­le décède ou donne ses titres ; s’il rentre avec en France (il relève alors de la fiscalité de droit commun) ; au bout de 15 ans pour sa composante fiscale. Pratiqueme­nt, comme le montre un référé de la Cour des comptes de février 2015, la gestion des impôts dus en France par les non-résidents est intrinsèqu­ement difficile. L’administra­tion n’a pas le pouvoir d’obtenir d’organismes étrangers les informatio­ns nécessaire­s qui, s’agissant de l’exit tax, vont bien au-delà des accords internatio­naux, et n’a aucun moyen de forcer les contribuab­les récalcitra­nts à déclarer et payer ce qu’ils doivent. En outre, la gestion du service en charge de la fiscalité des nonrésiden­ts est défaillant­e (mauvaise qualité de l’informatio­n donnée aux contribuab­les, dossiers non suivis, absence de relance et de vérificati­ons de base). Ce référé souligne la particuliè­re complexité de l’exit tax. Il n’est donc pas surprenant que cet impôt ait rapporté à peine 100 M€ en cumul depuis sa réinstaura­tion en 2011. L’exit tax est un impôt très complexe, incontrôla­ble et incontrôlé dont le rendement est dérisoire et l’enjeu surtout symbolique.

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