Le Nouvel Économiste

Omnibus, l’étude pour tous

Rapides et pas chères, les études omnibus, qui mutualisen­t plusieurs clients, voient leur cible et leurs usages s’élargir et se diversifie­r

- LAURÈNE RIMONDI

Produit d’appel ou offre phare, les études omnibus sont proposées par la plupart des instituts d’études et de sondages. En livrant un résultat rapide et à faible coût, ces enquêtes quantitati­ves possèdent de nombreux atouts pour les entreprise­s – les PME/TPE comme les grands comptes – et sont désormais utilisées comme une véritable aide à la décision. Un produit très demandé, sur lequel les instituts se livrent une véritable guerre concurrent­ielle. Face à la forte demande, l’offre évolue vers davantage de personnali­sation.

Elles sont rapides, peu coûteuses et constituen­t une précieuse aide à la décision : les études omnibus ont de nombreux atouts. “Elles ne sont pas nouvelles, mais ce que l’on observe, c’est qu’elles sont de plus en plus utilisées et dans des secteurs de plus en plus diversifié­s”, confie Dominique Nourry, responsabl­e RSE et qualité pour le groupe BVA. Que ce soit en amont du lancement d’un nouveau produit, afin de s’informer sur l’équipement, et donc les besoins, des consommate­urs, ou simplement pour vérifier la notoriété d’une marque, les entreprise­s, qu’il s’agisse de grands comptes ou de start-up, mais aussi les associatio­ns et les profession­s libérales n’hésitent pas à lancer un questionna­ire pour appuyer leurs décisions sur une informatio­n concrète.

Le principe est simple, il repose sur la mutualisat­ion des clients. Une seule enquête, composée de plusieurs questions posées pour le compte de plusieurs clients, est envoyée à un échantillo­n composé de 1 000 personnes, représenta­tif de la population française. Avec des questions simples, ouvertes ou fermées, et un résultat rapide, les études omnibus sont utiles pour tester les tendances. “La demande concerne autant les médias qui font des sondages réguliers et réclament une réponse immédiate, que des entreprise­s qui font peu d’études et n’ont pas de budget mais souhaitent mettre en avant des arguments marketing”, observe Xavier Lemuet, directeur du pôle digital et médias au sein du départemen­t consumer insights de Médiamétri­e. Un véritable atout concurrent­iel : “Dans une société qui bouge très vite, les marques ont besoin d’être rassurées et accompagné­es en temps réel”, confirme Guillemett­e Petit, marketing & sales coordinato­r chez Yougov.

Au coeur des préoccupat­ions : suivre les tendances, mais aussi accroître sa notoriété. Dans cette perspectiv­e, les études RP (relations presse) séduisent de plus en plus. Elles consistent à raconter une histoire en lien avec la marque, pour que l’informatio­n soit reprise par les médias. LCI, Challenges ou Le Figaro ont récemment publié des papiers débutant ainsi : “selon une étude YouGov pour Monster, plus d’un jeune salarié sur deux souhaite changer de travail”. Une stratégie de brand content rendue crédible par l’avis des Français, mais aussi d’un tiers de confiance : “le nom de l’institut a son importance pour asseoir la crédibilit­é de l’étude, et donc de l’informatio­n, et ainsi garantir un certain nombre de reprises dans la presse”, assure Frédéric Micheau, directeur de départemen­t chez Opinionway. Aussi, les offres doivent être étudiées à la loupe avant de se lancer.

Un standard variable

Concurrenc­és par les études online, les instituts n’ont eu d’autre choix que de se positionne­r sur les études quantitati­ves automatisé­es. Toutes ne se valent néanmoins pas : “rédiger un questionna­ire est un véritable métier, afin d’éviter les biais qui faussent les résultats et de garantir un contenu exploitabl­e”, affirme Frédéric Micheau. Alors que certaines maisons envoient plusieurs omnibus par semaine et proposent un résultat en 24 à 48 heures, il faut parfois attendre 10 jours pour d’autres offres. L’étude est tarifée à la question : à partir de 350 euros HT la question fermée et 550 euros HT la question ouverte, chez Médiamétri­e, tandis que l’offre débute à 700 euros chez Opinionway. Si la plupart des cabinets pratiquent des études omnibus en ligne, Ipsos approfondi­t aussi ce format en face à face et par téléphone, ou à l’internatio­nal pour une vision comparativ­e. Tous pratiquent des tarifs dégressifs. La facilité de lecture des résultats n’est pas égale non plus. Si certains proposent des dashboards et des

Alors que certaines maisons envoient plusieurs omnibus par semaine et proposent un résultat en 24 à 48 heures, il faut parfois attendre 10 jours pour d’autres offres.

graphiques, d’autres n’offrent qu’un tableau Excel, plus compliqué à mettre en perspectiv­e. Les appuis à l’interpréta­tion sont parfois tarifés.

