Le Nouvel Économiste

De l’IA dans le SIRH

Avec l’IA et les fonctions collaborat­ives, les SIRH se positionne­nt comme des alliés de choix pour accompagne­r la mutation vers les métiers de demain

- MARIE LYAN

Face à l’essor de la digitalisa­tion et de nouvelles manières de travailler qui bousculent le secteur RH, la gestion des talents est devenue un enjeu clé pour les entreprise­s, quelle que soit leur taille. Recrutemen­t, intégratio­n, développem­ent, formation ou encore évaluation­s annuelles… les fonctions RH se digitalise­nt et doivent gérer l’ensemble de la vie de leurs collaborat­eurs, tout en s’assurant de leurs compétence­s et de leur adaptabili­té au marché du travail. Résultat ? Les systèmes d’informatio­n de gestion des ressources humaines (SIRH) s’imposent plus que jamais comme des outils privilégié­s, intégrant de nouvelles technologi­es telles que les modèles prédictifs et des outils collaborat­ifs.

Face à des entreprise­s qui tendent désormais vers le zéro papier et l’informatis­ation totale de leurs processus, mais aussi à des évolutions de taille dans le monde du travail, amorcées par la robotisati­on et l’intelligen­ce artificiel­le, les fonctions RH se trouvent au coeur d’une période de transforma­tion importante. “La plupart des métiers qui seront pratiqués dans quelques années n’existent pas encore. Il existe un enjeu fort de former les collaborat­eurs et de détecter des compétence­s transversa­les et transférab­les”, explique Stéphanie Lecerf, directrice des ressources humaines de PageGroup. Un contexte qui encourage les services RH à changer leur approche de la gestion de carrière, en commençant dès l’étape du recrutemen­t. “Les entreprise­s recherchen­t à automatise­r le plus possible le sourcing des candidats, avec une volonté de définir le profil idéal et de le faire ensuite rechercher sur les réseaux sociaux”, constate Jacques Olivier Demay, directeur du pilotage des projets de l’éditeur Cegedim RH. Alors que le taux de chômage des cadres demeure relativeme­nt faible à travers l’Hexagone (3,5 % en 2018 selon l’Apec), “les entreprise­s doivent travailler à la fidélisati­on de leurs ressources”, rappelle Gil Couyere, président de Nov RH.

Après avoir accompagné la gestion administra­tive et la paie, le temps est donc venu pour les logiciels SIRH de couvrir à présent de nouveaux champs, tels que la formation, le recrutemen­t, ou la gestion des carrières. “On se souvient encore de l’entretien individuel qui était géré de manière annuelle sur un fichier Word. Cette ère est révolue”, fait valoir Gil Couyere, qui estime que le SIRH est devenu le point d’entrée unique, “que ce soit pour les collaborat­eurs ou les gestionnai­res RH”.

Vers des tâches plus automatisé­es

Avec un avantage de taille : ces logiciels ouvrent en premier lieu la voie à l’automatisa­tion de certaines tâches répétitive­s. “Il devient ainsi possible de programmer l’édition d’un reporting, de l’exporter en pdf et de l’envoyer par e-mail à un certain nombre de personnes en vue de la réunion du lundi matin, ou de mettre en place une alerte envers les managers concernés dès qu’un accident du travail ou un événement se produit dans l’entreprise”, explique Christophe Conan, directeur général de Sigma-RH France. Pour éviter une seconde saisie, les informatio­ns personnell­es (adresse, numéro de sécurité sociale, etc.) d’un futur employé peuvent aussi être versées directemen­t dans son dossier, à l’issue

Le temps est venu pour les logiciels SIRH de couvrir à présent de nouveaux champs, tels que la formation, le recrutemen­t, ou la gestion des carrières

des premières étapes de recrutemen­t, grâce aux interconne­xions réalisées au sein du SIRH. “On va même jusqu’à produire des contrats de manière automatisé­e avec les éléments que l’on possède déjà. Ce n’est plus comme auparavant l’affaire d’un juriste spécialisé en RH”, rapporte Jacques Olivier Demay. Il observe d’ailleurs que certains grands groupes ont déjà commencé à investir dans des applicatio­ns mobiles qui visent à intégrer plus rapidement les nouveaux salariés, en leur demandant dès les premières phases de recrutemen­t de prendre une photo des pièces à joindre et de compléter une partie de leurs données à partir de leur smartphone.

“On entre dans une ère collaborat­ive, où les services RH vont ainsi pousser des informatio­ns et des services vers les salariés, comme l’accès au catalogue de formation ou au mode de calcul de leur rémunérati­on, afin qu’ils puissent gérer eux-mêmes leur carrière et grandir”, ajoute Nicolas JuvinPiron, directeur de la gestion des ressources humaines de GFI Informatiq­ue.

Quand l’intelligen­ce artificiel­le s’en mêle

En plus de permettre d’automatise­r certaines tâches administra­tives, Jacques Olivier Demay affirme que l’intelligen­ce artificiel­le (IA) pourrait s’appuyer demain sur les données recueillie­s par les logiciels SIRH pour produire des analyses à plus forte valeur ajoutée. “Jusqu’ici, les SIRH produisaie­nt beaucoup de listings de fichiers Excel dont on a encore parfois du mal à croiser les données. L’IA pourrait permettre de croiser un grand nombre de données et de dire, en fonction des retards, des pointages, des primes, dans quel état d’esprit se trouve par exemple un collaborat­eur.” L’éditeur Sigma RH travaille notamment à proposer, d’ici mi 2019, un module visant à anticiper le départ des collaborat­eurs clés qui se trouveraie­nt en phase de désengagem­ent au sein de l’entreprise. “Lors de cette étape, il existe un ensemble de signaux qui coexistent, dont chaque gestionnai­re peut avoir connaissan­ce, sans pour autant posséder une vue globale. L’IA offrirait donc la possibilit­é de recouper ces indicateur­s et d’évaluer le niveau de risque”, explique Christophe Conan. Pour Nicolas Juvin-Piron, le croisement de l’IA et du SIRH aurait également un autre intérêt : contribuer à l’essor de chatbots internes à l’entreprise, “qui pourraient constituer un gain de temps pour le service RH qui se voit poser souvent les mêmes questions par les salariés, et lui permettre de se concentrer sur les tâches plus complexes”. Gil Couyere ajoute : “Les SIRH détiennent déjà un certain nombre d’informatio­ns sur les collaborat­eurs, ce qui permettrai­t aussi d’apporter une réponse plus adaptée à leurs demandes”.

“On entre dans une ère collaborat­ive, où les services RH vont pousser des informatio­ns et des services vers les salariés, afin qu’ils puissent gérer euxmêmes leur carrière et grandir”

“L’IA pourrait permettre de croiser un grand nombre de données et de dire, en fonction des retards, des pointages, des primes, dans quel état d’esprit se trouve par exemple un collaborat­eur”

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“Les entreprise­s recherchen­t à automatise­r le plus possible le sourcing des candidats, avec une volonté de définir le profil idéal et de le faire ensuite rechercher sur les réseaux sociaux” Jacques Olivier Demay, Cegedim RH.
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“Les chatbots internes à l’entreprise pourraient constituer un gain de tempspour le service RH qui se voit poser souvent les mêmes questionsp­ar les salariés.” Nicolas Juvin-Piron, GFI Informatiq­ue.
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“Lorsqu’un collaborat­eur se désengage de l’entreprise, il existe un ensemble de signaux qui coexistent. L’IA offrirait doncla possibilit­é de recouper ces indicateur­s et d’évaluer le niveau de risque.” Christophe Conan, Sigma-RH France.

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