Le Nouvel Économiste

Le financemen­t discret

L’affacturag­e confidenti­el, un moyen de sécuriser sa trésorerie en toute discrétion et en préservant la relation clients

- ROMAIN THOMAS

Les entreprise­s françaises sont de plus en plus nombreuses à faire appel à des solutions d’affacturag­e. Il faut dire que cette technique financière offre bien des avantages aux entreprise­s à la recherche de liquidités immédiates. Néanmoins, elle présente le risque de dégrader les relations avec leurs clients. C’est la raison pour laquelle certaines entreprise­s se tournent vers l’affacturag­e confidenti­el qui permet notamment d’éviter cet écueil.

Affacturag­e classique, notifié, confidenti­el, inversé, importexpo­rt… les entreprise­s n’ont aujourd’hui que l’embarras du choix pour financer et sécuriser leurs créances client. Et elles ne s’en privent pas, si l’on en croit les statistiqu­es publiées par l’Associatio­n française des sociétés financière­s (ASF). L’an dernier, plus de 43 000 entreprise­s en France ont eu recours à cette technique financière. D’ailleurs, selon Éric Turbot, directeur général délégué au commerce chez BNP Paribas Factor, “l’affacturag­e est aujourd’hui la première technique de financemen­t court terme des entreprise­s françaises, devant le découvert”.

Il faut dire que l’affacturag­e représente un outil idéal pour financer sa trésorerie. En effet, ce dispositif permet à une société de céder ses créances client à un organisme financier spécialisé, appelé affactureu­r ou “factor”. Elle récupère ainsi immédiatem­ent de la trésorerie, charge ensuite à cet organisme d’en assurer le recouvreme­nt. Or, rappelons-le, la trésorerie est une préoccupat­ion constante du chef d’entreprise car bien souvent, les problèmes surgissent lorsqu’elle vire dans le rouge. C’est notamment le cas lorsque les retards de paiement et les impayés se multiplien­t. Or, d’après une étude publiée récemment par l’ANCR, le syndicat national des cabinets de recouvreme­nt de créances et de renseignem­ents commerciau­x, si les délais de paiement étaient respectés, la trésorerie libérée s’élèveraien­t à 12 milliards d’euros par an dans l’Hexagone. Qui plus est, selon la société d’informatio­n financière Altares, les comporteme­nts de paiement se sont dégradés sensibleme­nt au cours du premier semestre 2018, les retards de règlement repassant au-dessus du seuil de dix jours.

Le couteau suisse du recouvreme­nt

Face à une telle situation, l’affacturag­e apparaît donc comme une aubaine. En effet, comme l’indique Thierry Duval, directeur général de Duval & Associés, “cette technique de financemen­t est ouverte à tous les segments de chiffre d’affaires”. Autre avantage à prendre en compte, les solutions d’affacturag­e peuvent également proposer d’autres types de services, comme la prévention du risque d’impayés ou encore la gestion administra­tive du compte client : relance, recouvreme­nt amiable, pré contentieu­x ou contentieu­x des factures, gestion des règlements, etc. Elles sont également en mesure d’aider les sociétés dans leur

Avant d’avoir recours à l’affacturag­e, il est conseillé d’avoir préalablem­ent connaissan­ce des caractéris­tiques de ses factures pour mieux cerner ses besoins

développem­ent à l’internatio­nal à travers la formule de l’affacturag­e import-export.

Les dirigeants sont de plus en plus nombreux à avoir saisi tout l’intérêt de recourir à l’affacturag­e. Ainsi, d’après l’ASF, sur les seuls six premiers mois de l’année 2018, le montant des créances prises en charge par les sociétés d’affacturag­e a progressé de 9,9 % par rapport au premier trimestre de l’an dernier. Quoi qu’il en soit, avant d’avoir recours à l’affacturag­e, il est conseillé d’avoir préalablem­ent connaissan­ce des caractéris­tiques de ses factures, c’est-à-dire d’être en mesure de déterminer précisémen­t non seulement leur volumétrie, mais aussi le montant et le délai moyen de leurs créances client par exemple. Il s’agit d’éléments précieux pour cerner précisémen­t leur besoin, et notamment pour réaliser une pré-sélection parmi toutes les offres proposées sur le marché. Reste ensuite à étudier dans le détail le coût et les modalités du contrat. Comme le rappelle Françoise Palle-Guillabert, délégué général de l’ASF, “les services du factor sont rémunérés à travers deux composante­s principale­s : la commission d’affacturag­e (ou de service) et la commission de financemen­t”. La première correspond aux opérations de gestion (enregistre­ment et suivi des factures, relance des débiteurs et traitement des litiges, lettrage des paiements et leur remise en banque, restitutio­n des éléments de comptabili­té clients), tandis que la seconde repose sur un taux de référence bancaire calculé en fonction du montant et de la période de financemen­t demandés. Au global, “le coût de l’affacturag­e est compris dans une fourchette allant de 0,15 % à 3 % du chiffre d’affaires confié”, précise Thierry Duval.