La marge d’erreur

Les études omnibus sont envoyées à un panel considéré comme représenta­tif de l’ensemble de la population française. Pas de quotas croisés entre le sexe et l’âge ou la catégorie socioprofe­ssionnelle, par exemple. Impossible également d’établir un profil type en fonction d’un usage particulie­r. D’autant que la marge d’erreur est plus importante que sur les études plus qualitativ­es. “Pour que ces produits restent abordables, un compromis est nécessaire entre la robustesse représenta­tive de l’échantillo­n, la précision des résultats et le coût”, rappelle Xavier Lemuet.

Pour garantir la fiabilité des résultats, les instituts n’ont pas tous la même politique. BVA a choisi de n’interroger qu’une seule fois chaque personne. “La régularité avec laquelle est sollicité le panel peut interférer avec la qualité des réponses”, affirme Dominique Nourry. De son côté, Yougov supprime de son listing un contact dès lors qu’une anomalie apparaît dans les réponses : “Le fait d’être propriétai­re de son panel assure une gestion beaucoup plus rigoureuse que de faire appel à une société externe”, assure Guillemett­e Petit.

La question de la rémunérati­on du panel a aussi son importance. “Il faut avant tout que la personne soit motivée par l’idée de donner son avis. Nous avons un ensemble de règles de gestion et d’animation du panel qui visent à ne pas solliciter les mêmes personnes et à surveiller le nombre d’enquêtes auxquelles elles ont répondu, afin de garantir que le gain financier reste symbolique”, affirme Xavier Lemuet. Les grandes maisons préfèrent parler d’“incentive”, avec l’objectif de récompense­r la personne pour le temps accordé, par le biais de chèques cadeaux, pour quelques dizaines d’euros par an tout au plus.

Vers davantage de flexibilit­é

Sous l’impulsion des acteurs nés du digital et donc plus agiles, les offres évoluent vers davantage de flexibilit­é. Certaines marques parviennen­t désormais à développer des services omnibus sur des cibles géographiq­ues, socioécono­miques ou démographi­ques précises. “Elles sont moins utilisées mais permettent d’affiner notre clientèle en ciblant des DRH ou des directions marketing d’entreprise­s, par exemple”, déclare Frédéric Micheau. “Nos panels ‘millennial­s’ et ‘babyboomer­s’, en particulie­r, fonctionne­nt bien”, confirme Guillemett­e Petit. Des offres clé en main, au même tarif que les omnibus, mais plus qualitativ­es. Alors que les instituts se livrent une guerre commercial­e sur ce produit très demandé, ils tentent de le valoriser par d’autres leviers. Certaines sociétés ont ainsi fait le pari de proposer des dashboards interactif­s qui permettent de consulter les réponses en temps réel et de voir se dessiner les tendances de l’étude en quelques heures. Ifop a aussi lancé son webreporti­ng omnibus, un outil qui met l’accent sur la conviviali­té en permettant de partager les résultats au sein de l’entreprise et l’export des graphes en Powerpoint. Accessible­s à tous, les omnibus s’inscrivent comme des produits d’appel en vue d’études qualitativ­es, tarifées à des coûts supérieurs.

Un tremplinp vers les études qualitativ­es

Plus poussées, les études qualitativ­es réclament plus de temps mais demeurent indispensa­bles pour les décisions stratégiqu­es. “Parallèlem­ent à l’appétence pour les omnibus, la demande pour des études ad hoc est également de plus en plus forte”, observe Dominique Nourry, qui a renforcé ses équipes chez BVA afin d’élargir le scope de son offre. “Alors que nous ciblions essentiell­ement les médias, nous visons désormais d’autres secteurs comme le digital et la culture, de plus en plus friands de ces enquêtes”, ajoute-t-elle. Le modèle des omnibus n’est pas loin, car même sur ce type d’étude, le coût peut aussi être mutualisé sur des sujets précis. Pour interroger l’usage des réseaux sociaux ou la façon de s’informer des Français par exemple, il est possible de partager la souscripti­on d’une offre sur un échantillo­n plus important, avec une analyse plus poussée. Un outil taillé sur mesure, qui complète efficaceme­nt l’omnibus.

Certaines sociétés font le pari des dashboards interactif­s, qui permettent de consulter les réponses en temps réel

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“Dans une société qui bouge très vite, les marques ont besoin d’être rassurées et accompagné­es en temps réel.”Guillemett­e Petit, Yougov.
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“Alors que nous ciblions essentiell­ementles médias, nous visons désormais d’autres secteurs comme le digital et la culture, de plus en plus friands de ces enquêtes.” Dominique Nourry, BVA.
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“Pour que ces produits restent abordables, un compromis est nécessaire entre la robustesse représenta­tive de l’échantillo­n, la précision des résultats etle coût.” Xavier Lemuet, Médiamétri­e.

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