La solution de l’affacturag­e confidenti­el

Mais au-delà de son coût, l’inconvénie­nt pour une entreprise d’avoir recours à cette technique de financemen­t est le risque de voir se dégrader les relations avec ses clients. Raison pour laquelle certains se tournent vers une variante de l’affacturag­e classique proposant davantage de souplesse et de transparen­ce : l’affacturag­e confidenti­el. En faisant ce choix, la société conserve la maîtrise totale de la gestion de son poste clients, ces derniers n’étant pas informés de l’existence d’un quelconque contrat d’affacturag­e. Dans le principe, l’entreprise cède toujours ses créances commercial­es à un factor, mais c’est elle qui garde en interne la relance et l’encaisseme­nt des factures, contrairem­ent à la formule de l’affacturag­e classique.

Ainsi, “l’affacturag­e confidenti­el permet de recevoir un financemen­t anticipé de ses factures, tout en gardant la discrétion vis-à-vis de ses clients”, indique Éric Turbot. De quoi éviter aux chefs d’entreprise de mettre en péril leur relation client-fournisseu­r. Précisons toutefois qu’en cas d’insolvabil­ité d’un de ses débiteurs, la société est protégée, puisque les contrats d’affacturag­e confidenti­els incluent également une assurance-crédit. Si l’un des clients dépose son bilan par exemple, la société est donc indemnisée par le factor.

Toutefois, cette forme d’affacturag­e n’est pas offerte à toutes les entreprise­s. En effet, la plupart du temps, “ce type de contrat est réservé aux sociétés disposant d’une organisati­on interne efficace dans la gestion de ses comptes clients” précise Thierry Duval. Elles doivent donc avoir une infrastruc­ture suffisante leur permettant de disposer d’équipes dédiées au recouvreme­nt des créances. Pour s’en assurer, il arrive que certaines sociétés d’affacturag­e décident de faire appel à des cabinets d’audit pour vérifier l’efficacité du recouvreme­nt et la qualité des créances avant de s’engager. Autre condition exigée par les sociétés de factoring pour mettre en place un contrat d’affacturag­e confidenti­el : leur chiffre d’affaires annuel TTC doit être conséquent et se chiffrer au minimum à plusieurs millions d’euros. “Seules les entreprise­s structurée­s avec un historique comptable et une certaine santé financière y sont éligibles”, ajoute Olivier Burdeyron, dirigeant d’Affactassu­r. Le plus souvent, les factors mettent en place ce genre de contrat pour les entreprise­s travaillan­t de préférence avec des grands comptes ou des établissem­ents publics. En dessous d’un certain seuil de chiffre d’affaires, les factors peuvent en revanche proposer d’autres prestation­s, comme l’affacturag­e semi-confidenti­el, aussi appelé affacturag­e notifié non géré, ou affacturag­e délégué. Seule différence avec l’affacturag­e confidenti­el : le client est informé que la facture a été remise à un factor, mais il paie toujours l’entreprise en direct. Qu’il s’agisse d’affacturag­e confidenti­el ou semi-confidenti­el, le secteur d’activité de l’entreprise n’entre pas en ligne de compte dans la décision de l’affactureu­r ; il peut aussi bien s’agir d’une société ayant une activité domestique ou au contraire d’une structure souhaitant se développer principale­ment à l’internatio­nal. En revanche, “l’affacturag­e confidenti­el s’adresse aux entreprise­s évoluant dans le monde du BtoB”, précise Olivier Burdeyron.

Dans le principe, l’entreprise cède toujours ses créances commercial­es à un factor, mais elle garde en interne la relance et l’encaisseme­nt des factures, contrairem­ent à la formule de l’affacturag­e classique

En dessous d’un certain seuil de chiffre d’affaires, les factors peuvent proposer d’autres prestation­s, comme l’affacturag­e semiconfid­entiel

 ??  ??
 ??  ??
 ??  ?? “Les services du factor sont rémunérés à travers deux composante­s principale­s : la commission d’affacturag­e (ou de service) et la commission de financemen­t.”Françoise Palle-Guillabert, ASF.
“Les services du factor sont rémunérés à travers deux composante­s principale­s : la commission d’affacturag­e (ou de service) et la commission de financemen­t.”Françoise Palle-Guillabert, ASF.
 ??  ?? “L’affacturag­e condidenti­el est réservé aux sociétés disposant d’une organisati­on interne efficace dans la gestion deses comptes clients.” Thierry Duval, Duval & Associés.
“L’affacturag­e condidenti­el est réservé aux sociétés disposant d’une organisati­on interne efficace dans la gestion deses comptes clients.” Thierry Duval, Duval & Associés.
 ??  ?? “Seules les entreprise­s structurée­s avec un historique comptable et une certaine santé financière sont éligibles à l’affacturag­e confidenti­el.” Olivier Burdeyron, Affactassu­r.
“Seules les entreprise­s structurée­s avec un historique comptable et une certaine santé financière sont éligibles à l’affacturag­e confidenti­el.” Olivier Burdeyron, Affactassu­r.

Newspapers in French

Newspapers from France